L’amour en fuite

Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

Le réalisateur de Je ne suis pas là pour être aimé, Stéphane Brizé, signe avec Entre adultes une suite de variations piquantes sur le couple et le décalage amoureux

Avec ses interprètes Patrick Chesnais et Anne Consigny, Stéphane Brizé est le héros d’une des plus belles histoires récentes du cinéma français : celle d’un tout petit film devenu, à la surprise générale, un immense succès. Je ne suis pas là pour être aimé marqua la saison 2005-2006, obtenant une très rare unanimité publique et critique dont le jeune réalisateur est encore auréolé à l’heure où sort son nouveau film, Entre adultes. Mais s’agit-il réellement d’un  » nouveau  » film ? Oui et non…

 » C’est une drôle d’histoire, sourit Stéphane Brizé, car Entre adultes a en fait été tourné avant Je ne suis pas là pour être aimé ! J’étais au fin fond de la déprime parce que personne ne voulait financer ce dernier, quand on m’a proposé un travail d’une dizaine de jours, une sorte d’atelier, que je dirigerais pour une dizaine de comédiens qui n’avaient jamais fait de film. J’avais carte blanche, six jours d’écriture et de répétition, et quatre jours de tournage.  »

S’il avait écrit Je ne suis pas là…  » pour partager cette émotion, que suscitent en moi les traces que le temps et la vie qui passent laissent sur chacun d’entre nous « , le réalisateur a voulu cette fois  » filmer la naissance du sentiment amoureux, la fin d’une histoire, le moment où l’on choisit une histoire ou une autre « . Très vite, il a senti que l’émotion vécue par ses jeunes interprètes inexpérimentés, la justesse de leur jeu, pourraient faire  » un vrai film « , et toucher un public. Le triomphe inattendu de Je ne suis pas là pour être aimé a permis au fruit éphémère d’un atelier de trouver sa place sur nos écrans. Et aux spectateurs de savourer les variations douces-amères de quelques vies de couple liées et déliées au fil d’une chaîne qui s’inscrit habilement dans le principe de La Ronde de Schnitzler (1).

 » Le succès rend les choses plus faciles, et c’est là que vous devez manifester une exigence personnelle dix fois supérieure, relève le cinéaste, lucide, tant les autres se montrent moins exigeants avec vous.  » Avec sa tendance à marier  » rigueur et pu-deur « , Brizé ne semble pas courir de grand risque de sombrer dans le n’importe quoi ou la facilité d’une répétition. Le petit miracle imprévisible d’Entre adultes s’inscrit évidemment dans une démarche dénuée de calcul, et dont on attendra la suite avec grand intérêt.

(1) Un personnage en rencontre un autre, qui en rencontre un autre, qui en rencontre un autre… jusqu’à ce que la boucle finale nous fasse retrouver le premier.

Louis Danvers

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