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2016 a été l’année de la grande percée de l’immunothérapie pour le cancer

L’immunothérapie est bien partie pour devenir l’approche principale pour le traitement de différents types de cancer. « L’immunothérapie donnera une autre dimension à la lutte contre le cancer. »

L’idée de l’immunothérapie pour traiter le cancer n’est pas neuve: il y a plus de cent ans, quelqu’un avait déjà eu l’idée de stimuler le système immunitaire à lutter davantage contre les cellules cancéreuses. Cependant, la technique n’est couramment utilisée que depuis 2010. 2016 a été l’année de la grande percée, grâce à des études sérieuses sur le traitement réussi de cancers (notamment de la vessie, du poumon, et de la peau). « Au fond, nous nous servons d’une ancienne observation pour emprunter de nouvelles voies », explique le généticien Max Mazonne de la filiale louvaniste du Vlaams Instituut voor Biotechnologie (Institut flamand de Biotechnologie). « Mais c’est plus sophistiqué qu’autrefois. À l’époque, on utilisait des bactéries pour stimuler les défenses contre le cancer – ce qu’on fait encore aujourd’hui : on se sert de bactéries TBC pour traiter le cancer de la vessie. Mais aujourd’hui, l’immunothérapie se base surtout sur le développement d’anticorps que les cellules T envoient dans la lutte contre certains éléments pathogènes. La technique est bien partie pour devenir l’approche principale dans le traitement de différents types de cancer. »

L’approche la plus ingénieuse est basée sur le blocage d' »immune checkpoints ». Notre corps utilise des checkpoints pour éviter que les défenses attaquent massivement nos propres cellules, ce qui nous ferait succomber à une version générale de ce qu’on appelle les maladies auto-immunes. Les cellules cancéreuses les utilisent pour se protéger contre les attaques du système immunitaire. Elles activent les checkpoints dans les cellules du système immunitaire, afin qu’elles soient paralysées. Du coup, les cellules immunitaires ignorent les cellules cancéreuses qui peuvent proliférer sans entraves. Pour contrer ce processus, les scientifiques paralysent les protéines des cellules cancéreuses qui entravent les checkpoints. À cet effet, ils produisent des anticorps monoclonaux qui modulent la communication entre les cellules immunitaires entre elles et les cellules dans leur environnement afin que la défense se démène contre l’attaque du cancer. Ils enlèvent donc les pédales de frein enfoncées par les cellules cancéreuses pour se protéger contre la défense. « Pour éviter que l’immunothérapie perturbe toutes les défenses, il y a moyen de modifier les cellules T du système immunitaire de sorte qu’elles attaquent les cellules cancéreuses qui vous rendent malades », explique Mazzone. « L’immunothérapie permet de stimuler la défense dans la lutte contre les cellules cancéreuses, mais uniquement contre ces cellules-là. Sinon, les effets secondaires pourraient être plus grands que les bénéfices qu’on fait dans la lutte contre la maladie. Les cellules cancéreuses sont d’ailleurs très inventives pour contourner les attaques de notre système immunitaire. »

Les recherches de Mazzone et son équipe se concentrent sur l’amélioration des possibilités de permettre aux cellules T de faire efficacement leur boulot. « Vous pouvez comparer les cellules T aux taureaux que vous envoyez dans une arène pour engager un combat », explique-t-il. « Cela aide de leur donner la bonne alimentation et l’énergie pour effectuer leur tâche. Une tumeur est une entité qui se développe rapidement, capable d’épuiser les cellules et qui produit beaucoup de déchets. Cela crée un environnement hostile et toxique, même pour les cellules immunitaires. Nous essayons de corriger la situation de façon à ce que l’activité des cellules T ne soit plus réprimée, de sorte qu’elles se multiplient et puissent faire leur boulot convenablement. Autrement dit : nous faisons en sorte qu’il y ait plus de taureaux dans l’arène dotés de la force nécessaire pour lutter efficacement. »

Dans d’autres circonstances, les chercheurs doivent ouvrir les portes de l’arène (la tumeur), pour laisser entrer les taureaux. Les tumeurs sont très bonnes à se rendre invisibles à l’ennemi. En même temps, il faut pouvoir chasser les protéines qui répriment la défense de l’arène. Tant la défense que notre immunité sont un système complexe doté de nombreux mécanismes de contrôle qui empêchent d’intervenir sans effets secondaires.

« L’immunothérapie est la seule thérapie qui permet de déclencher une réaction capable de vraiment éliminer une tumeur », déclare Mazzone. « On ne veut plus contrôler uniquement la maladie en freinant la tumeur. Non, on veut guérir en créant une armée de cellules immunitaires qui attaquent et éliminent la tumeur. Je m’attends à ce que dans cinq ans ce soit la thérapie standard pour traiter le cancer et de plus en plus d’entreprises pharmaceutiques partagent cet avis. Il faut en finir avec ces thérapies qui offrent des chances de s’échapper à la tumeur, ce qui lui laisse le loisir de revenir proliférer. L’immunothérapie permet aussi de travailler globalement, car on peut envoyer le système immunitaire dans de nombreuses directions. L’avenir est aux thérapies combinées, on emprunte plusieurs voies en même temps pour enlever toute possibilité de survivre à la tumeur. À l’heure actuelle, c’est encore très laborieux et il y a encore trop d’effets secondaires, mais cela va s’améliorer. L’immunothérapie donnera une autre dimension à la lutte contre le cancer. »

Depuis deux décennies, on utilise la thérapie avec succès dans la lutte contre les maladies auto-immunes et les maladies inflammatoires telles que l’arthrite rhumatoïde et la maladie de Crohn. La technique peut aussi être utilisée dans la lutte contre les allergies, même si dans ce cas il faut freiner le système immunitaire et non le stimuler, car ces maladies découlent d’une réaction excessive du système immunitaire.

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