Après moins de deux ans, trois trophées et un huitième de finale de Ligue des Champions, Nicky Hayen est licencié par Bruges. Une surprise, sauf pour ceux qui savent qu’il n’a jamais vraiment convaincu ses patrons.
Tout avait commencé par un titre de champion de Belgique. Inattendu et incontesté. Pourtant, initialement désigné comme intérimaire alors que son travail à la tête de Club NXT, l’équipe des moins de 23 ans de Bruges, ne faisait pas l’unanimité, Nicky Hayen n’avait que peu d’atouts dans sa manche. Avec le titre de champion, il a contraint le Club de Bruges à bouleverser ses plans et s’est installé dans le costume de coach principal. Pour combien de temps? Difficile à dire. L’aventure se termine avec l’impression que pendant un peu moins de deux ans, Hayen n’a fait que reporter la date de son départ.
Lors de ces fameux play-offs victorieux du printemps 2024, tous s’accordaient à dire que le titre de Bruges était celui des cadres retrouvés. De patrons du vestiaire à nouveau responsabilisés, à l’image d’un Hans Vanaken en pilote automatique vers son troisième Soulier d’or. L’année suivante, les arrivées de Christos Tzolis et Ardon Jashari donnent au Club l’un des meilleurs noyaux de son histoire. Les dirigeants attendent donc Nicky Hayen au tournant, et l’équipe répond présent: meilleure attaque de la phase classique, Bruges fait le spectacle, continue à produire plus de 2 «expected goals» par match en play-offs, mais est doublé par le sprint final exceptionnel de l’Union Saint-Gilloise de Sébastien Pocognoli. Pour la deuxième fois en trois ans, le titre échappe à l’auto-proclamé «Bayern de Belgique». Une contestation qui fait désordre.
Cette année, la priorité de Bruges est donc de retrouver les lauriers nationaux. Nicky Hayen est sous pression, encore, et probablement pas aidé par un mercato qui ne renforce pas assez son secteur offensif à son goût. L’enchainement avec les matchs de Ligue des Champions essouffle ses cadres, et la rotation ne porte que trop rarement ses fruits. Malgré les apparences positives au classement, le Club est très loin de son niveau de performance de la saison écoulée. Ainsi, Bruges ne produit plus «que» 1,62 xG (expected goals) par match en championnat (chaque tir au but tenté reçoit une valeur entre zéro et un en fonction de la probabilité de le voir finir au fond des filets). Beaucoup moins que l’an dernier, et moins qu’un club comme Westerlo depuis le début de saison. Une insuffisance qui fait grincer des dents en haut lieu, tout autant que le bilan brugeois en déplacement. Loin de son stade Jan Breydel, Bruges n’a effectivement récolté que treize unités sur les 27 mises en jeu, ne marquant que neuf fois en autant de sorties. Un bulletin qui aurait pu être encore pire sans des victoires dans les arrêts de jeu à Zulte Waregem et au Standard.
Au fil des semaines, ce Bruges parait à court d’idées offensives. Le partage de prestige contre Barcelone (3-3 à domicile) est l’unique prestation au-delà des 2 xG créés sur les douze dernières sorties des «Blauw en Zwart». Souvent irréprochable tactiquement dans ses plans de match, Nicky Hayen est par contre pointé du doigt pour son approche plus globale, un plan de jeu trop dépendant des exploits individuels de Christos Tzolis ou des inspirations de Hans Vanaken. C’était également le reproche adressé en fin de règne à Philippe Clement, faisant fi de prestations européennes que les dirigeants ont désormais l’habitude de voir abouties grâce à la motivation naturelle des joueurs face aux affiches proposées.
De l’extérieur, il est difficile de définir quelle est vraiment la patte footballistique de Nicky Hayen. Ce n’est pas toujours un problème pour Bruges, puisque la logique mise en place par Vincent Mannaert lors de ses longues années dans la Venise du Nord voulait que l’entraîneur ne devait être qu’un employé remplaçable comme un autre. Un serviteur du Club plutôt qu’un protagoniste, laissant la lumière aux joueurs qui doivent alimenter les comptes brugeois.
Ivan Leko aime rappeler qu’à son époque, il a fait gagner «100 millions d’euros» au Club de Bruges grâce aux transferts juteux des joueurs mis à sa disposition. Est-ce cela, ou le souvenir de ce 3-5-2 souvent archi-dominant et bien huilé quel que soit l’adversaire qui a convaincu les patrons du club le plus puissant de Belgique de le rapatrier sans même en aviser leurs homologues gantois? Les souvenirs datent déjà de 2019, et décider de son avenir avec les yeux dans les rétroviseurs n’est pas toujours un gage de réussite.