Pince-mi et pince-moi…

Christine Laurent
Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

Un plantage au décollage ! Pour Bart De Wever, qui s’est longuement épanché devant les patrons wallons cette semaine, Elio Di Rupo a raté son pilotage de crise. Pas de chance, vraiment ! Alors que la N-VA lui avait tendu  » généreusement  » le fauteuil du 16, rue de la Loi, il est si peu doué, le président du PS, qu’il a réussi à  » perdre le momentum « , LE moment où Flamands et francophones avaient rendez-vous avec l’Histoire. On devait avoir un gouvernement pour la fin de l’été. Patatras ! Par la  » faute à Elio « , nous voilà aujourd’hui englués jusqu’au cou dans des négociations barbouillées, enlisés dans des ornières communautaires chaque jour plus profondes, ébranlés dans notre crédit international. Erreur funeste.

Il adore calibrer ses interventions, Bart. Godiller, mais jamais à l’aveugle. Dégainer juste quand il le faut avec une habileté qu’il imagine facétieuse, peut-être, mais bien florentine. Les élections ? Juré, craché, il n’en veut pas. Il n’empêche, chaque jour de crise est un jour de gloire avec, in fine, quelques électeurs de plus dans sa poche. Dans ce jeu de durs et de dupes, nul doute que Di Rupo rame. Utilisant avec subtilité toutes les ficelles d’une bonne communication marketing, il tente de parer les coups : non, pas question d’élections, oui, il est prêt à faire des concessions encore et encore. Entendez : si demain on doit voter, ce ne sera pas de ma faute, n’aurais-je pas tout tenté ? Pince-mi et pince-moi s’affrontent toujours sur le même bateau. Hélas, il sombre de toutes parts.

Tout cela ne serait que broutilles et enfantillages s’il n’en allait de l’avenir de notre pays. Et de notre survie à court et moyen terme. Vieillissement de la population, chômage menaçant, endettement public important, augmentation des taux d’intérêt sur les emprunts d’Etat, absence totale de mesures d’austérité pendant que tous nos voisins sont à la chasse aux milliards… la Belgique sent courir sur son échine le grand frisson de la débandade. On ne parlera même pas des pensions, que le gestionnaire du Fonds de vieillissement en personne, Marc Boeykens, a qualifiées de  » Titanic « . Le surplace enfiévré de ces derniers mois n’y changera rien. Ce qui n’a pas échappé aux spéculateurs de tout poil, avides de  » bonnes affaires « . Ils sont ainsi faits qu’au lieu de les calmer, les dettes détenues de plus en plus par les institutions gouvernementales les excitent. Pour nous, en réalité, ça tousse fort. Bien sûr, on tente ici et là de temporiser. Le taux d’épargne des Belges est colossal, nous n’inquiétons pas l’Europe, prétend même le commissaire européen Karel De Gucht, des petits arrangements sont encore possibles. Pas sûr. Les rumeurs tendant à nous déstabiliser se sont répandues à la vitesse du poison. Ouvrir les yeux et ne pas se raconter d’histoires, nous n’avons pas d’autre choix. Nous devons assainir nos finances. Adopter des orientations cohérentes, rassurer des marchés de plus en plus nerveux. Face aux prédateurs et aux nouvelles crises qui s’annoncent dans la zone euro, il FAUT renforcer le pouvoir politique. En d’autres termes, il est urgent de conclure. Mais comment marier la carpe et le lapin ? Comment gérer notre futur proche quand l’un des partenaires regarde à droite et l’autre résolument à gauche ? Depuis le tout début, il l’a dit et redit, Bart, c’est avec les libéraux qu’il veut diriger le pays (en éjectant au passage le CDH et Ecolo ?). Le récent appel du Voka (le patronat flamand,  » son patron « ) ne l’ébranlera pas pour autant. L’ombre des urnes pour le début 2011 se profile déjà. Message reçu cinq sur cinq par Elio ?

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