Wavre se cherche une identité

Xavier Attout

Au pouvoir depuis 1977, les libéraux surfent depuis six ans sur la nouvelle dynamique initiée par Charles Michel. Le bourgmestre a déjà sorti sa première cartouche électorale : une piscine. Pour Ecolo, PS et CDH, le défi, c’est bien de bousculer la majorité.

Vous voulez du suspense ? Passez votre chemin. Les seules vraies inconnues du scrutin wavrien concernent le nombre de voix de préférence du bourgmestre Charles Michel (MR) et la répartition des sièges de la minorité. Avec 22 sièges sur 31, les libéraux (accompagnés de quelques indépendants) peuvent voir venir. Sauf séisme, leur majorité absolue ne devrait pas vaciller. Une insolente supériorité qui ne laisse que des miettes à la minorité depuis trente ans.

Tout est loin d’être rose pour autant selon le CDH, Ecolo (4 sièges chacun) et le PS (1 siège), qui n’hésitent pas à taper sur quelques points sensibles. Un bourgmestre absent, des projets lancés à la va-vite en fin de législature, une participation citoyenne qui laisse à désirer ou encore une hausse des impôts, contrairement à ce qui était annoncé au porte-voix en 2006. Cinq listes se présenteront devant l’électeur le 14 octobre. Le FDF fait son apparition. Un temps évoqué, le rapprochement entre les listes de l’opposition a échoué.

Un bilan satisfaisant ?

Le MR estime avoir réalisé 90 % de son programme. Un avis loin d’être partagé : le CDH parle quant à lui de 30 % et le PS est plus conciliant en grimpant à 50 %. La principale fierté libérale est la concrétisation du dossier du hall polyvalent (14 millions). Le chantier débutera à la fin de l’année.  » Mais on ne sait encore rien de la manière dont sera géré ce hall ni ce que l’on y fera « , tempère Arnaud Demez, tête de liste Ecolo.  » Il s’agit d’un enjeu important car les jeunes et les associations sont complètement oubliés aujourd’hui « , ajoute Stéphane Crusnière, tête de liste PS. La maison de repos La Closière (24 millions), elle, verra le jour fin 2013. Ces deux projets permettront de renforcer deux secteurs délaissés.

L’embellissement du cadre de vie est salué par tous. Mais il reste du boulot. Des pistes sont sur la table pour tenter de dynamiser un centre-ville en difficulté. La majorité s’est dotée d’un outil prospectif à travers l’étude Wavre 2030. L’objectif est de le redessiner. Notamment en créant une sorte de mini-ring autour du centre et en transformant la place Bosch en espace piéton.  » Le but est de créer une ville plus conviviale, plus dynamique, plus sexy « , rêve Charles Michel. Pour l’heure, le tissu commercial reste très fragile.  » Sur ce point, il faut prendre des mesures concrètes pour rendre le centre-ville plus attractif, car nous sommes mangés par Louvain-la-Neuve « , regrette Benoit Thoreau, chef de file du CDH.

Rayon mobilité, la majorité affiche un zéro pointé selon Ecolo.  » Rien n’a été fait, estime Arnaud Demez. Il n’y a presque aucune piste cyclable alors que la mobilité est asphyxiée. Otons déjà les voitures du centre-ville !  » Ajoutons que l’incertitude planant au-dessus du parc d’activité économique a été levée, permettant la création de milliers d’emplois.

Pour le reste, les caisses communales sont pleines, l’endettement est extrêmement faible (9 euros par habitant) et la fiscalité parmi les plus basses de Wallonie (6 % à l’IPP et 1 400 aux centimes additionnels).

Un bourgmestre absent ?

