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Alcool et sport : un duo possible ?

Un verre de vin en soirée, la veille d’un marathon, cela peut-il vraiment affecter les performances ? Récupère-t-on moins bien lorsque l’on succombe aux délices d’une bière trappiste en terrasse, après une longue randonnée cycliste ? Bref, comment se conjuguent alcool et prestations sportives ?

De nombreux sportifs amateurs ne jurent que par l’abstinence complète d’alcool au cours des semaines, voire des mois qui précèdent un événement sportif important, comme un marathon : pour eux, l’alcool altérerait les performances. « Aucune étude ne démontre qu’un ou deux verres pris la veille d’un marathon, d’une compétition cycliste ou d’un autre effort lourd ont un impact négatif sur les performances, que ce soit chez un amateur ou un professionnel », assure le Pr Peter Hespel, physiologiste de l’effort et directeur scientifique de la Bakala Academy, le centre de recherche en sciences sportives de la KUL. Le malentendu provient d’études scientifiques portant sur l’impact de la consommation d’alcool dans le cadre de l’athlétisme et des sports d’endurance, avec une quantité d’alcool s’élevant à cinq verres ou plus. Consommer régulièrement une telle quantité d’alcool a d’ailleurs un effet négatif sur la santé, même sans effort sportif.

Une petite goutte ?

Par contre, en déduire que la moindre goutte est nocive serait beaucoup trop réducteur. « Il y a cependant une condition importante à remplir pour que cela ne soit pas néfaste : si boire un verre altère votre sommeil, il vaut mieux vous en abstenir, car la fatigue altérera effectivement vos performances le jour suivant. Par contre, ceux qui dorment même mieux après avoir bu un petit verre peuvent le faire sans problème. De plus, celui qui a l’habitude de boire régulièrement, même en petites quantités, peut présenter des signes de sevrage au cours de ces semaines et se sentir donc moins bien. »

Auparavant, le même discours était tenu au sujet du café. Les marathoniens étaient censés s’abstenir d’en consommer pendant la semaine qui précédait la compétition, pour bénéficier d’un effet plus marqué de la caféine prise juste avant ou pendant l’effort. « C’était infernal pour les grands amateurs de café, et les sportifs voyaient même souvent leurs performances chuter pour cette raison, explique le Pr Hespel. Il en va de même pour l’alcool : celui qui se sent bien en prenant un verre de vin le soir ne doit pas s’en priver subitement le(s) soir(s) qui précède(nt) la compétition. » À l’inverse, il vaut mieux s’abstenir de toute consommation d’alcool juste avant la pratique sportive : « Il faut éviter d’avoir encore de l’alcool dans le sang en commençant l’effort. »

L’alcool après l’effort

Boire systématiquement trop d’alcool après une séance d’entraînement n’est pas seulement néfaste à la santé, surtout si vous vous entraînez souvent : cela peut altérer les performances au moment de la compétition, car la récupération est moins bonne entre les séances. S’entraîner par exemple trois ou quatre fois par semaine, c’est bien, mais la progression est à terme moins bonne si vous buvez trop entre les séances. Pour que celles-ci soient les plus efficaces possibles, les sportifs doivent se concentrer sur leur alimentation, la réhydratation et la récupération, tout en restant constamment raisonnables face à l’alcool. « Deux problèmes se posent au niveau de la récupération, explique Peter Hespel. Tout d’abord, l’alcool a un effet diurétique. Ensuite, vous aurez tendance à penser moins au rétablissement de vos réserves d’énergie. » Boire de l’alcool après l’effort fait en effet perdre du liquide, car cela fait uriner plus que ce qui a été bu. Pour bien se réhydrater, il faut compenser d’un facteur 1,5 la perte de poids. « La personne qui a, par exemple, perdu 2 kg après un marathon doit boire 2 X 1,5, soit 3 litres d’eau (riche en sodium) dans les six heures qui suivent l’effort ! » Une bonne eau réhydratante contient environ 1 gramme de sodium par litre, c’est-à-dire 20 fois plus que ce que l’on trouve dans la majorité des bouteilles d’eau ou dans l’eau du robinet. Ce type d’eau peut être préparé soi-même, par exemple en ajoutant une cuillère à café rase de sel dans deux litres d’eau. Les solutions de type ORS, vendues en pharmacie, peuvent également convenir. Une bonne boisson isotonique contient au moins 500 mg de sodium par litre.

Si vous optez pour l’alcool immédiatement après un effort intense au lieu d’une boisson salée, votre balance hydrique se rétablira beaucoup moins rapidement. Vous allez vous déshydrater encore plus, et vous devrez alors boire encore plus pour bien récupérer. « La déshydratation par l’alcool après le sport diminue le volume sanguin, votre coeur évacue donc moins de sang à chaque contraction, et vos muscles sont ainsi moins bien irrigués. D’une part, les déchets métaboliques sont moins bien éliminés et, d’autre part, les substrats nécessaires à la récupération musculaire sont apportés localement avec moins d’efficacité, précise Peter Hespel. C’est pendant les toutes premières heures qui suivent l’effort qu’un muscle récupère le mieux. Après trois heures, la capacité de récupération diminue de moitié. »

Et l’alimentation !

Les réserves énergétiques doivent donc également être rétablies immédiatement après l’effort par un apport en glucides et en protéines. Les laitages chocolatés et maigres vont dans ce sens : ils apportent du liquide, des glucides et des protéines de haute qualité réunis dans une même boisson. « Pendant le Tour de France, les coureurs peuvent profiter tranquillement d’un verre de vin. Mais ils le font toujours après s’être suffisamment réhydratés et avoir réparé leurs muscles. Les cyclotouristes font souvent l’inverse : ils s’arrêtent à une terrasse et consomment d’emblée une bière, et rien d’autre. » Les études montrent que cette consommation immédiate d’alcool inhibe la production de glycogène dans le muscle. « Cet effet néfaste a des répercussions sur la séance d’entraînement suivante, du moins si elle suit peu longtemps après. » Si vous ne pratiquez aucun effort intense pendant trois ou quatre jours (comme ceux qui ne font qu’une grande randonnée en vélo le dimanche), il est vrai qu’une récupération rapide n’est pas vraiment nécessaire. « Réparer vos muscles reste cependant important, même si cela se produit plus lentement, et une alimentation saine, avec un contenu varié en glucides et en protéines, y suffit. Chez le sportif amateur qui s’entraîne trois fois par semaine, les chopes de bière vidées après le sport ont peu d’impact négatif sur la séance suivante, pour autant que des glucides (pâtes, riz, pain…) soient consommés en suffisance. Il ne faut cependant pas exagérer sur les quantités », prévient Peter Hespel. Il n’est d’ailleurs pas toujours nécessaire de manger des pâtes tout de suite après un entraînement : vous pouvez laisser vos muscles un moment en légère carence, cela n’aura aucun impact pour la suite.

Un surcroît de motivation

ParaIl faut également tenir compte de l’aspect social que comportent les activités sportives. Les cyclotouristes qui se détendent à la terrasse d’une taverne en dégustant une bonne bière, les coureurs qui font la fête dans un café après une compétition… Voilà déjà des raisons importantes qui incitent les gens à poursuivre une pratique sportive. Et la motivation est bien le principal, au bout du compte.

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