L’électrification est en plein essor

La question de savoir quand nous roulerons tous à l’électricité est d’une brûlante actualité. La Belgique semble avoir clairement entamé la transition et plusieurs raisons le justifient. Le chemin à parcourir reste long et le contraste est important : si les entreprises sont déjà pleinement engagées dans l’électrification, les particuliers sont moins prompts à faire le pas.

De 47 nouvelles immatriculations en 2010 à 22 669 en 2021… Ces chiffres illustrent l’intérêt que les voitures 100 % électriques suscitent dans notre pays. Le cap des 50 000 voitures électriques dans le parc total a été franchi pour la première fois, l’an dernier. Un beau chiffre, même s’il ne représente que 0,9 % de toutes les voitures qui circulent en Belgique. La tendance est toutefois indéniable : de plus en plus de Belges optent pour des voitures entièrement ou partiellement électriques.

« Les immatriculations des premiers mois de cette année révèlent pour la première fois qu’un tiers des nouvelles voitures sont électrifiées », indique Gabriel Goffoy, directeur de la communication de la fédération automobile Febiac. Ce décompte ne porte toutefois pas seulement sur les voitures entièrement électriques, mais inclut les hybrides (à recharge automatique) et les hybrides plug-in. Compte tenu de ces véhicules, près de 5 % de l’ensemble du parc automobile belge est (partiellement) électrique.

Boost

Plusieurs facteurs expliquent le coup de fouet dont a bénéficié l’électrification dans notre pays, ces derniers mois. « Les mentalités ont changé depuis l’instauration des nouvelles règles fiscales pour les voitures de société du ministre fédéral Vincent Van Peteghem, à la fin de l’année dernière. L’horizon est désormais dégagé », se réjouit Bart Massin. En tant que vice-président d’EV Belgium (la fédération qui promeut la mobilité zéro émission) et CEO de Stroohm (une entreprise qui propose notamment des solutions de recharge), il peut se targuer d’un point de vue éclairé sur l’évolution du marché.

« Un deuxième phénomène se manifeste avec le conflit en Ukraine. Le coût du carburant augmente fortement, ce qui renforce l’intérêt pour l’électrification. Nous payons plus de 2 euros pour un litre de carburant à la pompe. Et le pétrole russe n’est pas encore entièrement sous embargo. Une nouvelle hausse des prix pourrait survenir si c’était le cas. De nombreuses entreprises ont ainsi le réflexe d’opter pour une flotte de véhicules électriques et de la recharger avec des panneaux solaires au bureau. Ce faisant, elles pourront maîtriser leurs coûts énergétiques dans les années à venir. C’est une incitation supplémentaire à accélérer la transition qui était déjà en cours ».

La voiture de société comme moteur

Les entreprises jouent un rôle clé dans l’électrification. « La voiture de société est présentée dans certains milieux politiques comme un pis-aller, mais sa popularité permet de verdir la flotte de manière beaucoup plus forte et rapide », affirme Gabriel Goffoy. Fait significatif, près de 86 % de toutes les voitures entièrement électriques nouvellement immatriculées (janvier-avril 2022) le sont au nom de sociétés ou de travailleurs indépendants. 14,3 % ont été achetés par des particuliers.

Des consommateurs soucieux de l’environnement

« Il importe que nous fassions également participer les particuliers. De nombreux automobilistes souhaitent aujourd’hui faire un choix écologique. Ils l’envisagent. Mais il faut alors se demander ce qu’il faut faire pour les aider à prendre effectivement cette décision. Cela peut notamment passer par des incitants supplémentaires de la part du gouvernement ou des alternatives à un achat traditionnel, comme un leasing privé flexible. Tout serait plus simple si les décideurs politiques donnaient un coup de pouce », pointe Gabriel Goffoy.

En Flandre, les particuliers ne paient ni taxe de mise en circulation (TMC) ni taxe annuelle de circulation pour une voiture électrique, bien que cela reste le cas en Wallonie et à Bruxelles. « Nous trouvons que la nature discriminatoire de cette mesure est un problème. En Flandre, vous êtes plus encouragé à acheter une telle voiture qu’à Bruxelles ou en Wallonie, alors que nous partageons un seul et même environnement », déclare le directeur de la communication de la Febiac. « Nous préférons également les mesures structurelles aux mesures temporaires. Sinon, vous recevez certes un coup de pouce, mais tout retombe à plat dès que vous débranchez la prise. On l’a déjà vu avec les diesels par le passé (NDLR L’écoprime de 2008 qui a fait augmenter de façon spectaculaire les ventes de petites voitures diesel) ».

