« Ce n’est pas l’heure d’été, mais notre négligence quotidienne qui tue notre biorythme »

Manifestement, un groupe de députés européens souhaitent supprimer l’heure d’été. J’ai rarement lu autant de fadaises sur les raisons de la supprimer. Les déclarations de nos députés européens sont pleines de raisonnements spécieux et d’arguments sans aucune valeur.

Notre biorythme est-il fichu parce qu’on change les montres deux fois par an? Vraiment ? Soyons clairs. On massacre notre biorythme parce qu’on ne respecte pas notre sommeil et cela non deux fois par an, mais nuit après nuit, toute l’année. Oui, nous sommes responsables.

Le changement d’heure au printemps et à l’automne est comparable à un décalage d’horaire d’une heure. Seulement une heure. Entre-temps, des millions d’Européens voyagent partout dans le monde, parfois pour quelques jours, et ils résistent sans problème à un jetlag de 8 ou 10 heures. Si tous ceux qui prennent l’avion avaient autant de mal qu’avec l’heure d’été, on voyagerait beaucoup moins. Ou est-ce que je vois les choses trop simplement ?

Un humain n’est pas une machine. Il est capable de s’adapter et il le fait en permanence. Mais en se fixant sur un aspect, on peut faire une montagne d’un petit problème. Au point de ne plus voir d’autres causes. Je ne veux pas dire que le changement ne cause aucun problème, loin de là. Mais se coucher une heure plus tôt ou plus tard est très relatif.

Ce qui n’est pas relatif du tout, c’est le manque de sommeil chronique dont nous souffrons tous. Nous dormons beaucoup trop peu. Demandez aux spécialistes du sommeil. On se couche trop tard, on est brutalement réveillé par le réveil, on se lève en n’étant pas reposé. Ensuite, on vit une journée stressante où on lutte contre la fatigue, mais le soir on se couche à nouveau trop tard. Et ce cercle se répète. Le nombre de personnes à se reconnaître dans le schéma augmente systématiquement. En plus, on adopte un rythme jour-nuit de plus en plus capricieux.

Pourquoi? Parce que nous fixons de plus en plus nos petits écrans, et ce jusque tard dans la nuit, et que nous laissons la lumière bleue de ces objets agir sur notre centre de contrôle du rythme circadien et qu’ensuite on ne peut plus dormir.

Soit nous allons au cinéma et puis manger un morceau, ou boire une bière ou un café tard dans la soirée. Beaucoup de gens prétendent que cela n’a aucun effet sur eux, ils dormiraient comme des loirs, mais les enregistrements vidéo dans les laboratoires du sommeil démontrent qu’il y a tout de même des effets, tel qu’un sommeil moins profond et un réveil plus matinal, qu’ils arrivent à peine à se rendormir, etc.

Il y a plein d’autres facteurs qui perturbent notre sommeil. Tels que trop de lumière (bleue) dans la chambre à coucher, un smartphone qui sonne régulièrement, trop de sport juste avant de dormir, toutes des choses qu’il y a moyen d’éviter, mais nous sommes si occupés qu’on ne les voit pas (ou qu’on ne veut pas les voir).

Ce n’est pas l’heure d’été, mais notre négligence quotidienne qui tue notre biorythme

C’est cette négligence quotidienne qui tue notre biorythme. Jour après jour et toute l’année. Évidemment, ces deux changements d’heure au printemps et à l’automne ne font pas avancer les choses. Mais n’exagérons pas leur nuisance.

C’est justement ce que semblent faire nos parlementaires européens avec tant de conviction. Ils ne semblent pas perturbés par de grossières généralisations. Par exemple, en donnant l’impression que les perturbations de sommeil et de concentration et les dépressions qui en découlent souvent seraient dues aux changements d’heure deux fois par an. Réduire une problématique aussi complexe à cela, il fallait oser.

Il y a certainement de bons arguments pour supprimer l’heure d’été, et les arguments pour la conserver sont très probablement moins forts. Mais tenons-nous à des arguments sérieux. D’ailleurs, il y a des choses beaucoup plus sérieuses dont il faudrait s’inquiéter, telles que notre manque chronique de sommeil, et toute la misère qui en découle.

Personnellement, j’aime être dehors, toute la journée, et souvent la nuit aussi. Je profite intensément des longues soirées d’été dans mon jardin. Cette heure supplémentaire me manquera, mais ce n’est que de la nostalgie et je ne vais pas négliger mon sommeil, car cela n’en vaut certainement pas la peine.

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