Quels droits de succession pour les cohabitants ?

Certains avantages, jusqu’alors réservés aux époux, sont désormais accordés aux cohabitants. Mais il existe des nuances entre les trois Régions du pays. Comparaison.

Depuis quelques années, le paysage des droits de succession, resté longtemps figé, a commencé à s’animer et à prendre de nouvelles couleurs régionales. Parmi les changements figure en bonne place celui applicable aux cohabitants, auxquels les Régions ont voulu accorder certains avantages jusqu’alors réservés aux époux. C’est ainsi que la Région de Bruxelles-Capitale vient d’étendre aux cohabitants légaux l’application des taux de droits de succession les plus favorables, qui étaient jusqu’alors applicables aux seuls conjoints et descendants.

Les Régions n’ont cependant pas adopté des règles uniformes. Il existe d’importantes nuances à cet égard entre les législations régionales.

Important : pour pouvoir hériter l’un de l’autre, les cohabitants devront, la plupart du temps, faire un testament.

Il faut spécialement attirer l’attention des cohabitants sur le fait que l’application des taux de droits de succession les plus favorables implique qu’ils soient héritiers. Or la loi n’a pas créé une nouvelle catégorie d’héritiers représentée par les cohabitants ; dans la mesure où il n’existe pas de lien de parenté entre les cohabitants, ceux-ci n’hériteront jamais l’un de l’autre par le seul effet de la loi.

En dehors des hypothèses où les cohabitants sont frères et/ou s£urs, oncle ou tante et neveux et/ou nièces, les cohabitants devront donc prévoir dans un testament qu’ils héritent l’un de l’autre. Ce testament pourra prendre la forme d’un testament olographe (rédigé de sa propre main), d’un testament authentique (dicté à un notaire) ou d’un testament international.

Dans le cas où les cohabitants héritent l’un de l’autre, il conviendra de vérifier quelle législation régionale leur sera applicable, afin de déterminer le montant des droits de succession.

Région de Bruxelles-Capitale

Les points essentiels de la législation régionale sont les suivants :

– seuls les cohabitants légaux peuvent bénéficier des taux de droits de succession les plus favorables ;

– il y a cohabitation légale dans la mesure où deux personnes vivent en commun et ont fait une déclaration à l’officier d’état civil de leur domicile commun. Une communauté de vie n’est donc pas suffisante.

Rappelons qu’aucun des cohabitants ne peut être marié ou déjà lié par une autre cohabitation légale, s’il veut faire cette déclaration.

Il suffit que la cohabitation légale existe au décès pour que le régime le plus favorable s’applique. Il n’y a donc aucune condition de durée de la cohabitation légale avant décès.

D’autre part, des cohabitants légaux qui seraient par ailleurs frères et/ou s£urs, oncle ou tante et neveu ou nièce peuvent bénéficier du taux le plus favorable.

Région wallonne

En Région wallonne, seuls certains cohabitants légaux peuvent bénéficier du régime le plus favorable. En effet, l’existence d’une cohabitation légale au jour du décès ne suffit pas. La Région wallonne a posé deux autres conditions :

– la déclaration de cohabitation légale doit avoir été faite à l’officier d’état civil plus d’un an avant le décès ;

– les cohabitants légaux ne peuvent être ni frères et/ou s£urs, ni oncle ou tante et neveu ou nièce.

En Région flamande

La Région flamande fut la première à instaurer un régime de droits de succession plus favorable pour certains cohabitants. Ce régime a déjà été modifié à plusieurs reprises. Actuellement, seuls bénéficient du régime le plus favorable :

– les cohabitants légaux (sans obligation de durée avant décès) ;

– la ou les personnes qui vivaient ensemble avec le défunt sans interruption depuis au moins un an et tenaient un ménage commun avec lui. Dans ce cas, la preuve du ménage commun ne résultera pas automatiquement de l’existence d’un domicile commun. En d’autres termes, l’inscription au registre de la population ne sera pas suffisante en tant que telle ; il faudra en plus qu’il y ait bien dans la réalité un ménage commun.

Il faut conseiller aux cohabitants visés par ces mesures de conserver les preuves de l’existence de ce ménage commun telles les factures des dépenses courantes (eau, gaz, électricité, téléphone…). Dans la mesure où il est prouvé que la cohabitation et la tenue d’un ménage sont devenues impossibles pour cause de force majeure, le tarif le plus favorable restera d’application.

Il faut noter également que tous les cohabitants visés qui seraient par ailleurs frères et/ou s£urs, oncle ou tante et neveu ou nièce peuvent bénéficier du taux le plus favorable.

Conclusions

Nous assistons actuellement à une véritable frénésie législative en matière fiscale dans le chef des différentes Régions.

La réforme du tarif des droits de succession en est un exemple parmi d’autres et les cohabitants en sont sans aucun doute les bénéficiaires les plus connus.

Encore faut-il bien comprendre la notion de  » cohabitants  » puisque celle-ci varie en fonction des Régions.

Les cohabitants sont souvent perplexes devant les différences de traitement d’une Région à l’autre. Ils ont surtout le sentiment d’être traités différemment pour des raisons inhérentes aux possibilités budgétaires des Régions.

Une plus grande cohérence dans la définition des cohabitants en matière de droits de succession eût été souhaitable, quitte à établir une distinction entre les cohabitants qui ont fait une déclaration auprès de l’officier d’état civil et ceux qui ne l’ont pas faite.

Entre-temps, il faudra bien s’accommoder des différences régionales sans oublier que d’autres règles fiscales s’appliquent également aux cohabitants pour déterminer le tarif régional applicable. Nous pensons évidemment à la notion de domicile fiscal qui détermine le tarif régional des droits de succession applicable en fonction de la période la plus longue d’établissement dans une Région durant les 5 dernières années avant le décès. l

Philippe Degrooff et Christine De Valkeneer

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