Grève surprise sur eBay

Le boycottage du célèbre site d’enchères par ses utilisateurs révèle la crise de croissance du groupe eBay.

Zéro enchère, zéro achat « . Le mot d’ordre a fusé sur Internet à la vitesse d’une injure de Nicolas Sarkozy. Pour la première fois depuis sa création en 1995, le magasin virtuel eBay a essuyé un mouvement de grève, non pas de ses 16 000 salariés, mais de dizaines de milliers de vendeurs, utilisateurs réguliers du site. C’est l’annonce de plusieurs changements par les dirigeants du groupe, le 29 janvier, qui a mis le feu aux poudres. De nouvelles mesures tarifaires, d’abord : le pourcentage ponctionné par eBay augmente de plus de 3 % sur la vente de certains objets. Ce sont surtout les gros vendeurs qui en seront pénalisés. Lorsqu’on sait que plus de 170 000 internautes vivent de leurs ventes sur eBay, cela fait du monde qu’on risquait de mécontenter.

eBay préfère les  » powersellers  » aux puces

Mais la réforme la plus critiquée est celle du feedback. Jusqu’à présent, vendeurs et acheteurs s’évaluaient les uns les autres : un système de régulation interne, propre à Internet, permet de discipliner la communauté eBay. Mais les dirigeants du site affirment que les acheteurs n’osent plus critiquer les vendeurs de peur de subir des représailles au moment de leur propre évaluation. Ils ont donc décidé de favoriser les acheteurs en supprimant les avis négatifs ou neutres des vendeurs à propos des acheteurs. Une mesure jugée injuste par les vendeurs. D’où le boycottage du 18 au 25 février. Le mot d’ordre a été lancé via une vidéo sur YouTube, visionnée près de 150 000 fois en deux semaines. Les grévistes ont aussi fait circuler des pétitions en ligne, créé une page sur MySpace et alimenté des discussions sur les forums.

Difficile, pour l’heure, de mesurer l’impact de ce mouvement sur le chiffre d’affaires d’eBay. Il faudra attendre les résultats trimestriels du groupe, à la mi-avril. Il s’agit en tout cas d’un coup de semonce pour le nouveau directeur général, John Donahoe, qui succédera officiellement, à la fin mars, à Meg Whitman. Face aux stagnations des ventes sur eBay à 1,5 milliard de dollars (dernier trimestre de 2007), Donahoe avait déclaré, au début de l’année, qu’il voulait dépasser la  » culture de marché aux puces « . Le site d’enchères cherche, en effet, à freiner l’hémorragie de ses  » powersellers « , ses plus gros vendeurs professionnels, qui créent leur propre boutique en ligne une fois qu’ils se sont fait connaître sur eBay. Révélateur : en France, le groupe a conclu un partenariat, début février, avec Oxatis, la plate-forme de création de sites marchands. Objectif : maintenir les bases de données des  » powersellers  » sur eBay.

Thierry Denoël

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