Fatal attraction

Après une série d’échecs au cinéma, Michaël Youn revient en grande forme comique dans un film où il reprend son personnage de Fatal Bazooka, rappeur iconoclaste et fanfaron bling-bling. Ce qui mérite une mise au point.

Attablé à la terrasse d’un grand hôtel parisien, l’homme est serein. L’accueil critique de son premier film en tant que réalisateur, Fatal, comédie déjantée sur la descente aux enfers d’une star du hip-hop, est unanimement positif. Habitué à être décrié par la presse, Michaël Youn, 36 ans, ex-animateur incontrôlable, acteur chéri des 13-17 ans, n’a pourtant pas le sentiment d’avoir changé. Il verse toujours dans la surenchère, montre encore ses fesses, se moque de tout et parodie à tour de vannes. Il n’en a pas marre ?

Le Vif/L’Express : Vous êtes devenu une vedette en animant le Morning Live sur M 6, en montant sur scène et en écrivant des tubes parodiant le hip-hop. Il n’y a guère que le cinéma qui vous résiste, notamment quand vous vous essayez au drame comme dans Héros, en 2007. Vous n’en avez pas marre ?

Michaël Youn : Oui, mais il faut s’entendre sur le mot échec. Héros, par exemple, n’a pas marché, mais j’en reste très fier. Et puis tout le monde ne rencontre pas son Claude Berri pour lui faire tourner Tchao pantin. Reste que je n’ai pas compris le rejet médiatique sur Héros. Je savais que le grand public ne suivrait pas, mais je m’attendais à un accueil critique et cinéphile chaleureux. Non seulement cela n’a pas été le cas, mais le peu de gens qui se sont déplacés croyaient voir une comédie. Ils ont évidemment été déçus.

Et dans le cas de Coursier, sorti tristement en 2010 ?

Je ne le perçois pas comme un échec public, car il est sorti dans l’anonymat. Ce que je souhaitais, d’ailleurs. J’avais envie de rentrer dans une certaine normalité, comme Jacques Gamblin : jouer dans un film auquel peu de gens s’intéressent, quelque chose de dépassionné qui ne nécessite pas de gros moyens marketing et ne provoque pas la haine des journalistes. Au demeurant, la presse a plutôt épargné Coursier et a même salué mon travail. Le véritable échec, à mon sens, ce fut Incontrôlable [Raffy Shart, 2006]. Pas vraiment un bide public humiliant – autour de 900 000 entrées – mais au-dessous de son potentiel. Et très décrié par la critique. J’y croyais, pourtant. Et puis je l’ai revu il y a peu. C’est effectivement nul.

Vous n’en avez pas marre du bling-bling ?

Fatal se veut l’enterrement du bling-bling, justement. Ce bling-bling qu’on condamne tellement en France et qui coûtera peut-être le deuxième quinquennat du président de la Républiqueà On croit, dans ce pays, aimer l’humilité. En réalité, on n’aime que l’arrogance. Pour rester dans le cinéma, on préfère se réclamer des valeurs véhiculées par Bienvenue chez les Ch’tis, alors qu’une majorité jalouse la réussite d’un personnage comme Coco.

Vous n’en avez pas marre de montrer vos fesses ?

Je suis déçu que la question n’arrive qu’en troisième position. Si, j’en ai un petit peu marre d’être toujours épinglé là-dessus. Contrairement à une idée reçue, je ne me mets pas systématiquement à poil. Dans Fatal, c’était nécessaire. Cela participait à l’autodérision. Et puis, à vrai dire, cette paire de fesses, je ne peux rien lui reprocher. L’avoir montrée aux 7 d’or m’a valu une étiquette très dure à décoller, mais également très visible. Désolé, mais je dois tout à mon cul ! Sans lui, je ne serais pas là à donner une interview. Montrer son derrière comme je l’ai fait dès mes débuts dans le Morning Live, c’est une manière radicale d’aborder l’humour et la nudité.

A l’époque d’Iznogoud, on vous reprochait vos cachets démesurés. Vous en avez eu marre ?

Un peu, car, si j’ai eu des années où j’ai très bien gagné ma vie, j’étais loin des poids lourds de la profession. Etant nouveau, j’étais juste dans la ligne de mire. Personne ne comprenait comment je pouvais toucher autant que Jacques Gamblin – oui, je cite souvent Jacques Gamblin. Mais je n’ai pas l’impression d’avoir volé quoi que ce soit. Sur Iznogoud, je gagne autour de 400 000 euros. Ce n’est pas indécent. Sur Incontrôlable, je touche beaucoup plus, mais c’était une sorte de bonus pour services rendus de la part de la production : mes deux films précédents chez Pathé, dont Les 11 Commandements, qui avaient coûté seulement 250 000 euros, avaient fait 3 millions d’entrées. Et, pour répondre plus précisément à votre question, je n’ai aucune honte à vouloir gagner de l’argent.

Vous n’en avez pas marre de ne plus animer d’émission de télé ?

Un peu. J’aimerais animer un show en troisième partie de soirée. J’ai même le titre : Le Tard Tard Show ! Mais je n’ai plus vraiment le temps. Je suis déjà en train de préparer mon deuxième film comme réalisateur. Une comédie autour du sport, qui se déroule en 2014, époque à laquelle le foot est boycotté par le public, car il y a trop de prostitution et de gros salaires, mais aussi le rugby à cause des troisièmes mi-temps qui dégénèrent et le tennis à cause de la cocaïne. Du coup, un sport totalement débile rafle la mise. Et je ne dis pas lequel.

Le curlingà

Mince ! Vous avez deviné ! Ben oui, c’est ça.

De quoi avez-vous vraiment marre ?

De pas grand-chose, en fait.

Propos recueillis par Christophe Carrière

 » je n’ai aucune honte à vouloir gagner de l’argent « 

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