Haute couture psychique

On dit qu’ils sont silencieux, trop peu actifs ou interprétatifs, on les imagine derrière leur divan répondre des  » mmh  » lassants et, depuis quelque temps, on vous distille l’idée qu’ils sont aussi des charlatans. Leur formation est floue, lit-on.

Avec cette caricature, on vous construit une image toute faite du psychanalyste, image qui ne vous permettra plus de voir que les psychanalystes sont des personnages particuliers, tous différents, non formatés, hors normes. Qu’ils ont travaillé pour faire de leurs différences et de leurs particularités des qualités, qu’ils savent que chaque humain en souffrance qui vient les voir est une exception. Qu’en choisissant de n’avoir recours à aucune méthodologie prédéfinie ils devront réinventer pour chaque cas leur manière d’intervenir (inconfortable !). Que ce qu’ils diront à Mme X ne vaudra jamais pour Mme Z, pourtant toutes deux anorexiques. Qu’ils savent, dans leur âme (psyché) et dans leur corps, ce que veut dire le transfert, l’angoisse, la culpabilité, la honte et la découverte de l’inconscient. Eux-mêmes passant, pour pouvoir pratiquer, de longues années (plus d’une dizaine : inconfortable !) sur le divan d’un collègue aîné. (…)

Les grandes écoles de psychanalyse (freudiennes ou lacaniennes) ont élaboré depuis des années des procédures complexes de vérification de la formation. Elles ne s’entendent peut-être pas sur tous les points à ce sujet mais, ce dont on peut être sûr, c’est qu’il s’agit toujours d’exigences beaucoup plus élevées que ne le seront jamais celles d’une formation universitaire. Qu’au moment de décerner la reconnaissance du titre, toutes ces écoles s’assurent surtout que le candidat a non seulement un parcours de formation suffisant, mais qu’il a surtout acquis la conviction qu’il ne pourra plus jamais cesser de se former. On ne s’installe pas psychanalyste, on le devient et surtout on le soutient ! (…)

Contrairement à d’autres pratiques psy, la psychanalyse n’a pas pour objectif de faire rentrer les patients dans la norme, dans le monde du prêt-à-porter mais, au contraire, elle met l’analysant en place de se créer un habit de soi sur mesure. Haute couture du travail psychique loin d’être aussi coûteuse qu’on veut le faire croire et loin de rester confinée dans les soi-disant somptueux bureaux que nous sert le cinéma. Les psychanalystes sont aussi sur le terrain, dans les institutions de soins pour enfants psychotiques, toxicomanes, les hôpitaux psychiatriques car ils savent, grâce à Freud, que c’est en côtoyant le pathologique que l’on peut aussi comprendre plus aisément le normal.

Katty Langelez, psychologue et psychanalyste (membre de l’Ecole de la cause freudienne)

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