Un membre des Proud Boys, groupe masculiniste et soutien de tous les combats de Donald Trump. © GETTY IMAGES

Pourquoi le terrorisme masculiniste est sous-estimé

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

La chercheuse Stephanie Lamy met en garde contre la violence des mouvements antiféministes, que les services antiterroristes ne prennent pas suffisamment en compte.

L’histoire dira le rôle qu’ont joué les mouvements masculinistes dans l’élection présidentielle américaine. Au-delà de cette séquence, l’idéologie qu’ils véhiculent a de plus en plus tendance à prendre une forme violente. Mais cette évolution n’est-elle pas minorée? C’est la conviction de la chercheuse, spécialiste des guerres de l’information, Stephanie Lamy dans son essai, fruit d’une étude fouillée, La Terreur masculiniste.

Mais, à côté du sexisme ou de la misogynie, qu’entend-on par masculinisme? Dans une perspective sécuritaire, l’autrice le définit comme «un ensemble d’offres idéologiques identitaires, construites, diffusées et conduites au sein de divers milieux de radicalisation […], qui prônent la violence sous toutes ses formes, afin de maintenir, voire renforcer, la domination des hommes sur les femmes et les minorités de genre». Les mouvances qui s’en inspirent ne sont pas seulement blanches, occidentales et d’extrême droite «car la haine des femmes est agnostique en termes de croyances et fédère des hommes au-delà des considérations partisanes», souligne Stephanie Lamy. Mais les plus connues le sont, à l’instar des mouvements Incel (Involuntary celibate) et MGTOW (Men Going Their Own Way). Et leur objectif stratégique est commun: «Normaliser les violences à l’égard des femmes.» Dans cette perspective, «l’exposition aux violences domestiques constitue l’un des premiers indicateurs de la propension au passage à l’acte idéologiquement motivé», rappelle la chercheuse, sur la foi des travaux de la journaliste britannique Joan Smith.

«La haine des femmes […] fédère des hommes au-delà des considérations partisanes.»

Le 23 mai 2014, Elliot Rodger, 22 ans, tuait six personnes à Isla Vista aux Etats-Unis, des assassinats motivés par sa haine des «filles qui ne sont pas attirées par [lui]». Le 21 mai 2024, un homme de 26 ans était arrêté par la police française, suspecté d’avoir voulu commettre un attentat lors du passage de la flamme olympique à Bordeaux… le 23 mai. Dans un message sur les réseaux sociaux, il revendiquait une filiation avec Elliot Rodger… Pour Stephanie Lamy, la menace terroriste masculiniste est sous-estimée. N’y est pas étranger, selon elle, le fait que les principaux responsables de l’antiterrorisme en France sont des hommes. Autre constat inquiétant: «Le backlash masculiniste (NDLR: après MeToo) […] a produit un véritable fossé idéologique, notamment dans les jeunes générations.» Le masculinisme est-il voué à se répandre encore?

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