La grande peur des coptes

La minorité chrétienne s’inquiète des violences d’origine confessionnelle depuis la révolution. Elle redoute l’avènement d’un pouvoir islamiste.

DE NOTRE CORRESPONDANT TANGI SALAÜN

DE NOTRE CORRESPONDANT TANGI SALAÜN

Ils brandissent des croix comme d’autres tendent le Coran, crient leur colère, appellent au secours.  » On demande la protection de l’Amérique et de l’Europe « , s’époumone Mina, 23 ans. Comme lui, des centaines de coptes – ces chrétiens présents en Egypte depuis le IIIe siècle – campaient toujours devant le bâtiment de la radio-télévision d’Etat, plus d’une semaine après la mort de 15 personnes, le 7 mai au Caire, dans des affrontements confessionnels. Mina a traversé le Nil depuis le quartier populaire d’Imbaba, où les violences ont éclaté après une simple rumeur selon laquelle une chrétienne convertie à l’islam était séquestrée dans une église. Une manifestation organisée par des salafistes, radicaux islamistes, a dégénéré en fusillade, puis en véritable bataille rangée.

Les autorités ont dénoncé un  » complot contre-révolutionnaire  » et arrêté des membres de l’ancien parti d’Hosni Moubarak, aujourd’hui dissous. Mais cela n’a pas apaisé la minorité copte (6 à 10 % de la population), inquiète de la montée des violences depuis la révolution.

 » Les coptes se sentent abandonnés, il faut leur témoigner notre soutien « , a appelé sur Twitter Gigi Ibrahim, une des figures de la coalition des jeunes pour la révolution.  » Des musulmans qui nous soutiennent ? On n’en voit pas beaucoup ici « , grimace Michael, 22 ans, un Christ tatoué sur le bras droit, une croix peinte sur le visage.

 » Ils veulent transformer l’Egypte en un nouvel Iran « 

Les coptes réclament la fin de l’impunité. Ils veulent être rassurés avant les élections législatives de septembre, dont ils redoutent de voir les Frères musulmans, seule force politique organisée, sortir vainqueurs. Une crainte attisée par le rassemblement de 50 000 manifestants venus réclamer, au lendemain des affrontements d’Imbaba, la création d’un  » Etat islamique « .  » Les islamistes veulent transformer l’Egypte en un nouvel Iran ou Afghanistan « , affirme Michael.

L’amertume des jeunes coptes est d’autant plus grande qu’ils ont largement pris part à la révolution, malgré les réticences de leurs aînés, qui ont longtemps vu en Moubarak un rempart contre l’intégrisme, et les appels de l’Eglise à rester chez soi.  » On a protégé les musulmans pendant qu’ils priaient sur la place Tahrir. Ils étaient où, les salafistes, à ce moment-là ?  » s’emporte Mina.

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