Visite chahutée pour Uribe

En Europe, le président colombien a voulu défendre l’action contestée qu’il mène contre les guérillas

En venant en Europe, pour la première fois en dix-huit mois de mandat, le président colombien Alvaro Uribe avait sans doute plus à gagner qu’à perdre. Son objectif ? Obtenir de la part de l’Union européenne un soutien financier et politique. Car le Plan Colombie, qu’il a mis sur pied pour lutter contre les guérillas marxistes, coûte cher, très cher. D’autre part, sa lutte  » antiterroriste  » suscite toujours beaucoup de méfiance à l’étranger. Uribe a beau rappeler que la majorité des Colombiens le soutiennent, les ONG sont nombreuses à pointer du doigt les excès de son action. Amnesty International, par exemple, dénonce une politique qui  » favorise l’impunité et permet la poursuite des atteintes aux droits fondamentaux « .

Comme prévu, le chef du gouvernement colombien a donc reçu un accueil plutôt tiède. Chris Patten, commissaire européen aux relations extérieures, lui a de nouveau reproché son laxisme envers les groupes paramilitaires d’extrême droite. Dès son arrivée à Bruxelles, le 9 février, Uribe a par ailleurs dû faire face à deux manifestations. L’une était organisée par l’Association des réfugiés d’Amérique latine et des Caraïbes, l’autre regroupait les syndicats belges, des ONG et le Comité pour la libération d’Ingrid Betancourt.  » Nous avons voulu attirer l’attention de l’Union européenne sur le fait que la solution, quelle qu’elle soit, devra respecter les droits de l’homme et les libertés syndicales « , explique Jacques Debatty, secrétaire fédéral adjoint de la CSC.

Le lendemain, au Parlement européen de Strasbourg, Uribe a essuyé la fronde d’une partie des députés, jugeant sa visite  » inadéquate « .  » Il combat l’absence de lois, en faisant lui-même fi de la loi « , a dénoncé Graham Watson, le président du groupe libéral.  » Un président s’exprimant en séance plénière se doit d’avoir un profil démocratique. Or, ce n’est pas le cas de M. Uribe « , a ajouté Monica Frassoni, coprésidente des Verts. Pour marquer leur désapprobation, certains parlementaires ont boycotté la séance. D’autres ont quitté l’hémicycle après quelques minutes, portant des écharpes blanches marquées du slogan  » Paix et justice en Colombie ! « .

C’est donc devant une assemblée à moitié vide que le président colombien a défendu les options politiques qui sont les siennes depuis le début de son mandat : mettre fin au conflit en privilégiant la voie militaire et refuser tout dialogue avec la guérilla. Attribuant à celle-ci la responsabilité majeure dans les violations des droits de l’homme, il a déclaré :  » Si Hitler était toujours vivant et qu’il y avait des camps de concentration, la presse européenne n’exigerait pas un accord humanitaire, mais la défaite de Hitler.  »

François Brabant

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