Soyez aussi obligataire

Les taux sont très bas. Pas de quoi inciter les investisseurs à jouer la carte des obligations. Elles ont pourtant leur place dans toute diversification de portefeuille. Même si ce n’est pas à court terme. Rappel des principes

Beaucoup moins médiatisé que celui des actions, le marché des obligations mérite pourtant toute l’attention. Petit rappel : en achetant une obligation (émise par une entreprise, un pouvoir public…), vous prêtez de l’argent à l’émetteur pour une durée (la maturité) fixée à l’avance (dans le cas d’une obligation à taux fixe, la plus courante). En contrepartie, l’émetteur s’engage à vous payer un revenu régulier déterminé lors de l’émission et, à l’échéance, de vous rembourser le prêt selon les modalités prédéfinies. Un emprunt que vous auriez contracté auprès de votre banque s’apparente donc à une obligation.

Si les prêts bancaires ne sont pas négociables, les obligations le sont à travers un marché réglementé, tout comme les actions. Mais, tandis que le cours de ces dernières varie en fonction de la capacité estimée de l’entreprise à créer de la richesse, celui des obligations varie en fonction des taux d’intérêt et du risque crédit.

L’influence des taux

Retenons que le cours des obligations à taux fixe varie en sens inverse des taux d’intérêt.

Prenons un exemple. Soit une obligation de 1 000 euros émise par un Etat pour 20 ans offrant un intérêt de 5 %, soit 50 euros par an. Supposons que, trois ans plus tard, vous décidiez de vendre votre obligation et que, parce que les taux ont monté, l’Etat offre 7 % pour les nouvelles obligations. Vous ne trouverez personne qui vous paiera 1 000 euros pour une obligation qui rapporte 5 % alors qu’on peut acheter le même produit rapportant du 7 %. Vous ne pourrez donc revendre votre obligation qu’au prix de 714,2 euros (1 000 x 5/7 ). A ce prix, elle rapportera également du 7 % l’an (50/714,2). Parce que les taux ont augmenté (de 5 à 7 %), le cours de l’obligation a baissé (de 1 000 à 714,2 euros). Si vous la vendez, vous réalisez une moins-value.

En revanche, si les taux avaient baissé, le cours de votre obligation aurait augmenté et vous auriez réalisé une plus-value. Il est donc parfois intéressant de vendre une obligation sans en attendre le remboursement. Les éléments macroéconomiques – l’inflation, la croissance économique et les déficits budgétaires – influencent d’une façon déterminante le niveau des taux d’intérêt.

Le risque crédit

Outre les taux, la santé financière de l’émetteur est fondamentale. Le principal risque est que l’obligation ne soit pas remboursée. Dans ce cas de figure, l’obligation ne vaut plus rien ! Pour rémunérer le risque que vous prenez en lui prêtant, l’entreprise propose à ses obligataires un intérêt plus élevé que des placements similaires jugés sans risque comme les bons d’Etat. Pour préciser le niveau de risque, la solidité des émetteurs est analysée et une note est attribuée par les organismes indépendants dont les plus célèbres sont Moody’s et Standard & Poor’s.

Ce risque de défaut de paiement existe dans le chef des entreprises (on l’a vu avec Enron et Parmalat) mais aussi dans celui des pays (comme en témoigne l’exemple de l’Argentine).

Si le placement en obligations est donc a priori moins risqué que celui en actions, il ne constitue toutefois pas un placement sans risque.

Vers une remontée des taux

Après plusieurs années de baisse orchestrée par les Banques centrales, et malgré la dernière baisse, on s’attend à ce que les taux d’intérêt montent au cours des prochaines années. Deux raisons sont avancées. D’une part, les déficits publics en Europe et surtout aux Etats-Unis restent importants, ce qui oblige les Etats à faire constamment appel aux marchés pour leur financement. D’autre part, les entreprises financeront leur expansion en faisant elles aussi appel aux marchés obligataires. La conjonction de ces deux mouvements débouchera sur une hausse de la demande en capitaux et donc des taux.

Si vous souhaitez investir directement en obligations, optez pour les échéances courtes (au maximum cinq ans). Inutile, en effet, d’acquérir des obligations à 10 ans à un taux de 4,5 % si, avec la remontée attendue du loyer de l’argent, vous pouvez en acquérir dans 5 ans à un taux de 6 %. Vous pouvez également investir en sicav obligataires. Outre la diversification par échéance qui minimise le risque de taux, le gestionnaire fera alors pour vous le travail de diversification des émetteurs, ce qui réduira les conséquences induites par un possible défaut de paiement. l

Pierre Samain, Budget Hebdo

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