Pierre Havaux

Vent du Nord de Pierre Havaux : quand le souhait de Zuhal Demir de voir la Flandre investir dans le nucléaire hollandais fait flop

Pierre Havaux Journaliste au Vif

Zuhal Demir (N-VA), ministre flamande de l’Energie, aura clôturé 2022 par une de ses sorties médiatiques dont elle est coutumière.  Enième « zuhalleke » : une participation financière de la Flandre dans la construction de deux centrales nucléaires aux Pays-Bas, à Borssele, à portée de la frontière belge. Mais la perspective d’un tel placement financier a eu le don d’irriter, singulièrement les partenaires CD&V et Open VLD de la N-VA au sein du gouvernement flamand.

Elle s’est étonnée que l’on puisse s’ étonner. Elle s’est indignée que l’on puisse s’indigner. Elle attribue le courroux qu’elle s’est attiré à la pensée dogmatique et plus bassement à la jalousie indissociable de la politique. Zuhal Demir (N-VA) aura donc terminé l’année 2022 en beauté, par l’un de ces effets d’annonce qui lui valent rarement des applaudissements.

Qu’a-t-elle bien pu imaginer pour se faire à nouveau remarquer, cette fois sous sa casquette de ministre flamande de l’Energie? La perspective d’une participation financière de la Flandre dans la construction de deux grosses centrales atomiques de troisième génération que les Pays-Bas ont l’intention de faire éclore sur le site déjà nucléarisé de Borssele, à un jet de pierre de la frontière belgo-flamande.

Un «lagelanden energieplan» ou «plan énergétique des plats pays», et pourquoi pas? Voilà qui justifierait de causer entre voisins d’une possible intrusion flamande à caractère financier dans le parc nucléaire hollandais. Mise au parfum des intentions bataves, l’énergique ministre de l’Energie ne voulait pas assister sans réagir à ce regain d’énergie nucléaire programmé de l’autre côté de la haie. Rien de plus, pour le moment, que tâter le terrain sans engagement, via une prise de contact avec l’homologue néerlandais, Rob Jetten (D66). Rien qui vaille la peine, à ce stade, d’informer ses collègues au gouvernement (N-VA – CD&V – Open VLD) de cette première approche et encore moins de requérir une autorisation pour ce faire.

Et voilà Zuhal Demir priée de se mêler de ce qui doit la regarder: l’énergie, pourvu qu’elle soit renouvelable.

Non mais, ça va pas non? L’initiative médiatisée par l’intéressée elle-même a eu le don d’électriser une bonne partie du landerneau politique flamand, qui a choisi de n’y voir qu’un énième cavalier seul parfaitement déplacé. Et parmi les moins tendres à s’être manifestés figuraient aux premières loges CD&V et Open VLD, partenaires de la N-VA dans le gouvernement Jambon. Robrecht Bothuyne, député CD&V, a sèchement recadré: «Vous n’êtes pas compétente pour l’énergie nucléaire, punt.» Willem-Frederik Schiltz, député Open VLD, n’ a voulu y voir «ni plus ni moins que du show pour illustrer votre “nuclophilie” (sic), votre amour de l’énergie nucléaire».

Il y a tant de chaumières à rénover, de factures énergétiques à soulager dans l’immédiat, de panneaux solaires à faire fleurir sur les toits: est-il bien sérieux de songer à claquer des millions d’argent public flamand dans un chantier étranger, au retour sur investissement hautement incertain? Et voilà Zuhal Demir priée de se mêler de ce qui doit la regarder: l’énergie, pourvu qu’elle soit renouvelable.

La ministre N-VA a plutôt mal pris de se voir mouchée de la sorte par ses propres partenaires de coalition qui sont aussi les partis de la Vivaldi à l’échelon fédéral, là où la gestion du nucléaire reste sanctuarisée. « Est-ce donc cela la démocratie flamande » que de reprocher à une responsable de l’Energie de “penser out of the box” alors que la fragilité de l’approvisionnement énergétique requiert plus que jamais de l’imagination au pouvoir?» , a contre-attaqué Zuhal Demir. Qui préfère ne voir que la manifestation d’une bonne grosse dose de mauvaise foi à sa «zuhalleke». Sa dernière pour la route, en 2022.

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