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L’agriculture moissonne de plus en plus de données

La technologie offre à l’agriculture de nouveaux outils performants avec l’espoir de la rendre durable, écologique et plus rentable. Entre robots autonomes et champs connectés.

Dimanche matin, vent d’ouest léger et températures comprises entre 18 °C et 22°C. Après une ascension courte mais intense, un voisin cycliste s’arrête au sommet d’une côte et contemple le décor bucolique que lui offre la campagne wallonne. Plus tard, il dira qu’il est content d’avoir quitté la capitale, qu’ici, au moins, on respire et que c’est nettement plus calme. Mais le cycliste n’est pas très observateur. Les capteurs plantés dans le champ, le robot désherbeur et les bruissements du drone quelques mètres plus haut se sont dérobés à son regard (et son ouïe). Il récupérait son souffle.

L’image d’Epinal d’une campagne coupée de la modernité s’effondre. L’agriculture est toujours plus connectée, surveillée, conseillée par satellite et optimisée pour assurer rendements et durabilité. Une évolution sinuant entre enjeux climatiques, respect de la biodiversité et obligations nourricières. Quand la technologie rencontre l’agriculture.

Agriculture intelligente

3,4 millions d’euros. C’est le budget alloué en 2022 par le Plan de relance de la Wallonie au programme «Agriculture du futur» de Digital Wallonia, l’agence en charge du développement numérique de la Région. Ici, on envisage l’agriculture comme un écosystème connecté, où chaque exploitation est reliée par des outils numériques, récoltant et échangeant des données pour nourrir une série d’algorithmes et d’outils. C’est le smart farming, le mariage des technologies de l’information et de la communication et de l’ agriculture moderne. De cette union naissent des données très utiles.

Cette année, grâce à la technologie, 353 faons ont pu être sauvés dans des champs prêts à être fauchés.
Cette année, grâce à la technologie, 353 faons ont pu être sauvés dans des champs prêts à être fauchés. © getty images

Tout commence dans l’espace. Depuis les années 1990, la Commission européenne coordonne «Copernicus», programme d’observation de la Terre. Les satellites Sentinel scrutent le sol terrestre, l’examinent sous différentes longueurs d’onde. Six variantes sont envoyées dans l’espace, chacune avec un rôle particulier. Dans la famille de ces objets en orbite, le deuxième type nous intéresse: Sentinel 2. Un couple de satellites. Ils permettent un monitoring précis, proche du sol, et dans l’espace et dans le temps. Leurs images se renouvellent tous les cinq jours.

Depuis leur lancement, en 2015 et 2017, les satellites envoient des données essentielles pour obtenir une cartographie précise et évolutive des terres émergées. Grâce à ce monitoring, une agriculture de précision se développe: surveillance de la végétation, du cycle de l’eau, de l’évolution des cultures, état des rendements, gestion des terres et de l’irrigation. Ces données sont publiques et mises à disposition des agriculteurs. Avec Copernicus, on peut observer le recul du niveau d’un fleuve, cartographier les parcelles d’une exploitation ou encore constater les dégâts des incendies de l’été.

Des robots et des herbes

En Belgique, le Centre wallon de recherches agronomiques (CRA-W) a mis en place une série de projets pour utiliser ces données et assurer à la Région un outil de surveillance de sa surface agricole. La nouvelle Politique agricole commune (PAC) conduit les Etats membres de l’Union européenne vers une agriculture «intelligente» où le monitoring et la récolte de données sont essentielles.

C’est là tout l’esprit du smart farming : offrir aux professionnels, grâce aux objets connectés, des outils pour prévoir les rendements et les besoins d’une culture ou d’un élevage. On peut attacher des balises GPS à un troupeau pour le localiser, conduire des tracteurs connectés pour tracer des sillons parfaits, utiliser les données Copernicus pour estimer le taux d’azote d’une parcelle et protéger les sols, régler les épandages au centimètre près en fonction des variations de qualité des zones d’un même terrain.

Sur le marché se développe aussi une offre de robots autonomes capables d’effectuer des activités complexes, comme la traite des vaches. Ceux-ci devraient réduire le volume de tâches physiques pénibles. Le CRA-W étudie depuis trois ans l’utilisation des robots de désherbage manuel, leur utilité et potentiel en Wallonie. Les pesticides et herbicides sont de plus en plus remis en question et l’alternative, le désherbage mécanique, demande beaucoup de main-d’œuvre.

La robotisation pourrait être une solution viable à long terme, précise et économe. Reste à déterminer comment se déploiera la transition numérique du secteur agricole en Belgique.

Sauvons Bambi

Mais certaines tâches doivent encore être pilotées par une main humaine. Comme les drones de l’association Sauvons Bambi, à Eghezée: la nuit, ils embarquent une caméra thermique pour observer la présence d’animaux dans les cultures qui s’apprêtent à être fauchées. Des faons, des lièvres et des oiseaux nicheurs surtout. Les agriculteurs peuvent faire appel à leurs services gratuitement pour scanner une parcelle et déplacer ensuite les petits animaux hors de ses frontières. Et ça marche: déjà 353 faons sauvés cette année. Grâce à la technologie.

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