VU DE FLANDRE

L’intérêt des médias francophones pour la Flandre a certes augmenté, mais il se limite surtout aux dossiers à caractère communautaire. Or le dossier politique flamand le plus chaud des semaines passées et à venir échappe totalement à l’attention des francophones. Il s’agit, il est vrai, en premier lieu, d’une affaire anversoise, mais chaque Anversois vous dira que ce qui se passe dans la Métropole est aussi important pour tout le pays. En tout cas, ce fameux dossier affecte déjà très fort les relations politiques au niveau flamand.

De quoi s’agit-il donc ? Le 18 octobre, les Anversois auront la possibilité de s’exprimer par référendum sur la question de savoir si le ring d’Anvers peut être bouclé par un viaduc, le  » Lange Wapper « , long de 2 kilomètres et comportant deux niveaux, implanté au nord du quartier  » het Eilandje « . Ce projet avait été adopté, voici quelques années, par le gouvernement flamand, avec le consentement des édiles anversois. Mais, petit à petit, le consensus politique s’est effrité. Surtout à cause des interventions de groupes d’action qui ont exigé la tenue d’un référendum, mais aussi par les hésitations croissantes des politiques anversois eux-mêmes.

Le bourgmestre Patrick Janssens (SP.A) s’est déjugé, au début de cette année, en s’opposant subitement au Lange Wapper. Le calcul politique joue certainement un rôle. Il a aussi saisi l’occasion que lui avait offerte le très réputé bureau d’études Arup-Sum. Celui-ci a présenté une solution de rechange : la construction d’un tunnel se situant plus au nord de la ville et ne menaçant pas, contrairement à un viaduc, le développement urbain et la qualité de la vie de quartiers moins favorisés. En attendant le référendum, Janssens joue, entre autres, sur l’opposition entre Anvers et  » Bruxelles « , c’est-à-dire le gouvernement flamand. Il sait que les Anversois ne restent pas insensibles à une telle attitude, mais le fait que le ministre-président Kris Peeters fait pression sur les échevins CD&V pour ne pas lâcher le Lange Wapper apporte de l’eau au moulin de Janssens. Ainsi se manifestent aussi les dissensions entre la ville et sa périphérie : le SP.A se présente comme le  » parti de la ville  » ; le CD&V et aussi l’Open VLD ont, de tout temps, été très présents dans la périphérie.

Entre-temps, il est de notoriété publique que la coalition au pouvoir à Anvers compte encore peu de vrais partisans. L’échevin Open VLD Ludo Van Campenhout a fait récemment son  » coming-out  » en torpillant le projet du Lange Wapper, contre la ligne de son parti.

Il est également frappant de constater que Bart De Wever s’est immiscé avec vigueur dans le débat et se pose pour ainsi dire en porte-parole du CD&V et de la N-VA. C’est certain, les élections communales de 2012 se profilent déjà à l’horizon ; elles pourraient tourner à un duel entre Janssens et De Wever. La  » droite démocratique  » voudrait éviter à tout prix le renouvellement du scénario de 2006 : un affrontement électoral entre Janssens et De Winter (Vlaams Belang), qui avait permis au premier de  » cannibaliser  » les voix du CD&V et du VLD.

On s’attend à ce que les Anversois rejettent le Lange Wapper. Il incombera alors au gouvernement de coalition flamand (SP.A, CD&V et N-VA) de trancher. Le Lange Wapper risque donc de semer encore plus de trouble.

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DAVE SINARDET – Politologue à l’université d’Anvers

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