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Frédérique Jacobs: « On arrivera à contrôler la propagation du virus » (entretien)

La professeure Frédérique Jacobs est infectiologue à l’Hôpital Erasme (ULB) et porte-parole fédérale pour la lutte contre le coronavirus. Elle plaide pour le port du masque obligatoire dans l’espace public.

Assiste-t-on à une vaguelette ou à l’amorce d’un tsunami ?

Depuis l’assouplissement des mesures en juin, nous observons une augmentation nette du nombre de personnes détectées positives. La majorité d’entre elles ne présentent que peu ou pas de symptômes car elles sont dans les tranches d’âges de 20 à 60 ans et en bonne santé. Pour l’instant, il y a peu d’hospitalisations et le nombre de décès est faible. Le problème est que ces personnes jeunes peuvent aisément contaminer des personnes plus fragiles qui, elles, vont présenter des formes sévères de l’infection. Il y a bel et bien un risque de deuxième vague. En l’absence de traitement antiviral efficace et de vaccin, il faut donc continuer à appliquer les gestes de protection : distance d’1,5 m lors de nos contacts en dehors de notre bulle sociale, port du masque si cette distance ne peut être respectée, désinfection des mains etc.

Des mesures mal comprise sont peu respectées. Mais il faut aussi un dépistage et un suivi performants

Ne pas se rendre dans les zones rouges et, si on y a été contraint pour des raisons impérieuses, se mettre en quarantaine. Si on voyage en zone orange, on veillera à respecter particulièrement les mesures de protection et surtout à ne pas adopter de comportements à risque. Et bien sûr, en cas de symptômes, on contactera son médecin qui décidera si un frottis est nécessaire ; dans l’attente des résultats, on se mettra en isolement. Si l’on applique tous ces gestes, on arrivera à contrôler la propagation du virus.

Quelle explication à cette reprise ?

Suite aux mesures très contraignantes prises lors de la premières vague, on a pu contrôler l’infection avec une diminution – plus rapide que prévu, même – des nouveaux cas, des hospitalisations et des décès. Les mesures ont pu être allégées et on a tous eu envie de revoir la famille, les amis, de partir en voyage. Les mesures de protection ont été un peu trop relâchées car les gens avaient l’impression que le virus avait disparu. Ce n’est pas le cas : il est resté à bas bruit. Il a suffi que l’on reprenne des contacts plus fréquents pour qu’il refasse surface.

Comment agir ?

Il faut bien expliquer les raisons de toutes ces mesures : des mesures mal comprise sont peu respectées. Mais il faut aussi un dépistage et un suivi performants, pour pouvoir isoler les personnes infectées et éviter la transmission. La procédure pour réaliser les frottis nasopharyngés vient d’être simplifiée : depuis le 14 août, ceux qui reviennent des zones rouges et les personnes en contact étroit avec un porteur du virus peuvent se rendre directement dans un centre de tri ou dans certains laboratoires afin de réaliser un test PCR, en se munissant d’un code transmis par sms. Ils ne devront donc plus s’adresser d’abord à leur généraliste mais seront par contre priés de le faire en cas de résultat positif ou de développement de symptômes.

La mesure généralisée du port du masque est mal accueillie à Bruxelles…

S’il n’y a effectivement aucune raison scientifique de porter un masque lorsque l’on est seul dans la rue, cette situation peut changer rapidement : en vous promenant, vous pouvez passer dans une zone où se trouvent de nombreuses personnes, rester bloqué dans un attroupement, vous retrouver quelques minutes plus tard dans une rue déserte pour finir dans la file du supermarché. Il est donc complexe d’expliquer les endroits où le masque est indispensable ou pas. La règle plus simple, mais surtout plus compréhensible pour tous, est de rendre le masque obligatoire dès que l’on est dans l’espace public.

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