Un concentré d'énergie dans le creux de la main. © DR

Le thorium : l’avenir du nucléaire ?

Bastien Pechon
Bastien Pechon Journaliste

Cette petite sphère qui tient dans le creux d’une main contient suffisamment d’énergie pour répondre à l’ensemble des besoins énergétiques d’un Européen pendant sa vie entière « , expliquait Jean-Christophe de Mestral, membre fondateur de l’International Thorium Energy Committee, lors d’une conférence TedxParis en 2013. Cette sphère, c’était du thorium, un métal radioactif découvert en Norvège en 1829. Il fait partie de la même famille que l’uranium utilisé dans les centrales nucléaires actuelles. On le retrouve un peu partout sur la planète avec des concentrations plus ou moins fortes suivant les pays. On estime qu’il y a quatre fois plus de thorium que d’uranium sur Terre. Serait-ce dès lors l’avenir du nucléaire ?

Jean-Christophe de Mestral précise au Vif/L’Express qu’utiliser du thorium dans un réacteur nucléaire n’est pas une idée neuve. Elle a été émise dans les années 1960 par l’Américain Alvin Weinberg.  » L’idée était d’intégrer l’énergie nucléaire comme mode de propulsion d’un bombardier « , rappelle le physicien. Alvin Weinberg a donc développé un réacteur à combustible liquide. D’abord à base d’uranium, puis de thorium. Le projet d’avion nucléaire a été abandonné mais pas celui du réacteur civil. Il n’a cependant jamais été commercialisé. Aujourd’hui, cette technologie suscite un regain d’intérêt car elle serait plus sûre que les réacteurs actuels. Dissous dans une  » soupe  » de sels fondus, le thorium se transforme en uranium que l’on peut  » casser  » pour créer de la chaleur et produire de l’électricité. Mais lorsque la température s’emballe, cette  » soupe  » se dilate. La distance entre les atomes augmente, diminuant les réactions nucléaires. La surchauffe est ainsi évitée et le réacteur redevient sous contrôle. Dans une centrale classique, plus la température augmente, plus les réactions nucléaires s’intensifient. Le réacteur risque de s’emballer s’il n’est pas refroidi. C’est ce qui s’est passé à Tchernobyl.

A Genève, Jean-Christophe de Mestral et ses collègues du Cern (organisation européenne pour la recherche nucléaire) travaillent sur un autre réacteur. Presque identique à ceux que nous utilisons aujourd’hui. A la différence près qu’il est couplé à un accélérateur de particules. Il engendre un faisceau qui frappe en permanence le coeur du réacteur et permet aux réactions nucléaires de se produire. Pour arrêter le réacteur, il suffit d’éteindre ce faisceau.

Utiliser le thorium comme combustible permet aussi de produire moins de déchets à vie longue. Plus de 80 % de ceux qui sortent de ces réacteurs sont neutralisés en à peine dix ans. Trois cents ans pour les déchets restants. Dans une centrale classique, certains déchets ont une espérance de vie de plusieurs centaines de milliers d’années. Ils peuvent d’ailleurs être recyclés dans les centrales au thorium et ainsi connaître une vie plus courte. Au contraire des réacteurs actuels, qui ont d’abord été développés pour produire du plutonium nécessaire à la fabrication d’une bombe, ces réacteurs de nouvelle génération n’en produisent pas. Il reste à en mettre un en marche : c’est sans doute pour bientôt.

BASTIEN PECHON

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