PRENDRE LA MESURE DE LA MENACE ISLAMISTE

Dans les années 1990, à l’époque où Khaled Kelkal semait la terreur en France au nom du GIA algérien (Groupe islamique armé), la Belgique était considérée comme une base arrière des groupes islamistes et ainsi  » épargnée  » par la violence terroriste. L’attentat au Musée juif de Bruxelles le 24 mai a précipité notre pays et l’Europe dans un autre paradigme. Il marque un tournant dont on peut douter que les politiques aient réellement pris conscience.

Le courant dominant de l’islamisme radical contemporain est débarrassé de contingences nationales et, depuis l’avènement d’Al-Qaeda, appréhende l’Occident et sa démocratie comme une cible globale. Certes, Oussama Ben Laden a été éliminé et son mouvement a subi des coups qui ont réduit sa capacité opérationnelle. Mais prétendre que le djihadisme est en phase déclinante est une hérésie. A la lisière de l’Europe, quatre zones de non-droit prospèrent désormais comme autant de sanctuaires de groupes djihadistes : le Sahel (sud algérien et sud libyen, conséquence de la guerre en Libye), la Somalie, les étendues de l’est de la Syrie et de l’ouest de l’Irak, les régions à cheval entre l’Afghanistan et le Pakistan (dont la surveillance va se distendre encore après le retrait des troupes étrangères du territoire afghan). L’attaque du Musée juif de Bruxelles est le premier attentat en Europe, selon toute vraisemblance, d’un  » ancien du djihad syrien « . Par sa proximité géographique, la violence des combats qui y sont menés et l’impuissance occidentale à le circonscrire, le conflit syrien est devenu un vivier de djihadistes et, au vu des jeunes Européens qui s’y rendent et en reviennent, une menace sans précédent pour le Vieux Continent.

Grandes pourvoyeuses de mercenaires du djihad, la France et la Belgique ont pris les commandes de ce combat. Mais, assurément, l’effort est insuffisant. Et on ne peut être qu’agacé par les déclarations d’autosatisfaction d’un François Hollande après l’arrestation – fortuite – de Mehdi Nemmouche,  » loup solitaire  » très cornaqué. Car, à tout le moins, le traumatisme de Bruxelles pose des questions sur la prégnance de plus en plus grande du salafisme dans les banlieues françaises, sa diffusion dans les prisons, la propagation d’appels à la violence et de propos antisémites sur les réseaux sociaux, la surveillance des djihadistes de retour de théâtres de combat, les moyens du renseignement, la coopération entre les services (après la signalisation du tueur par les Allemands), l’efficacité de l’enquête en Belgique (où est tout de même resté l’auteur pendant cinq jours), ou la confusion de la diplomatie européenne sur le dossier syrien…

La cécité n’est plus acceptable face au défi que nous lancent, pourtant ouvertement, les  » penseurs  » du salafisme et que Gilles Kepel, spécialiste de l’islam, résume ainsi (Le Monde du 3 juin) : ils escomptent  » de la multiplication de ces violences et de leur médiatisation une crispation des sociétés occidentales contre l’ensemble des musulmans d’Europe, afin de susciter chez ceux-ci victimisation et solidarité face au sentiment « d’islamophobie », propice à augmenter la clôture communautaire et à déclencher, à terme, des guerres de religion sur le Vieux Continent, aboutissant à la constitution d’enclaves « .

Pour éviter que ce piège ne se referme sur nos démocraties, pour que demain, nos compatriotes de confession juive puissent revivre sereinement, délivrés du dilemme  » risque de violences ou expatriation « , il est urgent d’agir. Sans verser dans la psychose sécuritaire, mais avec la détermination nécessaire.

de Gérald Papy

 » La cécité n’est plus acceptable face au défi que nous lancent, pourtant ouvertement, les  » penseurs  » du salafisme  »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire