Vent de colère au Sahara

Alors que le conflit qui oppose Rabat aux indépendantistes du Front Polisario est toujours dans l’impasse, la tension croît sur le terrain.

C’est un rituel bien rodé. Périodiquement, des représentants du gouvernement marocain rencontrent dans la banlieue de New York, sous l’égide des Nations unies, une délégation d’indépendantistes sahraouis du Front Polisario pour des  » discussions informelles « . Et il n’en sort rien. La dernière séance, les 8 et 9 novembre, s’est révélée aussi improductive que les précédentes : il n’y a aucune chance que le conflit, enlisé depuis trente-cinq ans, trouve une issue sans négociations directes entre Rabat et Alger. Mais jamais, depuis longtemps, le climat n’avait été si tendu. Car, au même moment, des heurts meurtriers opposaient près de Laâyoune – la  » capitale  » du Sahara occidental – la police marocaine à des militants sahraouis.

Tout a commencé vers la mi-octobre. De jeunes Sahraouis décident d’ériger un camp de toile, à une vingtaine de kilomètres de Laâyoune, et d’y tenir une sorte de sit-in permanent. Leurs revendications portent sur le droit à l’emploi et au logement, la liberté d’expression, la  » reconnaissance de leur dignité « à Durement frappée par le chômage (30 %, alors que la moyenne nationale est de 9 %), la population du Sahara vit très mal l’afflux de Marocains du Nord, à commencer par les fonctionnaires, chouchoutés par le gouvernement. Au fil des jours, le camp grossit, jusqu’à rassembler quelque 15 000 occupants.

Au début, les autorités font preuve de retenue. Puis, à l’aube du 8 novembre, les forces de l’ordre donnent l’assaut, sans ménagement. Bilan : 12 morts au moins (davantage selon le Polisario), dont 10 policiers, et plus de 700 blessés. Le lendemain, les jeunes de Laâyoune expriment leur colère dans les rues de la ville, brûlant des voitures et caillassant des bâtiments publics.

La  » guerre des sables  » reste sans solution

Le Maroc et le Polisario (soutenu par Alger) se disputent depuis 1975 la souveraineté de l’ancien Sahara espagnol, un territoire de 266 000 kilomètres carrés contrôlé à 80 % par Rabat. Cette  » guerre des sables  » est gelée depuis le cessez-le-feu de 1991 et le déploiement d’une force onusienne. Mais elle reste sans solution. En 2007, le Maroc a proposé un plan d’autonomie : aussitôt rejeté par le Polisario et par l’Algérie, il a été plutôt bien accueilli par les chancelleries occidentales. Depuis quelques mois, les indépendantistes s’efforcent de déplacer le conflit sur le terrain de la communication, afin de brouiller l’image d’ouverture, à leurs yeux usurpée, dont bénéficie le Maroc dans la communauté internationale. Non sans succès.

DOMINIQUE LAGARDE

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