Gabriel Goffoy estime que les consommateurs soucieux de l’environnement devraient être récompensés. « Quiconque est prêt à faire un investissement supplémentaire dans une voiture plus respectueuse de l’environnement et consommant moins de carburants fossiles mérite un incitant. La Belgique compte 5,8 millions de voitures particulières, dont 4,9 millions sont des véhicules privés. Les décideurs politiques n’exploitent pas suffisamment ce gigantesque potentiel ».

Erreur de raisonnement

Selon Bart Massin, il est aujourd’hui évident que les entreprises choisissent la voiture électrique parce que le coût total de propriété est plus favorable en raison du moindre prix de l’électricité et de la plus grande déductibilité fiscale. Et les particuliers ? Ils trouvent encore souvent les voitures électriques trop chères. Bart Massin y voit toutefois une erreur fréquente de raisonnement.

« Une maison dotée d’une bonne isolation et de panneaux solaires est plus chère qu’une autre qui en est dépourvue. Mais vous investissez en vue d’économiser de l’argent à long terme. La logique est identique avec une voiture électrique. Si nous raisonnons depuis longtemps selon le principe de l’investissement pour nos maisons, nous ne regardons souvent que le prix d’achat d’une voiture, pas les coûts d’utilisation et encore moins la valeur de revente. Il faut surtout tenir compte de la perte de valeur sur la durée de vie de la voiture ».

Comme un cheval

Un aspect important de l’électromobilité est le développement d’un réseau de recharge. La ministre flamande de la Mobilité, Lydia Peeters, souhaite que la Flandre s’équipe de 35 000 bornes de charge accessibles au public à l’horizon 2025, soit l’équivalent d’une borne publique pour dix voitures électriques. La Wallonie veut en avoir 12 000 d’ici là, tandis que Bruxelles vise 11 000, mais seulement en 2035. « En Flandre, cette question est déjà plus prioritaire que dans les autres régions. Avec un réseau de recharge plus dense, l’effet secondaire positif est que l’on pourrait aussi utiliser des voitures électriques moins chères, mais à l’autonomie plus limitée », explique Gabriel Goffoy.

Source: European Alternative Fuels Observatory

Bart Massin se demande toutefois si l’infrastructure de recharge est du ressort des autorités. « Le gouvernement belge veut surtout installer des bornes de charge dans les entreprises ou chez les particuliers. Ce n’est pas mauvais en soi, car c’est encore le meilleur endroit pour “alimenter” la mobilité individuelle. Si l’on remonte dans le temps, le cheval permettait la mobilité individuelle. Mais ce n’était pas le gouvernement qui devait nourrir votre cheval ou le garder dans les rues ».

Le CEO de Stroohm évoque une autre idée intéressante pour créer davantage de possibilités de recharge, notamment dans les villes : « Je vois une énorme opportunité dans les parkings. Les parkings que nous utilisons pendant la journée sont complètement sous-utilisés la nuit. Vous pourriez, par exemple, louer une place de parking avec trois voisins et charger votre voiture électrique à tour de rôle. Vous diviseriez simplement le loyer, disons 100 euros par mois, en trois parts. On pourrait ainsi imaginer un Airbnb des places de parking ».

Commande rapide

Un dernier conseil important pour toute personne intéressée par une nouvelle voiture électrique : ne tardez pas à la commander. Actuellement, la demande de modèles électriques est très élevée et la pénurie mondiale de semi-conducteurs et de matières premières n’arrange rien. « Anticipez et n’attendez pas le moment où vous devez vraiment changer. Le délai de livraison d’une nouvelle voiture est désormais de six à huit mois — voire plus d’un an pour certains modèles — au lieu de trois à quatre mois. Plus tôt vous commandez, plus tôt le fabricant peut répondre », conclut Gabriel Goffoy.

Dates importantes de l’électrification

1er juillet 2023

Un point de bascule pour la taxation des voitures de société. Tous les véhicules à émissions non nulles commandés avant le 1er juillet 2023 continueront de bénéficier des règles de déductibilité actuelles si le véhicule ne change pas de mains. Si vous commandez un véhicule à émissions non nulles entre le 1er juillet 2023 et le 31 décembre 2025, le « régime de sortie » s’appliquera et la déductibilité diminuera progressivement. Autre point important : pour un véhicule hybride rechargeable commandé à partir du 1er janvier 2023, les frais de carburant (essence ou diesel, pas l’électricité) ne seront plus déductibles qu’à 50 %.

1er janvier 2026

Les voitures de société à émissions non nulles commandées à partir du 1er janvier 2026 ne seront plus déductibles. Vous pouvez donc toujours opter pour une voiture de société à moteur thermique, mais vous perdrez l’avantage fiscal.

1er janvier 2029

La Flandre veut passer au tout électrique à partir du 1er janvier 2029. La note contenant des mesures supplémentaires pour le plan climat que le gouvernement flamand a pris le 5 novembre 2021 indique : « Nous demandons au gouvernement fédéral de supprimer progressivement l’achat de moteurs à combustion fossile pour les voitures particulières et les camionnettes à partir du 1er janvier 2029 ». Il incombe au gouvernement fédéral de prendre la décision, rien n’a donc encore été décidé.

1er janvier 2035

L’Europe veut qu’aucune nouvelle voiture à moteur thermique ne soit vendue à partir de 2035. Le plan a déjà été approuvé par la commission de l’environnement du Parlement européen. Il doit encore passer en réunion plénière et être transposé dans le droit national des 27 États membres. L’objectif est de parvenir à une neutralité climatique totale d’ici à 2050.

Profitez des avantages fiscaux pour les bornes de charge

Le gouvernement fédéral propose un incitant fiscal pour encourager les particuliers et les entreprises à installer des bornes de charge. En tant que particulier, vous bénéficiez d’une réduction d’impôt de 45 % sur un montant maximal de 1 500 euros (soit jusqu’à 675 euros d’avantages) jusqu’au 31 décembre 2022. En 2023, le pourcentage tombe à 30 %, puis à 15 % entre le 1er janvier 2024 et le 31 août 2024. Cette borne doit être « intelligente », c’est-à-dire réglable en termes de temps de charge et de capacité, alimentée par de l’énergie verte et installée par un professionnel.
Les entreprises peuvent compter sur une déductibilité fiscale de 200 % jusqu’au 31 décembre 2022 et de 150 % du 1er janvier 2023 au 31 août 2024. Une condition supplémentaire est que la borne de recharge soit partiellement accessible au public. Comme pour les voitures électriques, les délais de livraison des bornes de recharge explosent. En ce sens, un projet de loi a été déposé pour prolonger la période de déductibilité à 200 % jusqu’au 31 mars 2023. « N’attendez pas trop longtemps et faites faire l’installation rapidement. Pour une installation cette année, il est impératif de commander maintenant », conseille Bart Massin de Stroohm.

#RoadtoEV

Au fil du dossier #RoadtoEV, nous examinerons au plus près les différentes facettes de la conduite électrique dans les semaines à venir en interrogeant des représentants de différentes marques sur leur vision et leur contribution. Ne manquez pas ce rendez-vous. Suivez l’intégralité de la série également sur www.levif.be/RoadtoEV

Nombre d’immatriculations de voitures électriques neuves en Belgique

201047
2011263
2012562
2013500
20141.166
20151.360
20162.055
20172.709
20183.640
20198.830
202014.987
202122.669
source: Febiac

Modèles électriques les plus prisés en Belgique (janvier-avril 2022)

1.AudiQ4 e-tron1.0959.1%
2.TeslaModel Y9568.0%
3.BMWiX39037.5%
4.TeslaModel 37696.4%
5.AudiE-tron6585.5%
6.Polestar26575.5%
7.MercedesEQA5454.6%
8.PorscheTaycan5284.4%
9.KiaEV64203.5%
10.VolkswagenID.44003.3%
11.BMWiX3402.8%
12.FordMustang Mach-E3132.6%
13.MINIMINI Electric2752.3%
14.BMWi42712.3%
15.VolvoXC40 Recharge2612.2%
16.Fiat5002542.1%
17.Peugeote-2082412.0%
18.HyundaiIoniq 52321.9%
19.KiaNiro2221.9%
20.Citroënë-C42151.8%
source: Febiac

Répartition par type de carburant (janvier-avril 2022)

TractionQuantitéPart de marché
Essence64.97149.4%
Diesel24.13218.3%
LPG8980.7%
Electrique11.9789.1%
CNG1410.1%
Diesel hybride rechargeable1.5151.2%
Diesel-hybride30.0%
Hybride rechargeable à essence18.36114.0%
Essence-hybride9.5347.2%
Hydrogène150.0%
Total131.548100.0%
source: Febiac

Flotte de véhicules Belgique (fin 2021)

TractionQuantité%
Essence3.022.27151.6%
Diesel2.505.53142.8%
LPG15.5780.3%
CNG17.8790.3%
Hybride (HEV)101.2641.7%
Hybride rechargeable (PHEV)117.8572.0%
Electrique (BEV)52.1360.9%
Inconnu18.9600.3%
Total5.851.476100.0%
source: Febiac