Les moments forts de la  » Grande Grèce « 

Réunis à Bozar, plus de cent objets historiques et oeuvres contemporaines, classés selon sept thèmes liés à la mer, esquissent la culture et la civilisation grecques à travers les siècles. Superbe !

La Beauté, Aphrodite pour les Grecs, est née en Méditerranée. C’est donc ce  » continent liquide  » qui a servi de fil conducteur pour nous expliquer la Grèce ancienne et moderne. Malgré un espace quelque peu tarabiscoté et exigu alloué à cette exposition importante, l’architecte Alexandros Xenakis a réussi à y créer une scénographie magnifique de limpidité et de fluidité où l’on déambule avec un plaisir fou ! Le parcours décline sept thèmes, présentés dans un ordre chronologique, et fait dialoguer les trésors du passé (dont certains n’ont jamais quitté la Grèce) avec les créations contemporaines.

Le voyage commence par la  » Genèse « . Immergé dans un  » utérus  » symbolisant le cycle de la vie, imaginé par Aemilia Papaphilippou, on médite à loisir sur la naissance et la mort, en compagnie d’un bruit de vagues très agréable. Le thème  » Ecologies  » nous plonge au coeur de la civilisation cycladique, la plus ancienne, située entre 2800 et 2300 avant J.-C. Deux idoles cycladiques, splendides épures antiques en marbre blanc, trônent au milieu des photos de Katerina Kaloudi. Ses agrandissements des décors de pierre des Cyclades évoquent des forêts fossilisées et interrogent la relation entre l’homme et la nature. Puis, le parcours historique nous fait suivre les  » routes maritimes « , au départ de la Crète. Cette île a été le foyer créateur d’une civilisation originale, dite minoenne, qui, pendant un demi-millénaire (1900 -1400 avant J.-C.), a rayonné dans toute la Méditerranée orientale et exercé une forte influence sur les Mycéniens de la Grèce continentale. Les Mycéniens inaugurent les mouvements transméditerranéens. Populations, marchandises mais aussi les idées naviguent dans les eaux méditerranéennes et égéennes, magnifiquement rendues par les objectifs de Stratis Vogiatzis et de Yiorgis Yerolymbos. Les clichés sont mis en résonance avec des fresques rares, comme ce pêcheur exhibant des dorades.

Le thème  » Odyssées « , lui, explore la signification éternelle du voyage, envisagé comme une expérience esthétique ou… une nécessité économique. Les oeuvres de Leonidas Toumpanos font référence à ces odyssées modernes, tandis que de très beaux objets (dont des céramiques) reflètent les influences des échanges commerciaux et cul- turels. Le cinquième thème,  » Hégémonie « , illustre l’âge d’or grec. Le pays a atteint son apogée au début du Ve siècle avant J.-C. La démocratique Athènes devient source de pouvoir et de richesse. Ici, les superbes marbres de jadis contrastent avec les sculptures en bois flotté d’Alexandra Athanasiadis. Suit le thème d’  » Ecoumène  » (oikouménè, un univers nouveau), celui de l’intégration politique et culturelle, consacré à la Macédoine et à Alexandre le Grand. Les statues en marbre et en bronze (dont un éphèbe en bronze du IVe siècle, qui quitte la Grèce pour la première fois) illustrent le goût artistique nouveau qui perdurera jusqu’à la période gréco-romaine. Le voyage se termine avec les » Croyances « . Parce que le sentiment religieux est fortement lié à la mer. On s’attarde devant la très belle installation vidéo de Marios Spiliopoulos qui met en scène les traces des croyances des marins devant l’éternel et devant l’infini de la Mare Nostrum…

Nautilus. Navigating Greece, Bozar, 23, rue Ravenstein, à 1000 Bruxelles. Jusqu’au 27 avril. www.bozar.be

Barbara Witkowska