La scène et la machine

De Maubeuge à Mons, le festival des arts de la scène Via joue plus que jamais du virtuel, de l’illusion et du robot. Mais l’homme veille… Emotions et sursauts garantis

Via, au Manège de Maubeuge, du 18 au 29 mars. Prix : de 3 à 10,50 euros. Pass Via (soit 12 spectacles, mini-performances, expos…) : 40 euros. Tél. : +33 3 27 65 65 40, et 065 39 59 39. Site : www.lemanege.com

L’une est belge et l’autre, française, mais elles sont éloignées d’à peine 20 kilomètres. Entre Mons et Maubeuge, un homme a jeté une passerelle de plus en plus solide : administrateur du Manège, à Maubeuge (scène nationale), aux côtés de son directeur, Didier Fusillier, et également intendant de la culture à Mons, Yves Vasseur travaille au premier centre culturel transfrontalier d’Europe. Une étiquette fédératrice pour un ensemble de spectacles qui se partagent entre les deux villes ?  » C’est un symbole dans la construction européenne, explique Yves Vasseur. Deux villes qui n’ont pas les mêmes politiques culturelles mettent de côté leur propre régionalisme et travaillent ensemble : sur le plan économique, il y a là un signe à donner aux entrepreneurs. Cette région, le Grand Hainaut, déshéritée (et pour un certain temps encore, personne n’a de baguette magique !), a un rôle d’avenir à jouer au c£ur de l’Europe du Nord. Des analystes sérieux voient l’émergence, dans quinze à vingt ans, d’un nouveau croissant fertile entre Londres, Amsterdam, Stuttgart… Nous sommes en plein dedans, dans un réseau de communications extraordinaire. Il faut en saisir les opportunités et c’est jouable : nous le prouvons sur le plan des arts de la scène.  »

Loufoques bestioles

A chaque printemps, depuis dix-sept ans, le festival Via se déploie, et se précise sous l’étiquette de  » festival international théâtre, danse, arts électroniques « . Créé au Manège, à Maubeuge, il a dès 1990 tissé des relations privilégiées avec Charleroi-Danses, le Grand-Hornu, le Pass de Frameries et, aujourd’hui, avec Mons. S’il saute par-dessus les frontières, Via renverse aussi d’autres cloisons entre les arts et les technologies : pas un spectacle ou performance(mot peut-être plus adéquat) qui ne mange à plusieurs râteliers formels, et les meilleurs d’entre eux réussissent l’équation de rendre plus riche encore la relation au spectateur, par le truchement de la machine, de la console à l’écran. Le risque de  » gadget  » bien emballé existe ; Yves Vasseur ne le nie pas. C’est le corollaire du pari de la création. Via 2003 mise sur Berlin, la Slovénie (en pointe dans tous les festivals !), le Canada, les Etats-Unis, les Pays-Bas, la Grande-Bretagne et ses inusables marionnettes de Faulty Optic dans leur nostalgie du paradis perdu…, et la Belgique, où des scènes radicalement différentes se télescopent : Moscou nuit blanche,création de Thierry Debroux et le télescopage du cinéma et du théâtre manipulé par Wayn Traube dans Maria-Dolorès.

 » Nous voulions, dès le début, une ouverture aux formes novatrices des scènes internationales, pousuit Yves Vasseur. On s’est aperçu que nombre de metteurs en scène et de chorégraphes s’intéressaient à l’image virtuelle et à une technologie de plus en plus pointue. Ce sont les artistes eux-mêmes qui ont orienté la spécificité du festival. Et, depuis deux ans, nous avons à Maubeuge un outil de création pour ce type d’ingénierie, un vrai studio d’images et de sons, non pour réaliser des films mais pour donner un outil à des artistes de la scène qui le demandent. Ainsi, la chorégraphe Michèle Noiret fera ici, la saison prochaine, les images du spectacle qu’elle répétera au Manège. Un projet s’élabore pour développer à Mons un complément de cet outil.  »

Via 2003 se condense sur dix jours. Pas question de souffler, les spectacles s’enchaînent, et, quand la scène se repose, les robots vous défient. Plaisanterie ?  » Un petit débordement ludique pour un large public « , précise Vasseur. Les expositions de robots d’artistes ont séduit petits et grands à Créteil (lieu d’un autre festival, Exit, imaginé par le même Didier Fusillier). De belles et loufoques bestioles, en troupeau, ou en solitaires, peintres ou musiciens… Des machines en métal ou en ceps de vigne ? De nouveaux E.T. à cajoler ?

Michèle Friche

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