
LABron-mania
Après cinq années dans l’ombre, aucune franchise de NBA et aucune ville n’ont attiré autant l’attention que les Lakers de Los Angeles, cet été. Elles le doivent à la super-vedette LeBron James. Sport/Foot Magazine a rendu visite au King.
On ne peut pas la louper, lorsqu’on pénètre dans L.A. Live, l’ entertainment district des environs du Staples Center, l’antre où les Lakers disputent leurs matches à domicile : une gigantesque peinture murale de LeBron James, habillé dans les couleurs jaune et mauve des Lakers, avec des écouteurs de Beats sur les oreilles, et avec comme légende : » The game will never sound the same » – » Le jeu ne résonnera plus jamais de la même façon. »
C’est l’une des nombreux panneaux publicitaires de LeBron James. Il y en a aussi quelques-uns de Nike, au centre de Los Angeles. Avec, là aussi, quelques slogans adaptés, comme » It’s only a crazy dream until you do it » – » C’est un rêve fou jusqu’à ce que tu le réalises. »
Le slogan fait référence aux LA Lakers, la franchise mythique de la ville, qui n’a même pas réussi à atteindre les play-offs ces cinq dernières années. Lorsque James a quitté l’été dernier ‘ses’ Cavaliers de la ville un peu grise de Cleveland pour rejoindre la métropole ensoleillée de LA, les attentes étaient énormes.
Certes relativisées par le King lui-même et par Magic Johnson, l’icône des Lakers et l’actuel manager sportif. Car aucune autre vedette n’a accompagné James en Californie. L’effectif a été complété par des jeunes talentueux et des vétérans de deuxième zone.
Selon Johnson et James, les Lakers ne deviendont réellement performants qu’après l’été 2019, lorsqu’ils seront parvenus à attirer l’un ou l’autre gros poisson supplémentaire, afin d’aider James à conquérir un quatrième titre NBA, avec un troisième club (après Miami et Cleveland).
The place to be
L’étoile la plus lumineuse de la galaxie NBA brille au-dessus des célèbres LA Lakers et du plus grand marché des médias, du divertissement et de l’économie des États-Unis. Cela provoque non seulement beaucoup d’attente sur le plan sportif, mais aussi beaucoup d’attention.
Surtout si cette étoile développe également un véritable empire en dehors du basket avec ses entreprises SpringHill Entertainment Company et Uninterrupted. Et pour donner de l’éclat à tout cela, Tinseltown est the place to be.
Toute cette attention attire également beaucoup plus de touristes/amateurs de basket qui génèrent à leur tour des dollars. Beaucoup de dollars. Selon une enquête de Black Enterprise, l’impact économique de James sur Los Angeles, calculé sur cinq ans, atteindrait 345 millions d’euros et créerait 3.000 emplois supplémentaires. Même si l’on ne prend que la moitié, ce chiffre dépasse le contrat de quatre ans de James, qui est de 134 millions d’euros.
C’est donc du win-win. Y compris pour le secteur horeca de L.A. Live, dont les établissements sont déjà pris d’assaut deux ou trois heures avant le match. Nous avons pu le constater avant la rencontre contre les Minnesota Timberwolves, dont le coup d’envoi était fixé à 19h30.
Pourtant, les Lakers n’attirent pas plus de fans : comme au cours des trois dernières années, le taux d’occupation de la salle frôle cette saison les 100 % : 18.997 spectateurs en moyenne. Les tickets se vendent cependant plus cher au marché officiel (de seconde main) : plus 50 %, de la main à la main.
Un Belge, avec qui nous discutons, a payé 143 euros pour son siège, situé à la rangée 13 de l’anneau supérieur. » C’est bon marché « , car pour le duel face à Toronto, une équipe de pointe, il avait encore payé 180 euros une semaine plus tôt. Les prix sont même plus élevés que chez le champion NBA, Golden State. Le Staples Center est, certes, un peu plus moderne que l’Oracle Arena des Warriors.
