Les grands rendez-vous du printemps

Guy Gilsoul Journaliste

De Paris à Marseille et de Bâle à Londres, de la préhistoire à nos jours en passant par de grandes thématiques comme  » La fenêtre  » ou  » Le romantisme « , voici quelques-unes des expositions du moment.

La Sucrière jusqu’au 30 juin. www.lasucriere-lyon.com

Musée Jacquemart-André jusqu’au 22 juillet. www.musee-jacquemart-andre.com

Carrousel du Louvre. Du 11 au 14 avril. www.drawingnowparis.com

Musée Marmottan Monet jusqu’au 30 juin.

www.marmottan.com

Musée du Louvre. Du 28 mars au 29 juin. www.louvre.fr

Lyon Emotions. Installations d’Erwin Olaf

Tout est beau et lisse. Trop. L’univers photographique mis en scène par le Néerlandais Erwin Olaf construit, sous l’apparence de la perfection aseptisée, une longue descente glacée vers un inconfort qui fait mouche. Pas de politique ici, mais le monde de la famille : lui, elle, l’enfant et le père, la séparation, le mensonge, l’hypocrisie, voire la cruauté. Dans un gant de velours (avec des lumières à la Vermeer), il convoque le blanc, ailleurs le noir ou encore, avec le concours de clowns et d’enfants acéphales, les couleurs criardes et l’enfer.

Paris Eugène Boudin, au fil des voyages

Fiez-vous à votre première impression qui est la bonne.  » Ce conseil d’Eugène Boudin au jeune Claude Monet sera déterminant. Mais a-t-on assez reconnu l’oeuvre du peintre normand ? Aucune exposition muséale à Paris en tout cas depuis 1899 ! S’il fut le peintre des mondanités du Second Empire venues se divertir sur les bords de mer, il demeure surtout cet oeil qui a pu traduire les diverses lumières du ciel et des reflets sur l’eau ou sur les soies et dentelles. La rétrospective met aussi l’accent sur sa capacité à renouveler son observation en fonction des lieux visités, et ce jusqu’aux ultimes voyages à Venise par exemple. A lire, le catalogue paru au Fonds Mercator.

Paris Drawing Now, le 7e Salon du dessin

Le dessin attire de plus en plus d’amateurs et sa définition échappe désormais à celle donnée par Ingres ( » il est tout sauf la teinte « ). Désormais, il cherche à expérimenter les supports autant que les couleurs, les outils et les sujets. 85 galeries au total (dont celle du Belge Pascal Polar), un focus sur la création suisse et une carte blanche donnée au directeur du Palais de Tokyo, Jean de Loisy qui avait assuré entre autres le commissariat de Traces du Sacré, au Centre Pompidou.

Paris Marie Laurencin

Rendons hommage à la perspicacité d’amateurs nippons qui surent reconnaître la sensibilité de Marie Laurencin. En effet, si ses débuts correspondent à l’heure du fauvisme, du cubisme et des ateliers du Bateau-Lavoir qu’elle fréquente, le principal de son travail est postérieur à la Première Guerre mondiale et s’inscrit dans une esthétique délicate dans l’esprit fleuri de l’Art déco. Le principal du contenu de cette première rétrospective a donc quitté pour la première fois le Japon.

Paris De l’Allemagne 1800-1939

Comment unifier des régions aux passés et aux traditions si diverses ? La question (qui est celle de l’Europe d’aujourd’hui) fut posée à ce qui allait devenir l’Allemagne. Et la réponse passa par la mise en place d’une  » Kultur « . Favorisée par le climat anti-français hérité des campagnes napoléoniennes, celle-ci construisit le  » romantisme allemand « . L’intérêt de l’exposition (avec plus de 200 pièces) tient dans l’exploration de cette identité que les nazis sauront aussi exploiter. De Friedrich à Beckmann, le parcours se divise en trois chapitres. 1. La quête d’un lien fort entre pureté classique (le rêve italien) et l’expression de la vitalité. 2. Le premier rôle offert au paysage héroïque. 3. L’humain entre  » Kultur  » et barbarie. De Kiefer en introduction à Grosz, Dix, Böcklin, Carus…

Bâle Les Picasso sont là !

Kunstmuseum jusqu’au 21 juillet. www.kunstmuseumbasel.ch

Un total de 60 toiles, des sculptures et une centaine d’oeuvres sur papier. Depuis les années 1920, collectionneurs privés et musées ont acheté des Picasso. En 1967, une levée de fonds populaire en vue d’autres acquisitions a tant touché l’artiste espagnol qu’il offrit quelques pièces. Voici donc, sur tout un plateau du musée, une véritable rétrospective à partir des seules oeuvres conservées dans la région.

Paris Soleil froid

Palais de Tokyo jusqu’au 20 mai. www.palaisdetokyo.com

L’oeuvre de Marcel Duchamp (encore direz-vous !) existerait-elle sans l’expérience du spectacle Nouvelles impressions d’Afrique écrit par Raymond Roussel ? Son credo : l’art ne peut être la projection d’une émotion ou d’une expérience vécue mais la mise en place d’une machine à faire penser. Aux côtés d’une série de créateurs (de Jules Vernes à Mike Kelley) l’invité d’honneur est un artiste de 84 ans, Julio Le Parc. A faire court, on le situerait dans le champ des recherches menées dès la fin des années 1950 par les tenants de  » l’Optical Art « . Or, dans l’exposition, s’il y a bien des mobiles, grilles, pièges à lumières et autres labyrinthes visuels, une section intitulée  » Salle de jeux  » nous rappelle que chez cet Argentin, l’oeuvre obéit avant tout à un but politique : participer, agir, ne plus subir.