Ministre de la Coopération au développement de 2007 à janvier 2011, président de parti dans la foulée : Charles Michel a-t-il géré la cité Maca du fin fond de l’Afrique ou de Bruxelles pendant six ans ? Le bourgmestre n’a en tout cas pas tenu la promesse d’une présence assidue qu’il avait lancée la main sur le c£ur à ses électeurs en 2006.  » Les Wavriens l’ont très mal vécu, pointe Benoit Thoreau. Ils se sont sentis trahis.  » Arnaud Demez embraie :  » Son absence a retardé la concrétisation de nombreux dossiers. Son manque de présence au quotidien est vraiment notre principal reproche. « 

Des arguments balayés d’un revers de la main par le maïeur. La crise politique l’a  » obligé  » à monter dans le gouvernement fédéral.  » Et puis cela m’a permis de faire avancer de nombreux dossiers comme celui du centre 112 ou de la construction de la nouvelle maison de repos La Closière. « 

Pour le reste, il faut avouer que pas un seul dossier n’a été bouclé sans son aval. Que ce soit même par SMS ou e-mail.  » Il a gardé la totale maîtrise de la situation, reconnaît Stéphane Crusnière (PS). Rien n’a été impulsé sans lui.  » Petite anecdote : lors des conseils communaux où il était empêché, il prenait toujours place dans le siège du bourgmestre, menant également la séance et répondant à toutes les questions… Histoire de montrer en quelque sorte qu’il était toujours le boss.

Le MR ouvrira-t-il sa majorité ?

Les libéraux sont au pouvoir depuis 1977 et en majorité absolue depuis 1994. L’hypothèse d’ouvrir la majorité n’est pas écartée.  » Mais je vais aux élections les mains libres, précise Charles Michel. L’objectif est d’obtenir la majorité absolue. Nous analyserons la situation au soir du scrutin.  » A-t-il intérêt à prendre un partenaire, ce qui créera quelques tensions dans son camp ? On sait déjà qu’un échevin de moins s’assiéra à la table du collège. Les places seront donc chères et la perspective crispe les candidats potentiels. Dans l’autre sens, l’idée d’avoir un relais à la Région wallonne pour débloquer quelques dossiers lui trotte aussi dans la tête.  » J’ai eu d’excellents rapports avec le PS et Ecolo, explique-t-il. Ils ont effectué une opposition constructive. Le CDH, par contre, a fait de l’opposition bête et méchante.  » Les humanistes pestent de leur côté contre cette majorité absolue.  » Ce n’est bon pour personne, surtout après trente ans de pouvoir, tonne Benoit Thoreau. Et puis Wavre mérite un bourgmestre à plein temps ! « 

Une minorité qui, contrairement à l’époque Charles Aubecq – bourgmestre de 1977 à 2006 -, revit quelque peu puisqu’elle est enfin écoutée. Même si ce n’est parfois que d’une oreille.  » Nous avons néanmoins réussi à concrétiser une de nos propositions, à savoir la création d’un conseil consultatif de la personne handicapée, se réjouit Arnaud Demez (Ecolo). Chose inimaginable auparavant ! « 

Quels défis pour la prochaine législature ?

Le coup est parti au début de l’été. Charles Michel a coupé l’herbe sous le pied à la minorité en promettant la construction d’une piscine lors de la prochaine législature. Un sujet tabou depuis 1982, date la fermeture du précédent bassin. Depuis cette époque, l’opposition n’a cessé de réclamer un tel outil.  » Trop cher et pas rentable « , ont successivement clamé les bourgmestres Charles Ier et Charles II, qui ne voulaient pas en entendre parler.

Pour le reste, les premières concrétisations de l’étude Wavre 2030 sont attendues dès la prochaine législature. Deux chantiers d’envergure débuteront d’ici peu : la rénovation de la galerie commerciale des Carmes et l’érection d’un immense projet rassemblant commerces et logements sur le parking des Carabiniers, pour favoriser une offre de commerces de moyennes surfaces.  » Wavre manque d’identité, lance Arnaud Demez. Elle souffre de sa comparaison avec Ottignies-Louvain-la-Neuve au niveau commercial et culturel. Il faut prendre son destin en main.  » Pour Benoit Thoreau,  » l’emploi et le redressement commercial du centre-ville sont les deux principaux défis « , alors que Stéphane Crusnière met en avant le logement :  » La population wavrienne vieillit. Il faut donc garder nos jeunes. Quand on voit le nombre d’étages inoccupés dans les immeubles, il y a un potentiel important pour créer des appartements et augmenter l’offre immobilière. Il faut augmenter aussi notre part de logements publics.  » Pour le FDF et sa tête de liste Martine Massart, l’objectif est de mettre l’accent  » sur les démunis et les classes moyennes. Ils sont trop souvent laissés de côté « .

XAVIER ATTOUT

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