Secrets de Sfar

De la musique au cinéma, en passant par la littérature, tout l’inspire et le passionne. Il nous ouvre les portes de son musée imaginaire

Cinéma Nosferatu, de F. W. Murnau

Fan de cinéma, Sfar laisse les chaînes du câble allumées et avale parfois quatre films d’affilée.  » Nosferatu a été un très gros choc visuel. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser que ces artistes expressionnistes ont fait malgré eux le lit de l’ima- gerie nazie. Le vampire de Murnau est un étranger au nez crochu qui amène la peste dans la villeà On pourrait résumer mon travail d’auteur comme une volonté de prendre toutes les créatures que le cinéma expressionniste dépeint comme assoiffées de sang et de les inviter dans la comédie américaine.  » D’où sa série Grand Vampire,  » qui remet au goût du jour les grands romans-photos « .

Le cinéma de papa, plein d’amitiés tendres et viriles, le fait fondre : La Guerre des boutons, Salut l’artiste, Un éléphant, ça trompe énormément et autres classiques d’Yves Robert ont ainsi tourné en boucle sur son magnétoscope.  » Il reste, hélas ! un cinéaste sous-évalué.  » En vrai cinéphile, il a digéré tout Lubitsch, tout Wilder, tout Woody Allen, tous les Marx Brothers et, en général,  » les cinéastes qui mêlent l’humour et le tragique, ceux que Romain Gary qualifiaient de « clowns lyriques » « . l

Musique Amsterdam Klezmer Band

Son père – avocat – a été pianiste de jazz. Sa mère, une ancienne Mademoiselle Age tendre, a enregistré des 45-tours de bossa-nova et de paso doble au temps du yé-yé. Joann, lui, écoute des disques douze heures par jour, en dessinant : Georges Brassens – qu’il imite à la perfection – Johnny Cash, Hank Williams, Massilia Sound System, Dionysos. Et des groupes klezmer, un genre musical découvert à son arrivée à Paris, au début des années 1990, en bossant sur son mémoire de maîtrise de philo. Thème :  » La représentation de la figure humaine chez les peintres juifs « . En fouinant sur Internet, il a déniché Limonchiki, un album du groupe néerlandais Amsterdam Klezmer Band :  » Une fanfare bien énervée qui vient du jazz et met le feu dans les bars.  » Il est question d’un spectacle avec cette bande d’allumés autour de sa bédé Klezmer,  » réponse ashkénaze au Chat du rabbin « . l

Littérature Sherlock Holmes

Mon rapport à la langue française s’est solidifié au contact de trois grands auteurs : Jean de La Fontaine, Molière et Dumas. On voit bien les valeurs laïques et républicaines avec lesquelles j’ai grandi et qui ont pu me plaire.  » Plus tard, Joann Sfar découvre Romain Gary :  » Sa colère permanente lui était très féconde. Les grandes figures indomptables comme lui ou Hugo Pratt m’attendrissent.  » Et Albert Cohen, dont il a lu et relu Mangeclous en riant aux mêmes endroits.  » Leur point commun est qu’ils sont des enfants de Don Quichotte et de Rabelais.  » Mais ce fils de la littérature truculente et picaresque est aussi un fan de Conan Doyle.  » La façon de poser des problèmes de logique formelle permet d’idolâtrer les personnages. J’ai lu tous les Sherlock Holmes, toutes les biographies sur Conan Doyle et celles de tous les acteurs qui ont incarné le détective. J’ai une fascination coupable pour l’Angleterre. Ma série Professeur Bell découle de Sherlock.  » Parfois, quand Sfar s’ennuie, il lit Platon, Sénèque ou Montaigne. l

Art Les toiles de Paul Klee

Sfar, élève aux Beaux-Arts de Paris, a eu une révélation en visitant le musée Chagall à Nice, sa ville natale, vers 7-8 ans :  » Il voulait mettre son village en sécurité dans ses toilesà Il y a beaucoup de ça chez moi, ce désir un peu illusoire de préserver les choses, pas forcément graves, jusqu’aux souvenirs de mes gosses.  » Et Paul Klee le fascine,  » pour la mélodie de son graphisme. J’ai l’impression de voir ses toiles avec les oreilles. Pour moi, le cubisme bien compris n’est pas une théorie plastique, c’est quelque chose qui fait éclater le réel, qui le brouille comme si une goutte d’eau tombait dedans « . l

Passion L’ukulélé

La folie de l’harmonica, de l’ukulélé, de la mandoline et du banjo lui est tombée dessus il y a cinq ans.  » C’est assez névrotique. Maintenant, je ne peux pas m’empêcher d’acheter des instruments de musique et j’apprends à en jouer sérieusement, studieusement, notamment l’ukulélé, en m’aidant de tablatures prises sur le Net. Mon luthier, Roselyne & François Charles, possède une salle spéciale où on peut les essayer. Je me suis fabriqué un bureau hérissé d’une trentaine d’instruments. Je m’y sens bien, on dirait une forêt de lances.  » Il a converti Mathias Malzieux, du groupe Dionysos, au charme de l’ukulélé. Ensemble, ils vont donner en duo, à Angoulême, un concert de vieilles chansons de cow-boys. On retrouve cette folie de la musique dans ses carnets autobiographiques : Ukulélé, Harmonica, Pianoà l

Bande dessinée Snoopy

G.M.

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