Lausanne Fenêtres

Fondation de l’Hermitage jusqu’au 20 mai. www.fondation- hermitage.ch

La peinture a été définie depuis la Renaissance comme une fenêtre ouverte sur le monde. L’exposition interroge cette idée depuis le XVe siècle jusqu’à nos jours en passant par les natures mortes du XVIIe et les romantismes du XIXe. Elle met l’accent sur la façon dont la fenêtre (comme plan d’intersection d’une perspective ou comme grille) a interrogé les modernes de Bonnard à Sugimoto en passant par Mondrian, Matisse, Magritte, Delaunay, Albers, Rothko et Sudek parmi bien d’autres.

Londres Barocci, Brillance and Grace

National Gallery jusqu’au 19 mai. www.nationalgallery.org.uk

Découverte que celle de Federico Barocci, un peintre italien de la fin du XVIe siècle empreint de maniérisme et précurseur du baroque. Audacieux tant dans les choix chromatiques que dans les compositions parfois vertigineuses, l’artiste nous touche surtout par son empathie. Ses nombreux dessins valent, à eux seuls, le déplacement.

Evian Poésie, Amour et Liberté

Palais Lumière jusqu’au 26 mai. www.ville-evian.fr

Paul Eluard a 17 ans quand, en 1912, dans un sanatorium, il rencontre une jeune Russe dont il tombe amoureux. Elle s’appelle Gala. Le poète vient de naître. Après la guerre, le voilà sur un front qui lui convient : celui de la liberté. Dadaïste puis surréaliste, il devient ami avec Breton, Picasso, Giacometti, Ernst et tous les autres dont Dali qui lui ravira Gala. Eluard fut aussi le passionné des arts dits sauvages et, plus tard, le résistant que l’on sait. Une exposition à lire, voir et entendre. (Lausanne-Evian par bateau : 35 minutes).

Avignon Mirages d’Orient grenades et figues de Barbarie

Fondation Yvon Lambert jusqu’au 28 avril.

www.collectionlambert.fr

Comment voit-on l’Orient d’aujourd’hui ? Comment les artistes orientaux expriment-ils leurs préoccupations ? Qui est cet  » autre  » que nos désirs d’exotisme ont vulgarisé depuis les premiers carnets de voyages jusqu’aux images de Pierre et Gilles ? Si l’accent est mis sur l’art contemporain, l’exposition le confronte à l’orientalisme de Cabanel puis de Matisse. Du Tanger des années 1950 (avec Ginsberg, Twombly et Rauschenberg) aux révoltes de Mona Hatoum, une exposition pertinente. (cat. Actes Sud).

Paris Sous influence

Maison rouge jusqu’au 19 mai. www.lamaisonrouge.org

Créer n’est pas travailler mais explorer ce qui demeure mystérieux : l’esprit humain. La raison en serait la part infime. Pour le reste… Lynch rappelle l’importance de l’intuition, d’autres évoquent un éblouissement soudain, une ouverture abyssale, le hasard. A cet abandon (ou à cette quête), certains y perdent la raison, la santé, voire la vie. Pris par l’appel de ces horizons élargis, certains en appellent aux psychotropes. L’opium pour Baudelaire. La mescaline pour Michaux. Par ailleurs, certaines oeuvres ont aussi l’art d’emmener le spectateur hors de sa conscience. Après un chapitre documentaire, l’exposition propose une suite d’oeuvres conçues pour élargir l’état de conscience du visiteur. Enfin, des oeuvres produites sous l’effet de substances psycho-actives.

Paris Ron Mueck

Fondation Cartier. Du 16 avril au 29 septembre. www.fondation.cartier.com

Lorsqu’en 2005, l’Australien présente pour la première fois ses oeuvres au réalisme plus que troublant, les files d’attente s’allongent chaque jour que dure l’exposition. Jouant sur les échelles (de personnages démesurément grandis à d’autres à la taille de nains), ses héros expriment, sans pathos et au plus près de l’illusion du vrai, des sentiments profonds liés à la solitude ou encore à l’incommunicabilité entre deux êtres. Parfois, ils nous replongent dans l’effroi des contes de fée (La Sorcière). A d’autres moments, notre propre vécu face à notre enfant ou notre compagne. Les expositions de Mueck sont rarissimes tant l’homme, aujourd’hui basé à Londres, met du temps pour atteindre cette troublante perfection.

Londres Roy Lichtenstein

Tate Modern jusqu’au 27 mai. www.tate.org.uk

Alors que, par ses premiers sujets (la bande dessinée ou la pub) et par sa manière froide (les points de trame), le pop artiste Roy Lichtenstein hissait la culture populaire au rang de peinture d’Histoire, l’évolution de son travail révèle son talent de peintre moderne. Entendez, une oeuvre qui, revisitant cette fois les grands du siècle (Picasso-Matisse), vise une beauté apaisée et minimaliste dans ses moyens.

GUY GILSOUL

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