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Incendies, températures record… l’Arctique vers un point de non-retour?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Feux de forêt en Sibérie, rennes retrouvés morts de faim sur un archipel norvégien, vague de chaleur en Alaska, fonte rapide de glace au Groenland… Ces récents événements pourraient avoir des répercussions sur la hausse des températures dans le monde, selon les scientifiques.

Plusieurs régions de l’extrême nord de la planète ont connu des événements météorologiques extrêmes au cours des deux derniers mois. Ces zones, habituellement froides, ont connu des températures record, causées en grande partie par le changement climatique. Si l’on s’en tient à science basée sur l’absorption de la chaleur par l’atmosphère, « il n’y a aucune raison d’imaginer que l’Arctique va commencer à se refroidir à nouveau », déclare Brian Brettschneider, climatologue (University of Alaska Fairbanks), au Time. « L’air froid doit venir de quelque part, il n’apparaît pas comme par magie, et cela doit être pris en compte dans tout le bilan énergétique de la Terre. »

Changement permanent

En Alaska, 2,4 millions d’hectares ont été ravagés par des feux de forêt au mois de juillet. En Sibérie, plus de 7 millions d’hectares ont brûlé dans des incendies, provoqués par des orages secs et une chaleur « anormale » de 30 degrés Celsius. Les feux sont propagés par des vents forts, affectant les régions voisines. Alors que la température mondiale ne cesse de battre des records, le point de non-retour en Arctique n’a pas encore été atteint, mais on s’en rapproche dangereusement. Il n’y a pas encore eu de points de basculement irréversibles majeurs, mais on assiste à un changement permanent, confirment les experts.

Si le mois de juin 2019 a été le mois de juin le plus chaud enregistré à travers le monde, il en a été de même pour juillet. « Juillet a réécrit l’histoire du climat, avec des dizaines de records de températures au niveau local, national, ou mondial », commente le secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) Petteri Taalas. Des températures élevées couplées à des fontes de glace en Arctique, au Groenland et dans les glaciers européens qualifiés de spectaculaires. « Ce n’est pas de la science-fiction. C’est la réalité du changement climatique », ajoute-t-il, soulignant que la situation va « empirer ».

CO2, santé, suie : des conséquences diverses

De manière directe, la fumée dégagée par les feux de forêt représente un danger pour la santé de la population, notamment au niveau respiratoire et cardiaque. Car même si les incendies en Sibérie et en Alaska se sont produits dans des régions très isolées, de la fumée a fini par faire son chemin jusque dans des régions très peuplées de Russie.

Mais les incendies et l’augmentation des températures en Arctique ont également des conséquences aggravantes sur le climat. Le CO2 est davantage stocké dans l’atmosphère et dans les plantes, ce qui peut, à terme, accélérer le réchauffement de la planète. Il en va de même pour le méthane stocké dans le permafrost, qui pourrait être massivement libéré à mesure que ce dernier fond. De plus, les feux de forêt représentent une menace pour la calotte glaciaire, déjà atteinte par le réchauffement global. Lors des incendies, le dégagement de fumée libère de la suie. Cette dernière atterrit rend la glace plus foncée et, par conséquent, lui faire absorber plus d’énergie thermique et la fait fondre plus rapidement.

« L’effet des incendies sur le climat est très important », confirme Grigori Kouxine, expert de Greenpeace Russie. « C’est comparable aux rejets des grandes villes. Et cela renforce le problème des incendies: plus les incendies influent sur le climat, plus les conditions sont favorables à de nouveaux incendies dangereux ». Une sorte de cercle vicieux.

Combien de temps reste-t-il pour agir ? Personne ne le sait. Mais « ce qu’il y a de particulier avec l’Arctique, c’est que c’est vraiment un interrupteur marche-arrêt. Une fois la glace disparue, les choses vont changer brutalement, et c’est le processus que nous commençons à observer aujourd’hui », conclut un météorologue au Time.

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