Le pouvoir de la musique

Barbara Witkowska Journaliste

La musique a aussi la faculté de fédérer les foules et de les manipuler. Décryptage dans Music Palace, la nouvelle expo à la Fondation Boghossian.

« La musique n’est pas seulement source de délices. Mais instrument de pouvoir. La musique peut être beaucoup plus puissante et convaincante que les discours. Dans le Printemps arabe, elle a joué un rôle essentiel, beaucoup d’expressions sont nées de là « , souligne Diane Hennebert, directrice artistique de la Fondation Boghossian.

 » On a fait beaucoup d’expositions sur la musique et l’art, sur l’art et le son, mais jamais sur le pouvoir de la musique, sur l’impact qu’elle a sur la société, enchaîne Diana Wiegersma, spécialiste en art contemporain du monde arabe et iranien et commissaire de Music Palace. Elle devient une cause et une conséquence. La musique a le pouvoir de rassembler les foules et de les galvaniser. C’est un vecteur qui nous permet d’aller vers un ailleurs, une échappatoire et un outil de résistance. Les chanteurs sur la place Tahrir en Egypte, les rassemblements autour de musiciens au parc Gezi à Istanbul, les provocations des Pussy Riots à Moscou, un piano sur les barricades de la place Maïdan à Kiev… reflètent l’immense pouvoir de la musique.  »

Au travers des modes d’expression dominant l’art d’aujourd’hui (installations, photographie, dispositifs sonores et vidéo), 45 artistes illustrent comment, à toutes les époques et partout dans le monde, la musique s’immisce dans les sociétés. Et comment les pouvoirs politique et religieux s’en emparent. En Iran, il est interdit de retransmettre un concert à la radio ou à la télé, les femmes ne peuvent pas chanter devant un public masculin. Dans sa série photographique, Newsha Tavakolian montre des chanteuses bravant les interdictions. En Egypte, le président Nasser avait utilisé Oum Kalthoum pour fédérer la foule et booster sa verve patriotique autour de son projet panarabe. Toute une salle est ainsi dédiée à la célèbre chanteuse.

Dans les années 1960, l’Eglise catholique diabolise le rock. Quand elle constate son impact, elle s’en empare à son tour et défend le rock chrétien. Le collectif Ende Wieder, créé à Paris en 2009, évoque cette époque dans une superposition de 666 morceaux de rock chrétien formant ainsi une musique diabolique. De son côté, le Danois Joachim Koester médite sur la croyance répandue en Italie du Sud selon laquelle la musique aurait un pouvoir thérapeutique et en profite pour tourner un film en 16 mm. Les mouvements syncopés des danseurs, jusqu’à la transe, réutilisent la tarentelle, censée extirper les maux provoqués par la morsure d’une araignée : la tarentule. L’expo Music Palace sera marquante !

Music Palace, à la Fondation Boghossian, à Bruxelles. Jusqu’au 8 février 2015. www.fondationboghossian.com

Barbara Witkowska

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