Marc van Rijsselberghe entouré de ses 'super-patates'. © Sarah Helena Rijpkema

La ‘super-patate’ parviendra-t-elle à sauver le monde de la malnutrition ?

Stagiaire Le Vif

Dans le nord des Pays-Bas est née la « super-patate ». Résistante au sel, cette pomme de terre dénichée par l’agriculteur Marc van Rijsselberghe pourrait sauver le monde… Ou presque.

Selon la FAO (organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), la salinisation des sols réduirait chaque année les superficies irriguées de 1 à 2% dans le monde. Un dixième d’entre elles serait déjà largement endommagé, parfois de manière irréversible. Un véritable fléau alimentaire lorsqu’on sait que ces terres représentent 40% de la production vivrière.

Quels remèdes contre la salinisation des sols ?

Ce phénomène s’explique par l’érosion des roches et des sols, qui se déversent dans les fleuves, servant ensuite à irriguer les cultures. L’eau, chargée en sel, s’infiltre alors sous les plantations. Le sel s’agglutine autour des racines qui se retrouvent dans l’incapacité d’absorber la moindre goutte d’eau. Les cultures sont alors vouées à l’échec.

De nombreux chercheurs ont planché sur d’éventuelles solutions, comme la mise en place de systèmes d’irrigation au compte-gouttes, l’installation de stations de pompages pour faciliter l’écoulement de l’eau dans le sol, ou encore l’étonnante méthode de la submersion, qui consiste comme son nom l’indique à… inonder volontairement ses terres. Seulement voilà, ces techniques sont coûteuses, bien trop pour certains qui n’ont alors d’autre choix que de laisser leurs terres à l’abandon.

L’île d’Hexel muée en laboratoire

Le chercheur Arjen de Vos, qui a épaulé Marc van Rijsselberghe dans sa conception de la « super patate », a décidé de contourner le problème. En octobre dernier, il confiait au Guardian: « on ne voit pas la salinisation comme un problème, on la voit comme une opportunité« . Marc van Rijsselberghe a ainsi mis ses mains expertes au service de la science. Sur une petite île marécageuse du nord des Pays-Bas, ce cinquantenaire qui cultive son amour de l’agriculture biologique depuis des années, a créé des parcelles de pommes de terre. A chaque parcelle, il a associé un degré de salinité différent. Et puis, surprise, une variété de pommes de terre a poussé dans une eau salée à hauteur de 20% : un niveau auquel on pensait toute pousse impossible. C’est ainsi que l’agriculteur aurait trouvé le fameux tubercule qui résiste au sel.

De nombreuses tentatives

Marc van Rijsselberghe n’est pas le premier à s’être lancé dans ce projet. En 2006, Eviatar Nevo, chercheur à l’Université de Haïfa en Israël, s’était intéressé à des champignons filamenteux poussant dans la Mer Morte, source d’eau saline. Il espérait pouvoir, grâce à l’étude de leurs gènes, rendre les céréales résistantes au sel.

Du côté du Bangladesh, une variété de riz répondant au nom un peu barbare de BRRI Dhan 47 avait été annoncée il y a quatre ans comme la seule « poussant dans des eaux modérément salées« .

En Europe, un chercheur allemand avait lui aussi planché sur les céréales du futur.

Avec sa pomme de terre aboutie, Marc van Rijsselberghe reste un pionnier. Il aurait même réussi le pari d’en faire « le plus savoureux » des tubercules, une affirmation basée sur des tests à l’aveugle. Il explique cela par sa forte concentration en sel. Pour lutter contre cette invasion, la patate produirait beaucoup plus de sucre qu’à son habitude, donnant ainsi toute sa saveur au produit. Ces bijoux de l’agriculture sont d’ores et déjà en vente dans plusieurs magasins aux Pays-Bas. Des graines ont aussi été envoyées pour un essai grandeur nature au Pakistan, pays où des milliers d’hectares seraient touchés par la salinisation.

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