L' oeuvre de Frida Kahlo a été adoubée par les surréalistes, notamment en raison de l'importance qu'elle attachait au rêve, élément central de ce mouvement. Huile sur toile de 1940, Le rêve (Le lit) représente l' artiste "en état de transe favorable à l' envol de l'imagination et au pouvoir créatif de l'inconscient". © NEW YORK, PRIVATE COLLECTION/PHOTO: JORGE CONTRERAS CHACEL /BRIDGEMAN IMAGE

Portrait élargi

Artiste shootée au flux vital, Frida Kahlo a marqué l’histoire de la peinture. Un imposant ouvrage retrace l’oeuvre picturale de cette pionnière dont la pratique rend compte de la condition féminine au sein de la société mexicaine du siècle passé.

« Rien n’est absolu. Tout change, tout bouge, tout tourne, tout vole et s’en va. » En écrivant ces deux phrases restées célèbres, Frida Kahlo (1907 – 1954) n’avait pas conscience qu’un jour son oeuvre transpercée serait fixée dans le marbre d’une somme co- signée par Luis-Martín Lozano, Andrea Kettenmann et Marina Vázquez Ramos. Ce trio vient de publier ce qui est sans nul doute l’ étude la plus complète à ce jour des peintures de l’artiste mexicaine, épatant arrêt sur image qui se feuillette comme la bible d’une esthétique libre, sincère et engagée. Un livre plus que nécessaire pour qui veut comprendre un univers artistique forgé à même les élans vitaux d’une nation ayant compris comme nulle autre que c’est en la frottant à ce qui la nie que l’existence prend toute sa valeur.

Cet autoportrait de 1932 est la transposition imagée d'un épisode douloureux, celui d'une fausse couche qui s'est produite la même année. Deux ans plus tôt, Kahlo avait déjà avorté pour raisons médicales. En conséquence, la maternité allait lui être à jamais refusée.
Cet autoportrait de 1932 est la transposition imagée d’un épisode douloureux, celui d’une fausse couche qui s’est produite la même année. Deux ans plus tôt, Kahlo avait déjà avorté pour raisons médicales. En conséquence, la maternité allait lui être à jamais refusée.© HENRY FORD HOSPITAL (1932)/, MEXICO CITY, XOCHIMILCO, MUSEO DOLORES OLMEDO/PHOTO: AKG-IMAGES

Fort heureusement Frida Kahlo. Tout l’oeuvre peint ne s’adresse pas qu’au seul cerveau. A travers une abondance de reproductions, parfois agrandies par rapport à leurs dimensions originales, c’est au nerf optique que s’en prend la publication. On plonge littéralement dans des autoportraits et autres natures mortes à l’expressivité exacerbée. Le tout pour une immersion dont on ne sort pas totalement indemne. Le résultat est d’autant plus opérant que les auteurs ont fourni un véritable travail d’enquête, exhumant ainsi des toiles issues de collections privées, d’autres que l’on croyait perdues ou des chefs-d’oeuvre n’ayant pas été exposés depuis plus de quatre-vingts ans. Des documents, des objets – entre autres ses célèbres corsets peints à la main – et des photographies de l’époque complètent le portrait élargi de ce talent disparu en pleine maturité créative qui, à l’ aube de sa carrière, confessait: « J’ai une raison de vivre. Cette raison, c’est la peinture. »

Une esquisse au crayon, emblématique d'une série de représentations montrant l'artiste blessée, les blessures physiques devant être comprises comme une métaphore de sa souffrance psychique.
Une esquisse au crayon, emblématique d’une série de représentations montrant l’artiste blessée, les blessures physiques devant être comprises comme une métaphore de sa souffrance psychique.© SHOWING THE SCAR (1938)/NEW YORK, PRIVATE COLLECTION/ PHOTO: RAFAEL DONIZ

Frida Kahlo. Tout l’oeuvre peint, par Luis-Martín Lozano, Andrea Kettenmann et Marina Vázquez Ramos, Taschen, 624 p.

Cette photo de la sociologue et portraitiste Gisèle Freund, pionnière de la couleur, révèle l'attachement de Frida Kahlo à l'art préhispanique.
Cette photo de la sociologue et portraitiste Gisèle Freund, pionnière de la couleur, révèle l’attachement de Frida Kahlo à l’art préhispanique.© BPK/IMEC, FONDS MCC
Datant de 1948, cet autoportrait au cadrage resserré montre la peintre en proie à la tristesse, sans que l'on sache vraiment pourquoi. Elle est vêtue du costume traditionnel des femmes de la région de Tehuantepec, qu'elle possédait réellement mais portait peu.
Datant de 1948, cet autoportrait au cadrage resserré montre la peintre en proie à la tristesse, sans que l’on sache vraiment pourquoi. Elle est vêtue du costume traditionnel des femmes de la région de Tehuantepec, qu’elle possédait réellement mais portait peu.© MEXICO CITY, PRIVATE COLLECTION/AKG-IMAGES
La relation entre Frida Kahlo et son mari, le peintre muraliste Diego Rivera, fut plus que tourmentée et ambiguë. Malgré cela, l'amour a tenu bon.
La relation entre Frida Kahlo et son mari, le peintre muraliste Diego Rivera, fut plus que tourmentée et ambiguë. Malgré cela, l’amour a tenu bon.© PHOTO: SPENCER THROCKMORTON
Cet autoportrait semble avoir été réalisé à la hâte. L'imprécision anatomique résulterait, selon le psychiatre et spécialiste Salomon Grimberg, d'une vaste commande à honorer en vue d'une exposition new-yorkaise. Le petit chien dans le bas du tableau peut être compris comme un substitut d' enfant.
Cet autoportrait semble avoir été réalisé à la hâte. L’imprécision anatomique résulterait, selon le psychiatre et spécialiste Salomon Grimberg, d’une vaste commande à honorer en vue d’une exposition new-yorkaise. Le petit chien dans le bas du tableau peut être compris comme un substitut d’ enfant.© IXCUHINTLI DOG WITH ME (C. 1938)/UNITED STATES, PRIVATE COLLECTION/PHOTO: AKG-IMAGE
Cette nature morte appartient à une série d'huiles sur toile que l'artiste a peinte durant les cinq dernières années de sa vie. En proie à une terrible déclin physique et mental, Kahlo affirme ainsi sa volonté de vivre et de peindre malgré tout (notamment une amputation, en 1953). Les deux noix de coco représentées évoquent un animal blessé implorant le regardeur. Los Angeles County Museum of Art, The Bernard and Edith Lewin Collection of Mexican Art/Photo: Museum Associates/LACMA/Art Resource NY/Scala, Florence
Cette nature morte appartient à une série d’huiles sur toile que l’artiste a peinte durant les cinq dernières années de sa vie. En proie à une terrible déclin physique et mental, Kahlo affirme ainsi sa volonté de vivre et de peindre malgré tout (notamment une amputation, en 1953). Les deux noix de coco représentées évoquent un animal blessé implorant le regardeur. Los Angeles County Museum of Art, The Bernard and Edith Lewin Collection of Mexican Art/Photo: Museum Associates/LACMA/Art Resource NY/Scala, Florence© www.scalarchives.com

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire