Mélanie Geelkens

La sacrée paire de Mélanie Geelkens | Non, les seins des femmes ne sont pas naturellement érotiques

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

A chaque fois que des femmes montrent leurs seins (comme récemment des Femen dans un stade), le même débat revient: les seins ont-ils (naturellement) une fonction érotique ? Bonne blague !

«Dead for your balls! Dead for your balls! Dead for your balls!» (1) C’était juste avant le début de la Coupe du monde au Qatar. Un match au Parc des princes, PSG-Auxerre. Trois Femen qui virent leur pull en sautant au-dessus de la barrière séparant les gradins de la pelouse. Deux secondes, même pas, avant que des types en chasuble fluo les ceinturent, alors que les activistes continuent à scander, poings levés. Et un type en noir qui se dépêche d’ôter son gilet pour vite, vite, vite couvrir l’une des poitrines nues. Pour masquer le message qui y était peint ou la paire de seins?

En tout cas, à regarder une dizaine de vidéos de streakers (ces hommes à poil qui surgissent sur les terrains de foot, généralement parce qu’ils sont bourrés et pas pour faire passer un message politique, #journalismedinvestigation), les gars de la sécurité semblent moins pressés de dissimuler leurs services trois pièces.

Oui mais «c’est comme ça, on ne peut pas changer la nature, les seins ont une fonction érotique», avait objecté (en substance) un lecteur après avoir pris connaissance d’une précédente chronique.

La nature, vraiment? N’aurait-elle pas plutôt équipé les femelles de mamelles afin qu’elles puissent nourrir leur progéniture? Mais, pour son plus grand malheur ou bonheur (au choix), l’humaine reste la seule mammifère dont les glandes mammaires sont entourées de cellules graisseuses. Pour expliquer cette exception, d’éminents scientifiques avaient avancé la piste de la sexualisation: en résumé, en devenant bipèdes, les humains auraient abandonné la levrette pour le missionnaire, par conséquent la poitrine de madame se serait développée pour exciter monsieur, désormais privé de stimulation visuelle anale. Théorie immédiatement invalidée par d’autres éminents scientifiques. Primo: nul ne sait dans quelle position nos ancêtres s’envoyaient en l’air. Deuzio: certains singes pratiquent le missionnaire et le soutif n’est pas pour autant répandu chez les primates.

Tertio (ajout personnel): ah bon, les humains ont renoncé à la levrette? Quarto: dans l’Antiquité, nos aïeux devaient bien copuler (la race humaine ne s’étant pas éteinte), or, ni les miches des Grecques ni celles des Romaines n’étaient érotisées, assure l’anthropologue française Elisabeth Azoulay dans son ouvrage 100 000 ans de beauté (Gallimard, 2009). Selon elle, tout ça, ça ne commence qu’à la Renaissance, quand les robes se mettent à valoriser le poitrail. Enfin, surtout celui des riches: «Aux aristocrates un sein érotisé, aux pauvres le sein nourricier.»

Le pudique XIXe siècle et ses austères chemisiers tout boutonnés n’inverseront plus la tendance. Pas davantage que les campagnes hygiénistes (encourageant l’allaitement pour lutter contre la mortalité infantile), qui tentaient de «ramener le sein dans le camp de la mamelle».

Sexe vs alimentation. Contenter l’homme ou l’enfant. Une tension contradictoire qui ne quittera plus le corps des femmes. Et qui se manifeste régulièrement dans l’espace public, lorsque une mère a la folle idée de nourrir son bébé aux seins alors qu’elle n’est pas invisibilisée à l’intérieur de son foyer. «Vous devriez avoir honte», «Pas de ça ici», «C’est dégueulasse!»… C’est naturel, pourtant. Ça.

(1) «Morts pour vos balles/boules», slogan qui dénonce les nombreux décès d’ouvriers lors de la construction des stades au Qatar pour la Coupe du monde de football, sport majoritairement masculin…

Ces désespérantes petites amies

Féministe, les jeunes générations? Pas toutes, malheureusement. Sur TikTok, depuis quelques semaines, le dernier hashtag à la mode (quelques centaines de millions de vues, tout de même) est #stayathomegirlfriend. Soit des jeunes femmes, entre 20 et 25 ans, qui ne font rien d’autre dans la vie que se pomponner en attendant que leur (fortuné) petit copain rentre à la maison. Soupirs…

12%

des levées de fonds des start-up, en France, sont décrochées par des entrepreneuses, selon le livre Patronnes d’Elodie Andriot (Albin Michel, 2022). En 2021, le baromètre de la tech Sista et BCG avait révélé que les équipes 100% féminines de startuppers étaient 4,3 fois moins bien financées que les équipes masculines.

Madame LE président

Ne dites pas «madame la présidente». En Italie, la nouvellement élue Giorgia Meloni a décidé de ne pas féminiser son titre. Peur de perdre de sa crédibilité? De ne pas être considérée comme une «vraie» dirigeante? Ou signe (s’il en fallait encore) de son peu d’intérêt pour le féminisme et l’égalité des genres?

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