Une abeille-robot pour " enseigner " à sa congénère animale à se protéger et à prospérer. © DR

Une intelligence collective robotico-animale

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Briser la barrière entre les espèces, amener des animaux très différents à inter- agir et à communiquer entre eux – via Internet – pour sauver la planète… Et cela sous la houlette de l’humain, via un algorithme qui commande des robots-animaux intelligents infiltrés dans des écosystèmes endommagés : voilà le projet – fou -, ASSISIbf, financé par le programme Technologies futures et émergentes (FET) de la Commission européenne.

Alors que, d’après de nombreux scientifiques, nous sommes entrés dans la sixième extinction de masse de notre planète, que 75 % de la faune et de la flore terrestres seraient menacées, des chercheurs de France, de Suisse, du Portugal, d’Autriche, de Croatie et d’Allemagne ont relevé leurs manches pour travailler de concert, depuis 2013, à lutter contre la destruction des écosystèmes mis à mal par l’activité humaine. Tout en rappelant que les trois quarts des productions agricoles reposent sur la pollinisation des champs par les insectes. Ce n’est donc pas un hasard si le premier  » agent provocateur  » censé influencer un groupe animal menacé est une abeille-robot, inventée en Autriche. En parallèle, en Suisse, était développé un poisson mécanique, qui, comme l’abeille autrichienne, est doté d’intelligence artificielle. Objectif des deux robots-animaux-espions : se mêler à leurs congénères vivants respectifs, imiter leur comportement, le comprendre, l’influencer et, in fine, le communiquer à un autre groupe animal.

C’est ainsi que, en laboratoire, un essaim d’abeilles a pu pour la première fois  » parler  » avec un banc de poissons situé à 700 km de distance ! Concrètement, il s’agissait de voir si les robots infiltrés arriveraient à dialoguer entre eux, de façon à ce que poissons et abeilles se comportent de façon similaire. Surprise : après vingt-cinq minutes de zizanie, les deux groupes d’animaux ont harmonisé leurs mouvements et leurs décisions.

Très bien, mais à quoi cela sert-il ? L’argument majeur avancé par le coordinateur du projet, le Dr. Thomas Schmickl : en créant une société mixte de robots et d’animaux, nommée bio- hybridité, l’humain pourrait enseigner de nouvelles connaissances aux bêtes, afin que ces dernières se protègent et prospèrent malgré les écueils qu’elles doivent affronter (réchauffement climatique, déforestation, pollution). Et ce grâce à l’algorithme implanté dans les animaux-espions. Concrètement, il s’agit donc, grâce aux robots, de mettre sur pied une intelligence artificielle collective de la faune, afin que cette dernière puisse prendre des décisions cruciales pour éviter sa disparition dans des écosystèmes endommagés. Par exemple, si une abeille-robot prévoit une période de grand froid, elle pourrait convaincre la reine de retarder sa ponte. Par la suite, elle serait capable également d’inciter les insectes à aller butiner des fleurs situées dans des zones peu polluées, pour leur propre survie. Et la nôtre.

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