Un symbole capital pour l’Europe

Fanny Bouvry

En réponse aux attaques de Romano Prodi sur le manque d’ambition européenne de Bruxelles, Guy Verhofstadt propose un nouveau projet urbain pour le quartier des institutions

Et c’est reparti ! Le débat sur l’avenir du quartier européen refait à nouveau surface. Cette  » enclave  » institutionnelle implantée en territoire bruxellois n’a jamais su en effet se construire une identité urbanistique, coincée entre les immeubles de bureaux et la mixité d’un véritable quartier. Conclusion : le lieu, relativement peu fréquenté par les Bruxellois, pèche par son isolement et une absence totale de cohérence. Mais l' » étude conceptuelle urbanistique globale  » sur l’espace européen, rendue publique ce 2 octobre, pourrait enfin, à long terme, faire bouger les choses. C’est, en tout cas, ce qu’espèrent les deux commanditaires de ce projet urbain commandé en 2002 : le Premier ministre, Guy Verhofstadt, et François-Xavier de Donnea, alors ministre-président de la Région bruxelloise.

Dans les grandes lignes, ce projet, élaboré par le consortium Aries-Idom-L’Atelier- Moritz et Simon/Jordi Ferrando/Speculoos, défend le développement d’un quartier en réseau. Pas question de réorganiser le territoire autour d’un centre fixe. Le plan prévoit la création de plusieurs pôles situés à des endroits stratégiques du quartier Léopold-Schuman. Ces lieux clés seraient reliés entre eux par un tissu urbain dense et compact, de nouvelles lignes de transports en commun et des espaces publics remis en valeur, de manière à transformer le  » ghetto  » en morceau de ville à part entière. Les institutions serviront évidemment de pôles attractifs, pour autant qu’elles brisent leur image de cages dorées. En parallèle, un pôle culturel européen sera développé, dans l’optique d’un espace public d’informations et de rencontre ouvert à ceux que l’Europe intéresse. Le projet est d’ailleurs déjà bien ficelé. Le bâtiment sera érigé sur l’îlot Van Maerlant, un terrain en friche appartenant à la Région bruxelloise, situé au croisement de la chaussée d’Etterbeek et de la rue Belliard. Il comprendra des lieux d’expositions temporaires, des salles de projections, des espaces scéniques… C’est là le point d’orgue des 133 propositions du plan d’urbanisme, qui seront exposées au public, du 1er novembre au 1er février, au parc du Cinquantenaire.

A pic …

Cette étude est tombée à pic… Comme une réponse studieuse, mais peut-être incomplète, aux attaques du président de la Commission européenne, lancées dans Le Soir du 30 septembre. Romano Prodi dénonçait le manque de symbolique européenne à Bruxelles. Il lançait ainsi un appel aux idées pour faire, enfin, de la capitale le vrai c£ur de l’Europe. Une image que la ville recherche depuis 1958, lorsque les institutions européennes y ont élu domicile.

Le constat de Romano Prodi a agité les esprits et chacun s’est laissé aller à ses propositions. Le libéral Daniel Ducarme, ministre-président de la Région bruxelloise, envisage la tenue d’une conférence internationale consacrée à la capitale européenne, un projet qu’il doit évoquer ce 10 octobre avec Romano Prodi. Ecolo suggère la réalisation d’un centre culturel des Régions d’Europe ou encore d’une tour  » d’au moins une fois et demie la tour Belgacom « , sur le site de Tour et Taxis. Quant au CDH, il regrette cette surenchère de propositions  » magiques  » et met en avant le bien-être des habitants.

Certes, l’aménagement du quartier européen ne pourra se résoudre de quelques coups de baguette magique. Bruxelles n’a probablement jamais été confrontée à une question urbaine si complexe ; d’autant plus que l’Union européenne, elle-même, est en phase de mutation. Au printemps prochain, elle accueillera ses nouveaux membres, avec tous les problèmes d’infrastructures qui en résulteront. A cela s’ajoute le nombre impressionnant d’acteurs impliqués dans les projets d’aménagement : l’UE, l’Etat belge, la Région bruxelloise, les Communautés française et flamande et les communes de Bruxelles-Ville, Etterbeek et Ixelles, toutes trois concernées par le projet. Tous les ingrédients sont là pour faire du quartier Léopold-Schuman, et plus largement de Bruxelles, un enjeu urbanistique majeur de ce début de siècle. Le plan présenté par Guy Verhofstadt prévoit les premières modifications du quartier, notamment la création du pôle culturel, à l’horizon de 2007-2008. Une date symbolique puisqu’elle marquera les cinquante ans du traité de Rome. La réalisation complète du projet urbain n’est attendue que pour 2020. D’ici là, d’autres débats en perspective, et certainement encore de nouveaux plans d’urbanisme ! l

Fanny Bouvry

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