Irak Chimères sunnites

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

L’intégration des sunnites au processus politique irakien est amorcée, mais leurs revendications risquent d’être vite déçues

Les tractations politiques ont débuté à Bagdad, alors que les principaux leaders sunnites crient à la fraude après la publication des résultats partiels des législatives du 15 décembre. Certes, ce scrutin, dernière étape du calendrier de transition, s’est déroulé dans un calme relatif. Et la participation a été large, dans toutes les régions. C’est une première pour le nouvel Irak. Car les sunnites, qui avaient boudé les urnes en janvier, se sont déplacés nombreux pour voir leur communauté réintégrer le processus politique. Mais ce succès, qui peut apparaître comme un désaveu du terrorisme, ne signifie pas pour autant la fin de la quasi-guerre civile qui déchire le pays.

Premier constat : le vote des Irakiens a été communautaire, la liste laïque de l’ex-Premier ministre chiite Iyad Allaoui, qui plafonne à 14 % des voix, n’étant pas parvenue à surmonter les clivages. Mais, surtout, les principales revendications des sunnites – réforme de la Constitution, contrôle du ministère de l’Intérieur, retrait rapide des troupes américaines – risquent d’être peu entendues. Les composantes nationalistes de la guérilla ont d’ailleurs déjà fait savoir que la lutte armée se poursuivrait aussi longtemps que des forces étrangères occuperaient l’Irak.

Une certitude, l’alliance des partis religieux chiites dominera le futur parlement, appelé à choisir une présidence collégiale et un chef de gouvernement. Les sunnites espèrent néanmoins peser dans cette assemblée élue pour quatre ans et où vont se négocier, ces prochains mois, des amendements à la Constitution adoptée par référendum le 15 octobre. Le texte instaure un Etat fédéral pour remplacer le système hypercentralisé imposé au temps du raïs déchu. Mais la plupart des sunnites ont dénoncé un projet qui, selon eux, porte en germe la partition de l’Irak. Faute d’un consensus sur le fédéralisme, la réconciliation nationale, ébauchée ces dernières semaines, restera un v£u pieux. Soucieux d’éviter la contagion chiite, certains pays arabes, Egypte et Arabie saoudite en tête, vont probablement intensifier les pressions pour encourager l’intégration politique d’une majorité de sunnites. Ce qui ne va pas forcément réduire les tensions entres communautés, exacerbées par la multiplication des assassinats à caractère confessionnel.

Olivier Rogeau

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