Joe Sacco, star du journalisme BD

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Le Vif/L’Express entame, cette semaine, Le Projet Nostradamus, un récit inédit signé Joe Sacco. Il est extrait de 12 Septembre, l’Amérique d’après, un album collectif qui sortira fin août.

Né à Malte en 1960, Joe Sacco est diplômé en journalisme de l’université de l’Oregon (Etats-Unis). Voyageur infatigable, il s’intéresse à la guerre du Golfe et découvre le Proche-Orient. De ce séjour naît une série de reportages BD regroupés sous le titre Palestine et récompensés d’un American Book Award en 1996. Sacco réitère cette expérience de journalisme BD lors de la guerre en Bosnie (l’album Gorazde). Depuis 2005, il publie dans le Guardian et le Harper’s Magazine de courts récits BD sur la guerre en Irak. En 2010 paraît Gaza 1956, en marge de l’histoire (Futuropolis), récompensé par le prix Regards sur le monde, au dernier festival d’Angoulême.

Dans l’album collectif 12 Septembre, l’Amérique d’après, qui sortira fin août chez Casterman, il signe Le Projet Nostradamus, récit que Le Vif/L’Express vous propose en exclusivité dans les pages qui suivent.

RENCONTRE AVEC ENKI BILAL

Enki Bilal est l’auteur de la couverture de l’album 12 Septembre. Il évoque le choc des attentats du 11-Septembre 2001.

Rendez-vous avec Enki Bilal sur le toit du palais du Trocadéro, à Paris. En face, Madame Eiffel joue les coquettes, irradiée par un coucher de soleil de carte postale. C’est pour parler de deux autres tours, celles aujourd’hui disparues du World Trade Center de New York, que nous retrouvons l’auteur de l’album mythique Partie de chasse et du film Bunker Palace Hôtel.

Le drame du 11-Septembre, Bilal l’avait plus ou moins suggéré dans Le Sommeil du monstre (le premier volume est paru en 1998). Traversés par l’Histoire, ses scénarios sont le produit d’une réflexion sur les déchirements nationalistes et la menace de l’intégrisme. Un mini-récit signé Bilal aurait donc eu toute sa place dans l’album collectif 12 Septembre, l’Amérique d’après.

 » Accaparé par l’achèvement d’un nouvel album, j’ai dû limiter mon implication à la couverture de l’ouvrage « , indique-t-il. Son dessin montre des victimes suspendues dans le vide et des avions immobilisés.  » Les gros plans sur les gens qui se sont jetés des fenêtres des Twin Towers, le 11-Septembre, sont parmi les images d’actualité les plus violentes jamais vues, estime Bilal. Comme beaucoup, je ne suis pas sorti indemne de cet état de sidération. Dans mon dessin, j’ai voulu évoquer cette scène choquante tout en l’effaçant. On remonte le film : il n’y a plus de chute, mais une lévitation. Le mouvement se veut apaisant. « 

Dix ans après les événements, l’exécution de Ben Laden referme-t-elle un cycle ?  » Cette élimination n’est pas à la hauteur de la catastrophe du 11-Septembre, assure-t-il. C’est une petite mort. On s’est débarrassé d’un symbole, mais le mal est fait.  » Bilal constate que l’Amérique perd peu à peu le leadership mondial, mais ne veut pas accabler Barack Obama.  » Qui ferait mieux que lui ? Le système actuel rend impossible la pratique du pouvoir. Assailli par les urgences, ce président est chargé de capteurs, d’alarmes qui sonnent toutes en même temps. « 

Qu’est-ce qui inquiète le plus, aujourd’hui, l’auteur des Phalanges de l’Ordre noir ?  » Nous sommes de plus en plus informés, mais notre monde est toujours plus imprévisible, répond-il. La planète ressemble à un être malade, secoué de convulsions.  » Ses derniers récits ( Animal’z, Julia et Roem), en rupture avec ses £uvres précédentes axées sur la géopolitique et l’obscurantisme, illustrent précisément, sous forme de fable, l’idée d’un monde en recomposition permanente. –

à suivre…

Olivier Rogeau

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