Simone Biles, considérée comme la meilleure gymnaste de tous les temps, ne participera pas au concours général, épreuve maîtresse de la gymnastique.

Santé mentale dans le sport: « L’image du sportif est en train de changer »

Charly Pohu Journaliste

Dans le monde du sport, les pressions subies par les athlètes sont nombreuses. Vedettisation, demande de résultats, harcèlement verbal, psychologique, sexuel, effort constant ; ils sont nombreux à craquer, à l’image de la gymnaste américaine Simone Biles, qui a arrêté son parcours olympique pour préserver sa santé mentale et combattre « les démons dans (sa) tête ».

Elle a tout gagné. Quatre médailles d’or aux Jeux Olympiques de Rio, et de très nombreux titres de championne du monde et places sur le podium depuis 2013, toutes disciplines confondues. Simone Biles est considérée comme la plus grande gymnaste de tous les temps. Une pression qu’on peut imaginer énorme, et qui a sans doute poussée l’athlète de 24 ans à abandonner les Jeux Olympiques de Tokyo, pour préserver sa santé mentale.

Les pressions qui pèsent sur les athlètes sont multiples. Thierry Zintz, professeur en management du sport à l’UCLouvain, distingue d’abord deux catégories d’athlètes : les jeunes et les adultes. « Les enfants, adolescents et jeunes adultes, dont Simone Biles, qui est à la jonction de l’âge adulte, surtout ceux qui pratiquent des sports techniques comme la gymnastique, subissent énormément de pression à l’entraînement. »

Pour Thierry Zintz cette pression psychologique est encore plus forte pour les filles, car souvent les entraîneurs sont des hommes, et qui ont des attitudes machistes. La situation peut vite virer au harcèlement verbal, comme avec les entraîneurs de l’équipe de gymnastique britannique. Puis au sein des fédérations, une certaine omerta peut régner, et les athlètes peuvent éprouver des difficultés à assumer le problème, et en souffrent davantage. Pour Simone Biles s’ajoute ici le harcèlement sexuel qu’elle a dû subir du médecin de l’équipe des Etats-Unis, Larry Nasar (aujourd’hui inculpé).

« Aujourd’hui tout est dans l’instant, avec les réseaux sociaux tout va vite, on ne peut plus grader quelque chose discret « , explique Thierry Zintz. Le deuxième aspect de la pression que subissent les athlètes est social et médiatique. Les journaux américains donnaient Simone Biles vainqueure de toutes les finales. Sur les réseaux sociaux, les personnes peuvent également interpeller les athlètes, voire les harceler, ce qui rajoute du stress.

Les sportifs adultes sont un peu mieux équipés contre ces pressions, mais souffrent tout de même. A l’image de Tom Dumoulin, cycliste néerlandais, qui a subi un burn-out il y a quelques mois, et s’est complètement retiré du sport – jusqu’à revenir, aux JO, et finir deuxième au contre-la-montre. « Il a bien pu recharger ses batteries, c’est important », analyse Thierry Zintz.

Une pression qui pèse également sur les athlètes, et qui est beaucoup moins voyante, est la fin de carrière. « De l’état de vedette, ils tombent dans l’oubli et l’anonymat en l’espace de quelques mois », explique le spécialiste. Il est pour lui alors important de les accompagner dans cette étape.

En parler

Si aujourd’hui on en parle plus, et plus ouvertement, les problèmes psychologiques des sprotifs de haut niveau ont cependant toujours existé. « Mais en parler est important, car cela oblige le monde du sport à prendre en compte le problème », pense Thierry Zintz. Pour lui, il est important de changer de manière d’entraîner, et d’adopter une attitude plus respectueuse des athlètes, qui amènera tout aussi bien des résultats.

« L’image du sportif est en train de changer, les sportifs, comme tout le monde, ont des difficultés dans la vie, ont des sentiments, ils ne sont pas juste des êtres étrangers à toute forme de vulnérabilité », remarque le professeur.

Un large problème

Selon un rapport du Comité international olympique (2019), cité par AFP, les athlètes masculins de sports collectifs étaient jusqu’à 45 % atteints par l’anxiété et la dépression, et 5 % sujets au burn-out et à une consommation d’alcool problématique. Le risque pour les sportifs individuels serait plus élevé. Les athlètes féminines 10 à 25 % des athlètes femmes rencontrent des dépressions et des troubles de l’alimentation. Les facteurs à risque sont les blessures, la baisse de performance, le surentraînement et l’idée de perfectionnisme.

Dans le monde du football, une enquête de la Fédération internationale des associations de footballeurs professionnels (Fifpro) en 2020 a montré que 22 % des joueuses et 13 % des joueurs témoignaient de symptômes compatibles avec le diagnostic d’une dépression.

Le mental de Djokovic est la raison de sa longévité

Le célèbre tennisman serbe estime au contraire que « la pression est un privilège. Sans elle, il n’y a pas de sport professionnel ». Apprendre à la gérer fait pour lui partie des attributs d’un grand sportif.

« Sur et en-dehors du terrain, toutes les attentes… J’ai appris à développer un mécanisme pour gérer cela de manière à ce que ça ne me dérange plus, ça ne m’usera plus », explique-t-il à l’AFP. Le Djoker a été aperçu en pleine conversation avec l’équipe turque de volleyball (ndlr: il semble aimer se mélanger aux athlètes d’autres nations, comme lors de sa fameuse photo de son grand écart avec l’équipe féminine belge de gymnastique) que sa force et sa stabilité mentale sont des facteurs qui explique sa longévité sur le sommet du tennis mondial.

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