» JE VOUDRAIS VOIR QUEL EST LE RÉEL PROJET DE MOUSCRON « 

Débarqué dans le projet flou du Canonnier le 31 août dernier, David Hubert a été l’un des artisans majeurs d’un maintien qui semblait devenu improbable. Rencontre avec le sheriff du jeu mouscronnois.

Les visages sont à nouveau sereins sur le parking du Canonnier, où les hommes de Glen De Boeck débarquent au compte-gouttes. Même le soleil est de la partie pour accompagner l’humeur radieuse d’un club qui vient de rouvrir les yeux après avoir vu la mort de près pour la deuxième saison consécutive. Contre Anderlecht, dans ce qui restera comme LE match du maintien, David Hubert a marqué.  » Mon deuxième but de la saison, c’est assez exceptionnel pour moi « , affirme dans un franc sourire le milieu de terrain des Hurlus, heureux d’avoir relevé un défi qui sentait méchamment la mission impossible quelques semaines plus tôt.

Un repreneur qui tarde à arriver, une équipe qui n’existe pas encore : tu n’as pas eu des a priorien signant à Mouscron l’été dernier ?

DAVIDHUBERT : J’avais beaucoup d’appréhension en arrivant, je ne vais pas le cacher. Mouscron était déjà venu plusieurs fois à la charge pendant le mercato, mais il n’y avait pas de projet très clair au niveau de la reprise du club. Je voyais qu’ils étaient douze à l’entraînement, puis que six joueurs débarquaient en une fois, et on entendait des histoires qui disaient que tout était entre les mains d’agents. Tout ça a fait que je n’ai pas directement accepté.

D’autant plus que le début de saison n’était pas bon…

HUBERT : Les résultats n’étaient pas terribles. Mouscron commence avec un 2/18. Et là, je décide surtout de me lancer dans un projet personnel. Signer le 31 août dans un club dont tu reçois uniquement des échos négatifs de l’extérieur, c’était un vrai challenge. Arriver ici, c’était un peu jouer le tout pour le tout. Si on arrivait à se sauver, c’était un exploit extraordinaire. Parce que les gens pensaient que c’était déjà chose faite : il fallait juste voir qui allait terminer quinzième, parce que le dernier était tout désigné.

Ce sont aussi les qualités du groupe qui te convainquent de signer ?

HUBERT : J’ai regardé deux ou trois de leurs matches, et j’ai vu très vite qu’il y avait des qualités techniques, du talent. Mais je regardais surtout pour voir si mon style de jeu allait convenir au groupe, ce que je pourrais lui apporter. J’ai compris rapidement qu’il manquait quelqu’un entre les lignes pour libérer des joueurs plus créatifs comme JulianMichelou FrançoisMarquet, tout en gardant une organisation et une discipline de jeu. Le milieu de terrain, c’est le coeur de chaque équipe de foot.

Ce rôle de milieu défensif  » organisateur « , de  » joueur tactique  » même, on a parfois tendance à le négliger dans le foot actuel, où on veut des 6 à la Pirlo ?

HUBERT : Chacun a sa propre vision du football mais moi, je pense que cette position est le ciment de ton équipe. De là, on voit tout et on ressent tout. Donc, il faut organiser ce tout. L’important, à cette position, c’est d’avoir quelque chose dans la tête. D’avoir le sens de la tactique et de l’organisation, parce qu’il faut faire fonctionner l’équipe de la manière dont le coach veut la faire jouer.

 » À WESTERLO, JE ME CHERCHAIS UN PEU SUR LE TERRAIN  »

Glen De Boeck t’a demandé de jouer plus haut sur le terrain. Ça t’a surpris ?

HUBERT : Honnêtement, oui ! Parce qu’il n’y avait, entre guillemets, pas de raison de me repositionner, puisque j’ai toujours démontré que je pouvais amener beaucoup à l’équipe dans cette position. Mais le coach m’a dit qu’il pensait qu’à ce nouveau poste, je pouvais apporter tout autant. Alors, très vite, j’ai essayé de réfléchir comme lui, d’adopter sa manière de penser.

Après tant d’années au même poste, ça n’a pas été difficile ?

HUBERT : À Westerlo, je me cherchais un peu sur le terrain. Et je crois que c’est tout à fait normal, après avoir joué pendant près de dix ans devant la défense avec pour consigne de ne pas passer la ligne médiane. Mais j’arrive à m’épanouir de plus en plus à cette position, et je pense que les événements ont démontré que l’entraîneur avait raison.

Parmi les équipes qui étaient impliquées dans la lutte pour le maintien, Mouscron pratiquait sans doute le football le plus élaboré.

HUBERT : C’est vrai que quand on voit les équipes de fin, et même de milieu de tableau, je pense qu’on a une des équipes qui jouent le plus beau football. Avec Louvain, qui a un très bon quatuor offensif. Notre style est atypique pour jouer les derniers rôles.

Peut-être parce que contrairement à vos concurrents, vous n’avez pas un attaquant qui garantit dix buts par saison ?

