L'auteur genderfluid iO Tillett Wright a marqué une année littéraire de l'affirmation de soi. © Doris Spiekermann/belgaimage

Minority Report

En 2018, auteurs et éditeurs ont eu à coeur d’offrir des narrations diversifiées, explorant de l’intérieur les questions cruciales de genre, de sexe et de race.

Quelques mois après l’apparition du hashtag #MeToo, les publications marquées de revendications féministes ont été nombreuses. Outre Libère-toi, cyborg ! (Cambourakis), qui a donné à découvrir des autrices et héroïnes fortes de science-fiction, on songe à l’essai Ces hommes qui m’expliquent la vie (L’Olivier) de Rebecca Solnit décryptant le mansplaining. Du côté de la fiction, Que le diable m’emporte, de Mary Maclane (Editions du sous-sol), et Mais leurs yeux dardaient sur Dieu de Zora Neale Hurston (Zulma), textes rédigés respectivement en 1902 et 1937 et idéalement réédités, ont soufflé un vent salutaire d’affirmation de soi depuis des époques où c’était jugé subversif.

Publié en janvier, Les Argonautes de Maggie Nelson (Editions du sous-sol) est un texte éminemment intime qui, en interrogeant la famille à travers le prisme du genre (l’autrice est mariée au vidéaste queer Harry, autrefois Harriet), se faisait politique. On peut en dire autant de Darling Days (Seuil) de iO Tillett Wright, roman autofictionnel qui a scruté la relation de l’auteur, revendiqué genderfluid dès l’enfance, et de sa mère, flamboyante mais toxique, dans le New York des années 1970. A la rentrée, la Française Emmanuelle Bayamack-Tam proposait avec Arcadie une exploration des terreaux queer et freak. Dernières lettres de Montmartre de Qiu Miaojin (Notabilia) ou Sous les branches de l’udala de Chinelo Okparanta (Belfond) déplaçaient, quant à eux, la question LGBT dans la culture taïwanaise ou dans le Nigeria des années 1960, deux territoires et temporalités où être une femme qui aime les femmes ne va pas de soi.

A une époque où une droite extrême fait plus que s’esquisser, des Etats-Unis au Brésil en passant par l’Italie et l’Autriche, certains auteurs interrogent les méfaits de systèmes où le rejet de l’autre est (devenu) structurel. C’est le cas de Jennifer Richard, qui, dans le roman Il est à toi ce beau pays, a dressé une fresque ambitieuse et terrible de la colonisation au xxe siècle sur trois continents. Ou de Reni Eddo Lodge, journaliste et essayiste britannique qui, avec l’essai Le racisme est un problème de Blancs (Autrement), passait au crible le white privilege. En 2019, ouvrir la voix (et la voie) restera plus que jamais un enjeu majeur.

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