Survivre
Le Zenit Saint-Pétersbourg, l’adversaire demain du Standard en Coupe UEFA, est en pleine lutte pour le titre russe.
La lutte pour le titre russe s’est circonscrite à un duel entre le Zenit Saint-Petersbourg et le Spartak Moscou. L’équipe de Nicolas Lombaerts (22 ans) a-t-elle vraiment une chance ? Moscou est omnipotente et mettra tout en £uvre pour qu’un de ses clubs soit sacré, raconte-t-on. Le Hollandais Dick Advocaat (59 ans), coach du Zenit, opine : » Mon prédécesseur, Vlastimil Petrzela, a déclaré, à son départ : – Jamais un club de Saint-Pétersbourg ne sera champion. Il a passé trois ans ici. Et moi, après quinze mois, je dois reconnaître qu’il avait raison. Moscou compte plusieurs grands clubs. Ils sont omnipotents. Le président du CSKA reconnaît publiquement avoir donné des primes d’encouragement aux adversaires de ses rivaux. Notre président, Sergei Fursenko, ne le fait pas. Il dépend de Gazprom, qui ne veut pas être associé à de telles pratiques « .
Advocaat est le seul entraîneur étranger en D1 russe. Des 16 coaches qui ont entamé la saison, six ont déjà été renvoyés.
Si vous deviez décrire vos quinze mois au Zenit ?
Dick Advocaat : Ils ont été très difficiles mais c’est une des raisons pour lesquelles le club m’a embauché. Il veut rendre son élan à l’équipe en quelques années. Il faut reconstruire une équipe, aménager un nouveau stade, mettre en place un nouveau complexe d’entraînement. Le stade sera prêt début 2009. On n’attend plus qu’un permis pour les infrastructures d’entraînement et l’équipe est déjà bonne. Elle n’émarge pas à l’élite européenne mais elle y parviendra. A mon arrivée, le Zenit était dixième, nous avons terminé quatrièmes. Le tri doit être progressif. Certains joueurs de la région doivent quitter le club. Ils n’ont pas le niveau mais je ne peux m’en défaire en une fois. Les supporters ont eu mal à prendre congé de joueurs chevronnés qui ont bonne réputation mais cela ne me pose pas problème.
Comment réagit le président ?
Sergei Fursenko est un homme fantastique. Il est originaire de cette ville, adore son club et met tout en £uvre pour que le Zenit devienne grand. Il nous soutient sans réticence mais il lui est plus difficile d’opérer un tri car il est au centre de tous les regards. Donc, nous procédons par petites touches. Nous ne devons de toute façon pas gaspiller nos footballeurs russes car le nouveau règlement prévoit qu’il en faut un de plus chaque saison. Le minimum est de quatre cette saison, il sera de cinq l’année prochaine.
Guus Hiddink a laissé entendre que la mentalité russe posait problème ?
Chez les Russes, la notion de grand joueur est plus souple. Nous estimons qu’ils doivent également vivre en véritable sportifs. Certains, et pas seulement les Russes, n’y arrivent pas. Il faut sans cesse insister là-dessus. On fonctionne mieux dans une équipe quand on vit de manière professionnelle. La communication constitue un problème, pas seulement entre moi et les joueurs mais aussi au sein du groupe. Nous avons des Russes, des Tchèques, des Slovaques, des Coréens, un Turc, un Argentin, un Néerlandais, un Belge, un Ukrainien, un Ouzbek, un Croate, un Norvégien. Faire connaissance prend du temps. J’ai quelque peu négligé le problème linguistique. Pour s’adresser directement à quelqu’un, il faut pouvoir parler sa langue.
Bientôt des joueurs du top
Comment communiquez-vous ?
Avec les mains et les pieds mais surtout en anglais et avec un interprète. Cependant, on ne traduit pas l’émotion alors que c’est précisément l’aspect essentiel, surtout quand on veut dire quelque chose avec cynisme, par exemple.
C’est précisément votre force…
Récemment, j’ai conclu la théorie d’un match par une phrase anglaise pleine de chaleur, style : – Let’s go for it, play with your heart, enjoy the game. Mais l’interprète n’était pas attentif et m’a demandé ce que je disais. Il m’a coupé tous mes effets. Cependant, avec le temps, les joueurs voient à ma tête si je suis content ou pas.
N’avez-vous pas envisagé d’apprendre le russe ?
Non. Si j’avais été plus jeune et que j’avais pensé rester ici quatre ou cinq ans, je m’y serais mis mais ça n’a jamais été à l’ordre du jour.
Quel est votre bilan jusqu’à présent ?
L’équipe progresse sans arrêt mais comme je ne veux pas opérer de changement radical, le processus est un peu plus long. D’ici deux ou trois ans, le Zenit aura une excellente équipe, j’en suis convaincu, s’il parvient à enrôler les hommes qu’il faut.
Les vrais grands joueurs viennent-ils en Russie ?
Pas encore mais le championnat est très relevé. Deux phalanges russes sont qualifiées pour la Ligue des Champions, comme il y a un an. Ce n’est pas si évident. Nous sommes en Coupe UEFA. Quand les nouveaux stades seront prêts, compte tenu des salaires qu’ils peuvent déjà gagner en Russie, les grands viendront. Le CSKA Moscou aligne déjà deux internationaux brésiliens en attaque, Vagner Love et Jo.
Chauffeur et garde du corps
Qu’avez-vous vu de la ville ?
Les canaux et les belles églises, pas encore le musée de l’Hermitage mais plusieurs cathédrales. Saint-Pétersbourg est une ville magnifique, dotée de bâtiments superbes. Je ne suis malheureusement pas très porté sur la culture mais je n’ai pas les yeux en poche non plus.
Comment s’organisent vos journées ?
Tôt le matin, un chauffeur me conduit au terrain d’entraînement. Après la séance, nous mangeons et vers trois ou quatre heures, je suis de retour à l’hôtel. Normalement, je visionne toujours les vidéos et les DVD au complexe d’entraînement mais pour le moment, je regarde beaucoup la TV à l’hôtel. Je peux tout capter : Sky, le football néerlandais, les chaînes sportives russes. Je lis, j’écoute de la musique et je me tiens au courant de tout via Internet.
Vous ne regardez pas les journaux russes ?
Cela me simplifie la vie. L’interprète ne me parle que des nouvelles intéressantes. Je n’ai jamais rien dit à une chaîne russe. Je donne des conférences de presse mais rien de plus.
Devons-nous avoir pitié de vous ? Seul dans une chambre d’hôtel…
Non, je m’y plais beaucoup. J’ai une superbe chambre, dotée de tout le confort qu’on peut rêver. Je voyage beaucoup. En plus, nous partons la veille de chaque match : notre voyage le plus court nous mène à Moscou. La capitale est à une heure et demie d’avion d’ici.
Vous avez une voiture avec chauffeur. Quelqu’un veille-t-il à votre sécurité ?
J’ai un garde du corps. Est-ce nécessaire ? Le président a plaisanté à ce sujet. Je lui avais dit que je n’avais pas besoin de garde du corps mais il a répondu que si. Pour surveiller la voiture.
Au bout d’un an et demi, avez-vous placé votre marque sur le Zenit ?
A mes débuts, on ne parlait ni ne riait sur le terrain d’entraînement. Les gens trouvaient ça normal. Nous avons, mon adjoint hollandais et moi, tout mis en £uvre pour changer ça mais les joueurs n’avaient jamais procédé autrement. Nous avons vraiment dû tout leur dire, leur expliquer. C’était pénible. Maintenant, on s’amuse à l’entraînement.
par leo driessen (ESM) – photo: afp
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