Engouement médiatique
Il y a aussi beaucoup plus de journalistes. Pour Brian Windhorst, qui suivait LeBron James à la trace à Cleveland, la ville ensoleillée de LA est devenue un nouveau » home away from home « , à Omaha. Son collègue d’ESPN Dave McMenamin a même déménagé de Cleveland vers la côte Ouest.
Et, dans son sillage, une meute de journalistes, qui ont plus l’habitude de couvrir La-La Land. Aucune autre équipe de NBA ne voit cette saison autant de ses matches diffusés dans tous les Etats-Unis que les Lakers : 43, trois de plus que les Warriors.
» Pour le premier match à domicile de LeBron, contre Houston, 250 collègues avaient été accrédités. C’est comme pour un match des Finals « , dit McMenamin. » Un match ‘normal’ de saison régulière, ici, peut être comparé à un duel de play-off à Cleveland. »
Après avoir jeté un coup d’oeil sur la liste des journalistes accrédités, nous constatons que l’on atteint le chiffre de 100 pour ce match contre Minnesota. Soit le double du nombre de collègues accrédités lors de notre visite chez les Warriors, quelques jours plus tôt.
Sur le chemin de notre siège de presse, en haut du Staples Center (du moins pour les médias étrangers), nous croisons quelques joueurs des Lakers, habillés de vêtements ‘à la mode’, qui se dirigent vers le vestiaire. Et un Magic Johnson tiré à quatre épingles. Il marche seul, et nous tentons donc notre chance.
Une question à propos du coach Luke Walton, qu’il aurait mis sous pression après la lourde défaite contre Toronto, selon certains articles de presse ? Non, cela semble trop délicat pour une première prise de contact. Nous lui demandons donc, après une brève présentation, ce que lui suggère la date du 1er juillet de l’an passé, le jour où LeBron James a pu discuter pour la première fois avec un nouveau club.
Est-il exact que ce jour-là, à 20 heures, soit une heure avant l’ouverture du marché pour les free agents, Magic a garé sa voiture devant la maison de LeBron James à LA ?
Smartphone en main
» Yes sir, j’ai attendu une heure, j’ai regardé ma montre et j’ai sonné à 21h01. Mon principal souci : que j’aurais dû me rendre aux toilettes avant cela, car je ne pouvais pas parler à LeBron plus tôt ( sous peine d’une lourde amende, ndlr). » Magic nous a alors gratifié de son légendaire sourire pepsodent et a poursuivi son chemin.
Un quart d’heure plus tard, 1h45 avant le coup d’envoi, le coach Luke Walton convie la presse pour une discussion à l’entrée du vestiaire : sa traditionnelle conférence de presse. Entouré par une vingtaine de journalistes et assailli de questions à propos de sa position.
LeBron James, avec les écouteurs et un bandana sur la tête, tapote sur son smartphone dans le vestiaire. Il arrête à 18h25, lorsqu’il est le dernier à commencer son échauffement, juste devant nous. Il entame ensuite une séance de tirs, qui suscite étonnamment peu d’intérêt.
20 minutes plus tard, LBJ retourne au vestiaire, toujours avec le smartphone à la main. Il remet son bandana, retire ses chaussures pour placer du tape autour de ses chevilles, et enfile une nouvelle paire de chaussures. La ‘ LeBrons 16 I Promise‘, lisons-nous sur Twitter, car ce choix-là est lui aussi abondamment commenté.
Dans les couloirs à l’extérieur de la salle, les fans des Lakers commencent à affluer, même si beaucoup ne rejoindront leur siège que juste avant, et parfois même juste après le tip-off. » Fashionably late : c’est typique pour ce public « , dit l’agent de sécurité Patrick.
» Comme leur regard critique : lorsque les Lakers sont menés, la salle est parfois très silencieuse. Ce n’est qu’en cas de victoire que le Staples Center s’enflamme. » Etonnant : sur les nombreux maillots jaune et mauve portés par les supporters, on retrouve déjà souvent le nom de ‘James’ floqué dans le dos, mais aussi toujours celui de (Kobe) ‘ Bryant‘, qui était le chou-chou des sympathisants des Lakers jusqu’en avril 2016.
