QUELLE STRATÉGIE EUROPÉENNE CONTRE LE TERRORISME ?

La sécurité reste une chasse gardée nationale. Ce constat hypothèque la mise en place d’une  » union de la sécurité « , pour reprendre l’expression du président de l’exécutif européen, Jean-Claude Juncker. Les attentats de Bruxelles n’ont donc pas bouleversé l’agenda européen antiterroriste. Pour les ministres européens en charge de la Sécurité et de la Justice, il ne faut pas lancer de nouveaux plans, mais  » mettre en oeuvre ce qui est déjà sur la table « . Comme après chaque attaque, ils insistent sur la nécessité de partager davantage les informations récoltées par leurs services.

Les premiers pas de la coopération policière à l’échelle européenne remontent aux années 1970, époque du terrorisme palestinien et de l' » euroterrorisme  » des Brigades rouges italiennes et de la Rote Armee Fraktion allemande. Créé en 1976 de façon informelle, le groupe Trevi (Terrorisme, radicalisme, extrémisme et violence internationale) réunissait des responsables des ministères de la Justice et de l’Intérieur des douze Etats membres. Depuis le Traité de Lisbonne (2009), les décisions au Conseil sont prises à la majorité qualifiée.  » On a cru que cela donnerait un coup d’accélérateur à la coopération antiterroriste, commente Anne Weyembergh, présidente de l’Institut d’études européennes de l’ULB. Mais un nouvel acteur est entré en scène : le Parlement européen, doté d’un pouvoir de codécision. Il n’a pas toujours les mêmes préoccupations que le Conseil : il se soucie notamment de la protection des droits fondamentaux. Ce qui est positif, mais ne contribue pas à l’adoption rapide de textes controversés.  »

Voilà pourquoi le Passenger name record (PNR) européen, objet d’une proposition de directive déposée en 2011, n’a toujours pas passé le cap du vote en plénière. Ce PNR doit permettre de centraliser les données passagers récoltées par les compagnies aériennes aux arrivées et départs des aéroports. Toutefois, une partie de la gauche européenne veut que soit entérinée, en même temps, une nouvelle mouture de la directive sur la protection des données personnelles. De son côté, la Commission propose une modernisation de la directive  » armes à feu « , en vue de renforcer les contrôles. Mais des eurodéputés relaient la résistance du lobby des chasseurs et collectionneurs d’armes.

 » Les dirigeants de l’Union se rendent compte des lacunes de la lutte antiterroriste, assure Anne Weyembergh. Pour autant, la logique institutionnelle européenne ne se prête pas à des progrès rapides en la matière. Elle doit prendre en compte l’argument de la souveraineté nationale, brandi par les gouvernements, et celui de la protection des droits fondamentaux, invoqué au Parlement européen.  » Des progrès ont tout de même été accomplis dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis : l’adoption du mandat d’arrêt européen, qui simplifie grandement la procédure d’extradition, remplacée par une procédure de  » remise  » ; ou encore le rapprochement des législations nationales quant aux incriminations du terrorisme.

O. R.

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