HUBERT : C’est vrai qu’on dit souvent que les équipes qui veulent se maintenir ont besoin d’un gardien qui prend des points et d’un attaquant qui met au moins dix buts. Et qu’avec ça, tu te sauves. C’est ce qu’on dit. Nous, on a démontré que sans avoir cet attaquant, on pouvait amener le danger de partout grâce à nos qualités footballistiques.

Mais ce style, est-ce qu’il ne vous a pas desservis par moments ? Maintenant, avec Mézague et Mohamed dans le milieu, c’est devenu un jeu plus classique…

HUBERT : Le jeu a un peu changé, mais on cherche toujours à jouer dans les intervalles, à trouver des solutions propres. L’entraîneur a trouvé un autre équilibre, parce que chaque coach a sa façon de voir les choses. Et je pense que les résultats ont montré que sa méthode fonctionnait. Mais ce n’est pas parce que tu changes deux noms que tu vas jouer un tout autre football. On cherche toujours à produire du jeu. Contre Anderlecht, on a été presser haut. C’était peut-être plus physique que ce qu’on faisait pendant la première partie de championnat, mais en récupérant haut, on est dangereux d’une autre manière.

Quand Anderlecht vient ici, vous pensez au match qu’ils ont perdu contre Waasland quinze jours plus tôt ?

HUBERT : Certainement ! Chaque joueur qui est un peu concerné par son job a vu ce match, sachant qu’il pouvait être conforme à celui qu’on allait jouer. Et très vite, on a vu qu’Anderlecht se cherchait, ne trouvait pas de solution, même quand Waasland a été réduit à dix. On savait qu’il y avait moyen.

 » MOUSCRON N’A RIEN À ENVIER À BEAUCOUP D’ÉQUIPES  »

Toi qui as joué les premiers rôles à l’époque de Genk, cette suffisance du favori qui se déplace chez un candidat au maintien, tu l’as déjà ressentie ?

HUBERT : À Genk, on avait commencé le championnat comme une fusée. On voulait gagner tous les matches, même à Saint-Trond ou à Westerlo. Un championnat, c’est contre ces équipes qu’on le gagne. Ce n’est pas à moi d’analyser Anderlecht, mais je sais que c’est une question de mentalité et de qualité. Mais la mentalité prime toujours, parce que si tu ne montres pas au minimum la même envie que l’adversaire, tu ne gagnes jamais. Après, il y a les qualités qui sont mises en action dans un plan de match. À Anderlecht, par exemple, ils espèrent trop souvent que des actions individuelles puissent décider des matches. Et ce n’est pas toujours le cas. Alors, tu dois te reposer sur ta mentalité et sur tes automatismes.

Vous avez rarement été ridicules contre les équipes du haut du tableau. Il y en a une qui t’a particulièrement impressionné ?

HUBERT : Dans les matches que j’ai joués, honnêtement, je n’ai jamais eu l’impression qu’on était dominé. Même si on s’est sauvé à l’avant-dernière journée, on n’a rien à envier à beaucoup d’équipes. On a fait jeu égal contre tout le monde, voire été meilleur.

Peter Maes a même remplacé Kebano par Buyens en fin de match contre vous, alors que vous étiez réduits à neuf…

HUBERT : On est deux de moins et pourtant, l’entraîneur adverse… Je ne vais pas dire qu’il fait dans son froc, mais il a quand même peur ! Au vu du match, si on reste à onze, on gagne à tous les coups. Ou au moins, on n’est pas battu. Parce qu’à part NeeskensKebanoet LeonBailey, qui sont un danger constant quand ils reçoivent la balle, ils n’ont pas été dangereux. On sentait que ce genre d’équipe avait beaucoup de respect pour nous, pour notre style de jeu. Et quand le jeu est là, un jour ou l’autre, ça tourne en ta faveur. Si cette saison avait commencé six matches plus tôt, et pas seulement à la septième journée, on n’aurait jamais été dans cette situation.

La saison prochaine doit déjà commencer maintenant pour Mouscron ?

HUBERT : On savoure le maintien pour l’instant, mais c’est clair qu’il faut déjà commencer à réfléchir à l’année prochaine. C’est important de ne pas commencer la saison en retard, comme ça a été fait cette fois-ci, parce que ce retard initial nous a poursuivis pendant toute l’année.

Sept mois après ton arrivée, tu as l’impression que ce projet mouscronnois est un peu moins flou ?

HUBERT : C’était clair quand j’ai signé, on m’avait dit que c’était une saison de transition. Et ça s’est un peu ressenti à tous les étages du club. Au dernier mercato, on a eu six nouveaux joueurs, par exemple. Moi, je voudrais voir quel est le réel projet, comment il va être mis en place. C’est important pour moi de signer dans un club où il existe un projet dans lequel je peux me retrouver. Il y a énormément de bonnes intentions ici, contrairement à ce qu’on peut parfois lire dans les journaux, mais je veux voir comment elles vont être prises en mains. Et après, on verra bien. Si je peux me retrouver dans les ambitions d’un club comme Mouscron, pourquoi pas ?

PAR GUILLAUME GAUTIER – PHOTOS BELGAIMAGE

 » Signer le 31 août dans un club dont tu reçois uniquement des échos négatifs de l’extérieur, c’était un vrai challenge.  » DAVID HUBERT

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