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 » Le conseil exclusivement robotisé reste marginal « 

Les robots-conseils ont gagné du terrain ces dernières années auprès des investisseurs privés qui évoquent l’efficacité, l’indépendance et le coût peu élevé comme principales motivations à confier la gestion de leurs actifs à l’ordinateur.

La numérisation a un impact important sur presque tous les aspects de notre vie quotidienne, et le monde de la finance n’y échappe pas lui non plus. Les premiers fournisseurs de services d’investissement robotisés sont apparus aux États-Unis dans le sillage de la crise financière de 2008. En Belgique, les premiers acteurs ne sont arrivés sur le marché qu’en 2015. KeyPrivate (Keytrade Bank), BinckBank, Easyvest et Birdee étaient les pionniers, imités l’année dernière par quelques grandes banques avec Matti (KBC) et Lucy (BNP Paribas Fortis).

L’essor des robots-conseillers

Ils offrent une plate-forme numérique où un programme informatique assure le rôle de conseil pour la gestion d’un patrimoine personnel et prend lui-même toutes les décisions d’investissement. L’investisseur doit d’abord remplir un questionnaire dans lequel il définit ses objectifs, son potentiel, son horizon temporel et ses connaissances en matière financière. Sur la base de ces informations, l’ordinateur détermine son profil d’investisseur (une obligation légale), qui peut varier de défensif à dynamique. L’investisseur peut également spécifier un certain nombre de préférences thématiques, comme la durabilité, l’intelligence artificielle, etc. L’algorithme prend en compte toutes ces informations et propose un portefeuille d’investissement sur mesure.

Geert Noels:
Geert Noels:  » La gestion de patrimoine présente encore beaucoup d’opportunités en matière de numérisation et d’automatisation. « © © Stefaan Temmerman

En général, les services d’investissement robotisés investissent dans une combinaison de trackers, des véhicules boursiers qui suivent de très près la performance d’un indice boursier, d’un panier d’actions, d’obligations ou de devises. Les trackers ont leur propre cotation boursière et se négocient en permanence. Leur grand avantage réside dans le fait qu’une seule transaction suffit pour accéder à un portefeuille diversifié. De plus, les coûts de gestion sont peu élevés.

L’essor des robots-conseillers s’explique par leur structure de coûts réduite et leur seuil d’accès relativement bas. Chez Birdee, par exemple, vous pouvez entrer dans la danse à partir de 50 euros, alors que d’autres fournisseurs fixent la barre entre 10.000 et 15.000 euros. Les coûts annuels sont généralement dégressifs à mesure que le capital géré augmente, et s’élèvent à environ 1% par an. Le coût du placement robotisé est donc beaucoup plus bas que celui d’une banque privée par exemple. En revanche, le service est difficilement comparable.

MOINS INTELLIGENT QU’ANNONCÉ

Plusieurs acteurs du marché soulignent la technologie novatrice qui sous-tend leurs plateformes. Matti, l’assistant d’investissement intelligent de Bolero, la plate-forme d’investissement en ligne de KBC, proclame que son algorithme est basé sur la théorie du prix Nobel Harry Markowitz. Dans les années 1950, ce dernier a déclaré qu’un investisseur n’acceptera une volatilité plus élevée que si celle-ci est compensée par un rendement attendu plus élevé. Pour réduire à un minimum le risque du portefeuille, l’investisseur doit donc opter pour la diversification.

Cette affirmation fait froncer les sourcils à Geert Noels, fondateur, CEO et économiste en chef d’Econopolis, une société de conseil en économie financière et gestionnaire de patrimoine indépendante. « Des études ont établi que les plates-formes sont beaucoup moins intelligentes que ce qu’annoncent parfois les robots-conseillers. Les théories comme celle de Markowitz sont des cadres théoriques intéressants, mais les appliquer pour une modélisation du risque et une allocation d’actifs, c’est quand même autre chose. Pour moi, le robot-conseil n’est rien d’autre qu’un emballage commercial à la mode pour vendre des trackers. »

Mais Geert Noels ne veut pas pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain. « La gestion de patrimoine présente encore beaucoup d’opportunités en matière de numérisation et d’automatisation. L’ordinateur peut par exemple être d’une aide précieuse pour les gestionnaires de patrimoine personnels. Je crois donc absolument à la valeur ajoutée de la technologie au sein d’un modèle hybride qui combine conseils personnels et automatisés. Mais le conseil exclusivement robotisé restera plutôt marginal. »

Part de marché croissante mais limitée pour les robots-conseils

Les robots-conseillers sont déjà beaucoup plus répandus dans les pays anglo-saxons qu’en Belgique. Cependant, chez nous aussi, le nombre d’acteurs augmente régulièrement depuis quelques années. Aujourd’hui, une dizaine au moins sont déjà actifs en Belgique. Ce sont d’abord quelques petits acteurs spécialisés qui ont commencé, suivis l’an dernier par quelques grandes banques. On est loin d’un engouement dans la mesure où la part de marché est beaucoup trop faible. Selon une étude du cabinet conseil Roland Berger, les Belges ont confié environ 400 millions d’euros à des robots-conseillers en 2018. Une bagatelle au regard des 287 milliards d’euros totalisés en 2020 par le marché de la gestion d’actifs dans notre pays. Pour la plupart des observateurs, la part de marché des robots-conseillers va cependant augmenter à l’avenir.

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