» Kobe est encore très populaire « , raconte Patrick. » Lors du seul match auquel il a assisté cette saison, certains supporters ont scandé ‘Ko-be ! Ko-be ! ‘ alors que l’équipe était menée. Pour s’accaparer les faveurs de tous ces fans de Bryant, LeBron devra au moins remporter un titre. »
Des Lakers irréguliers
Lors de la présentation des joueurs, c’est toutefois le King qui est le plus acclamé. Une voix basse de bariton souhaite la bienvenue aux spectateurs au » Staples Center, the Sports & Entertainment Center of the World. » Des images sont alors projetées sur un grand écran blanc et des rayons lasers illuminent la salle.
Dans les rayons lumineux, James se branche aussi sur Twitter, lorsqu’il apparaît sur le parquet avec un bandeau noir sur la tête. Et le compte Twitter officiel des Lakers lance le hashtag #HeadbandBronishappening. Il faut remonter quatre ans en arrière, lorsque LeBron jouait encore à Miami, pour trouver trace d’un James jouant avec un front (dégarni) couvert.
Même si, plus tôt dans la semaine, lors d’un entraînement, il avait déjà porté un bandeau blanc. Et l’avait posté sur Instagram, avec #headbandthoughts comme légende. Les Lakers sont encore irréguliers et James demande de la patience. Alors que la saison vient à peine de commencer depuis trois semaines. Car, comme nous l’a confié le journaliste d’ESPN Dave McMenamin avant le match :
» Même si LeBron prône la patience lors de ses interviews, c’est sa propre impatience qui constitue la principale difficulté. Cela ne changera pas du jour au lendemain chez les Lakers. Mais il y travaille : il a lu un livre qui explique comment d’anciens présidents américains se sont comportés en leaders durant les périodes de turbulence. »
James porte son équipe au commandement, avec un dunk impressionnant. Un Chasing History apparaît sur l’écran géant, qui compare le nombre de points qu’il a inscrit durant sa carrière, avec ceux inscrits par Michael Jordan, qu’il dépassera probablement en janvier. Ensuite, au cours d’un match serré, les Lakergirls volent également le show durant les temps morts.
Tout comme les vedettes d’Hollywood, lorsqu’elles apparaissent sur l’écran : entre autres Will Ferrell, Denzel Washington et, en vieil habitué, au premier rang, Jack Nicholson, qui est le plus acclamé. Des applaudissements nourris surviennent également lorsque les Lakers s’imposent 114-110, sous la direction de LeBron James, qui rate de peu un tripledouble (24 points, 10 rebonds, 9 assists). Pas mal…
Chosen1
Directement après le match, les journalistes se pressent à l’entrée du vestiaire des Lakers, pour être les premiers à se précipiter vers le casier de LeBron James. Ou plutôt : les deux casiers, car il est le seul joueur des Lakers à en posséder deux. Cela en dit long sur la hiérarchie.
Avec les pieds dans un seau de glace, LBJ analyse le match, pendant que les journalistes se bousculent pour chaque centimètre. Derrière lui, des équipiers de James se déshabillent, seuls dans leur coin, et ont du mal à se frayer un chemin vers la douche.
» C’est comme avec les Beatles « , rigole Kyle Kuzma, qui ne s’adresse à la presse avec ses équipiers qu’après les déclarations du King. James se rend ensuite à la douche en sandales. Pour, cinq minutes plus tard, s’asseoir sur une chaise, le dos tourné, et se sécher, en chantant à tue-tête les morceaux de rap diffusés par sa beatbox.
Il a bien fait de devenir basketteur : le monde de la chanson n’a pas perdu un grand artiste. A côté de lui : une boîte contenant un repas adapté. Car, cela aussi, caractérise James : pour lutter contre les effets du temps qui passe, il traite son corps de 34 ans de façon hyper-professionnelle.
Sur le dos de ce corps parfait, on peut toujours apercevoir le grand tatouage CHOSEN1, le surnom qu’il avait reçu lorsqu’il avait débuté en NBA en 2003, à 19 ans. 15 ans plus tard, la LeBron-mania a pris beaucoup plus d’ampleur. Ou, comme on dit aujourd’hui à Los Angeles : LABron-mania.
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