» Le changement déplaît toujours « 

Le Vif/L’Express : Le principe de  » concessions  » de collections du Musée de l’armée à des sites flamands et wallons figure sur l’organigramme que vous concoctez. Quelles conséquences aura ce transfert ?

Luc De Vos : Cet organigramme est un document de travail. Depuis la fuite de la mi-janvier, il a déjà été modifié trois fois ! Ce n’est pas moi, mais le politique qui tranchera. Le ministre de la Défense n’a pas encore pris de décision concernant les projets que nous lui soumettons.

Comprenez-vous l’inquiétude que suscitent ces projets, perçus par certains comme un démantèlement du musée et une régionalisation rampante de ses trésors, voire une  » flamandisation  » ?

Le changement déplaît toujours et je constate que les francophones ont une grande susceptibilité communautaire. Si on ne fait rien, le musée va droit à la faillite. Il est dans une situation catastrophique et cela ne peut continuer. A Ypres, le Musée de la Première Guerre mondiale accueillait moins de 50 000 visiteurs en 1994. Aujourd’hui, devenu In Flanders Fields, il reçoit plus de 300 000 visiteurs venus du monde entier. Il faut avoir le courage d’agir. Je ne doute pas de la volonté du ministre Vandeput de rénover le Musée de l’armée.

Concrètement, que va-t-il décider ?

A ce jour, seule la section consacrée à la Seconde Guerre mondiale fait l’objet d’une présentation à 70 % correcte. Tout le reste est à refaire. Nous voulons proposer un parcours conçu comme un récit, le plus complet possible. Il n’est pas nécessaire d’y garder des collections en surnombre, des objets redondants présentés côte à côte. Le surplus irait ailleurs, en Flandre et en Wallonie. En revanche, il n’est pas normal qu’on ne puisse plus voir à Bruxelles certains chars, qui ont été retirés du musée pour être stockés dans des hangars à Bastogne et Brasschaat.

Les visiteurs admirent surtout l’impressionnante collection d’avions, qui couvre tout le XXe siècle. Certains de ces appareils vont-ils déménager à Coxyde, comme le suggère l’organigramme ?

L’idée serait de retirer du Musée de l’armée les plus gros avions et ceux qui se ressemblent et font double emploi. Ainsi, la Caravelle de la Sabena, suspendue dans le grand hall, n’a rien à faire là. En revanche, un avion comme le très fragile Nieuport 23, de la Première Guerre mondiale, resterait au musée. Coxyde a l’avantage de se trouver à la côte, où il y a toujours une concentration de visiteurs. Voyez le succès du musée de plein air du Mur de l’Atlantique, à Raversijde. Reste à trouver un accord avec la commune de Coxyde, sachant que la Défense abandonnera sans doute en partie la base militaire.

D’autres pistes sont envisagées en Flandre et en Wallonie ?

A Bourg-Léopold, en Limbourg, la commune pourrait racheter l’une des casernes de la base pour en faire un musée où des fusils, des sabres, des masques à gaz… du Musée de l’armée prendraient place. Il existe déjà un musée régimentaire à Bourg-Léopold, installé dans l’ancien hôpital militaire du XIXe siècle, mais les objets y sont mal exposés. Côté wallon, un musée des fortifications et du Génie militaire belge aurait toute sa place dans la citadelle de Namur. Il existe déjà, à Jambes, un musée qui retrace l’histoire du Génie militaire belge et dispose d’une belle collection, mais il accueille à peine 700 visiteurs par an.

Quel est votre rôle exact dans le projet de restructuration du musée ?

Je ne suis pas seul à plancher sur cette rénovation. Je m’en occupe avec le général Baudouin Somers (NDLR : cet Anversois préside le Mémorial de Breendonk depuis 2011 et vient d’être nommé président de l’Institut des vétérans-Institut national des invalides de guerre), Michel Jaupart, administrateur général ad interim de l’Institut des vétérans, et Christine Van Everbroeck, directrice ad interim du Musée de l’armée. Je signale à ceux qui voient du communautaire dans ce dossier que les deux derniers sont francophones.

Entretien : Olivier Rogeau

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