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La ponctualité ça s’apprend

Stefanie Van den Broeck Journaliste Knack

Les retardataires sont une source d’agacement pour leur entourage, mais aussi pour eux-mêmes. Heureusement, la solution est simple : planifier comme un pessimiste.

« En r’tard, en r’tard. J’ai rendez-vous que’que part. Je n’ai pas le temps de dire au revoir. Je suis en r’tard, en r’tard ! » Beaucoup de lecteurs se reconnaîtront dans le lapin blanc agité d' »Alice au Pays des Merveilles ». Si vous êtes vous-même un retardataire chronique, vous pouvez désormais terminer le roman de Lewis Caroll à l’aise. Du moins si vous l’avez emprunté à la bibliothèque de Halle. L’échevin en charge vient de supprimer les amendes. Il trouve que chicaner sur quelqu’un qui a un jour ou même une semaine de retard « ce n’est plus de notre époque ». Et surtout, il en a assez de tous ces centimes. Mais ne vous trompez pas : après deux semaines, c’est une facture de dix euros qui tombe dans la boîte aux lettres, ce qui leur apprendra à ces retardataires! Car admettez, si vous êtes du genre ponctuel, vous êtes agacé par les gens qui sont toujours en retard. Que ce soit à la bibliothèque, au restaurant ou au travail : chaque fois, ils réussissent à arriver à bout de souffle, en train de chercher des excuses valables. Alors que vous pensez : avancez simplement le réveil d’une demi-heure.

Cependant, on ne peut pas se montrer trop dur envers eux, estime Ron Helpman, un psychothérapeute de New York spécialisé en « retards chroniques ». L’homme y a même consacré un site d’auto-assistance: lateness.org. Helpman raconte sur Skype que certains de ses amis sont des retardataires chroniques. Comme il n’a pratiquement pas trouvé de littérature (scientifique) sur le sujet, il a décidé de s’y plonger. « Souvent, on pense que les retardataires ne tiennent pas compte des autres. Mais je ne vois presque jamais de gens qui veulent arriver en retard. Généralement, ils ne peuvent tout simplement pas faire autrement. » Ironiquement, Helpman pointe un groupe qui fait preuve de négligence dans la façon de gérer son temps : les professionnels de la santé, et surtout les psychothérapeutes. « Je vois souvent une forme d’arrogance, leurs clients peuvent déjà être contents d’avoir un rendez-vous. Ils peuvent bien attendre. »

Idéalistes versus pessimistes

Cependant, Helpman estime que la plupart des retardataires chroniques sont des idéalistes, même s’il ne parle pas d’idéalisme politique. « Ils s’attendent à ce que les circonstances soient toujours idéales : un train sans retard, pas une minute d’embouteillages sur la route, pas de problèmes de parking, pas de file d’attente au guichet… Ces gens préfèrent arriver exactement à l’heure, pour eux débarquer à l’avance est un échec alors que les personnes ponctuelles acceptent d’arriver trop tôt à destination. Ils réalisent que le monde autour d’eux (les transports en commun, la circulation, les autres) n’est pas réglé comme du papier à musique, et que leur planning est plus réaliste, souvent même pessimiste. Mais ils s’en contentent : s’ils sont trop tôt, ils peuvent préparer calmement leur travail ou boire un café. » Helpman décrit une autre différence importante sur son site : quand il demande aux retardataires chroniques combien de temps ils mettent à venir à sa pratique, ils ne tiennent compte que des transports concrets. Ils savent que le temps en train, en vélo ou en voiture prend vingt minutes alors que les personnes ponctuelles prennent tout en considération : la recherche d’une place de parking, la promenade entre la gare et le cabinet, les feux rouges, etc.

La bonne nouvelle, c’est que selon Helpman il y a parfaitement moyen de guérir ces retards chroniques. Sur son site, il publie une feuille de route pour devenir plus ponctuel. D’abord, il faut noter tout ce que vous devez faire avant de partir au travail. Pour chaque étape, il faut indiquer une estimation de temps à laquelle il ajoute une mise en garde : n’oubliez pas de penser aux temps d’attente ! Votre fille adolescente qui barricade la salle de bains, la vérification de vos e-mails aux toilettes, le café qui passe. Suivie d’une deuxième mise en garde : ces estimations sont-elles bien basées sur la réalité ? Ou sur votre image idéale (n’oubliez pas que les retardataires sont des idéalistes) ? Ensuite, vous devez intégrer des tampons : vous ne trouvez pas tout de suite vos clés, il y a du retard entre Bruxelles-Nord et Bruxelles-Midi, ou un accident sur l’E40 entre Alost et Ternat. Comptez ces tampons en plus, additionnés de cinq minutes pour être sûrs. Et finalement, tentez l’expérience : pendant une semaine, affrontez l’épreuve de votre vie. L’estimation de temps suffit-elle ? Ou devez-vous faire un sprint pour franchir les derniers mètres qui vous séparent du bureau ? En ce cas, retournez à la première étape. Et avancez votre réveil d’une demi-heure. Ou construisez une salle de bains en plus pour votre fille, c’est possible aussi.

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