Red Dead Redemption II serait un excellent médium éducatif en matière environnementale. © DR

Jeux vidéos: le bon, la brute et le truand… écolos

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Un cow-boy écolo ou un gamer truand qui apprendraient à aimer la nature sans mettre le nez dehors? Avec son étude sur le jeu vidéo western à succès Red Dead Redemption II, l’université d’Exeter, en Angleterre, bouscule les idées reçues.

Comme une balle de revolver qui frôlerait un esprit sceptique dans un geyser de poussière, l’étude publiée récemment par la British Ecological Society (Société britannique pour l’écologie) pulvérise toutes les idées reçues sur le jeu vidéo. Intitulée « La valeur éducative des écologies virtuelles de Red Dead Redemption II« , elle conclut que les gamers qui ont le plus joué à ce jeu western d’action-aventure (lancé par Rockstar en 2019) et à sa version populaire en ligne savent plus de choses sur la nature, les animaux et les phénomènes climatiques que les personnes du même âge qui n’ont jamais mis un pied dans ce gigantesque monde virtuel, à savoir le grand Ouest américain de la fin du XXIe siècle, un monde où l’on chasse, trappe, pêche, où l’on observe des oiseaux aux jumelles et où l’on photographie les animaux, entre un braquage de diligence, un duel au saloon ou un corps-à-corps sanglant à la machette.

Les joueurs ont développé une conscience écologique plus forte que les non-joueurs.

Cinq cent quatre-vingt-six personnes, hommes et femmes de cent nonante-deux pays, ont participé à l’étude. Dans un questionnaire en ligne, elles ont dû identifier correctement quinze animaux existant tant dans le jeu que dans la réalité. Des questions ouvertes complétaient ce quiz naturaliste. En moyenne, celles et ceux qui ont joué à Red Dead Redemption II ont correctement identifié dix animaux sur quinze (existant dans le jeu et dans la nature), soit des résultats trois fois supérieurs à ceux obtenus par les personnes n’ayant jamais approché ce jeu.

Tomber amoureux de la nature en jouant

Plus étonnant encore: les joueurs ont tissé un lien émotionnel avec l’environnement et ont développé une conscience écologique plus forte que les non-joueurs interrogés ce qui, pour les auteurs de l’étude, fait de ce jeu vidéo un excellent médium éducatif en matière environnementale. Ainsi, l’étude rapporte de nombreux témoignages, comme celui-ci: « J’étais occupé à chasser un bison, pour compléter un défi, mais j’ai utilisé la mauvaise arme et, au lieu de tuer l’animal proprement, le bison est tombé à terre et s’est mis à geindre de douleur. Je me suis senti tellement mal que j’ai rechargé la partie et que je n’ai plus chassé de la journée. »

Au-delà de l’aspect violent de ce jeu interdit aux moins de 18 ans, Red Dead Redemption II offre aussi un flirt énorme avec la nature, une véritable déclaration d’amour aux grands espaces américains. Les paysages, d’un réalisme saisissant, d’une beauté époustouflante, ont été créés à partir de données connues sur les parcs nationaux américains tels qu’ils étaient au moment où se déroule l’action. Conclusion d’un gamer: « C’est le seul jeu auquel j’ai joué lors duquel je préférais parfois poser la manette et observer le monde tourner tout seul autour de moi: un orage, le passage d’un troupeau de bisons, un lapin sursautant devant mon cheval… »

La nature (même virtuelle) nous fait du bien

On connaît depuis longtemps les effets positifs d’une balade en forêt sur la santé mentale et physique. Des chercheurs de l’université de Taïwan se sont demandé si ces bienfaits pouvaient être retrouvés chez des personnes qui, pour diverses raisons, ne peuvent pas s’offrir une randonnée et se rabattent sur la réalité virtuelle et ses environnements simulés. Conclusion: les scientifiques ont observé une baisse significative des émotions négatives chez les sujets évoluant dans des environnements naturels virtuels. Ainsi, l’épuisement, le sentiment de colère ou d’hostilité, l’énervement et les sentiments dépressifs diminuent-ils de façon considérable lorsque le sujet est immergé dans un environnement de nature virtuelle, grâce à des images à 360°. L’ énergie, elle, remonte, alors que la pression sanguine et le rythme cardiaque baissent. A l’inverse, dans un environnement urbain, l’estime de soi diminue et la dépression augmente. Les résultats de cette étude (« L’ effet de la forêt et des environnements urbains en réalité virtuelle sur les réponses physiologiques et psychologiques »), publiés en 2018 sur le site Web d’Elsevier, pourraient inspirer une nouvelle approche non médicamenteuse dans le traitement des états dépressifs.

Au-delà de son aspect violent, ce jeu vidéo à succès se veut, par son graphisme, une déclaration d'amour aux grands espaces et à la nature.
Au-delà de son aspect violent, ce jeu vidéo à succès se veut, par son graphisme, une déclaration d’amour aux grands espaces et à la nature.© DR

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