[EXTRAITS]

Dans le courant du mois de décembre, la contre-offensive allemande dans les Ardennes allait faire en sorte que les tensions entre les Alliés soient à nouveau à leur comble et qu’il faille revoir les plans. Une réorganisation du front fut nécessaire pour repousser l’ennemi. Tant en ce qui concernait la recherche des causes de l’offensive allemande que lors de l’établissement du planning, les Britanniques et les Américains n’étaient pas toujours sur la même longueur d’onde. L’offensive des Ardennes dura environ six semaines, jusque fin janvier 1945. A ce moment-là, le front allié serait rétabli comme à l’origine. Les combats intenses ne constituèrent pas à eux seuls un important chapitre dans l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, car le fait qu’une rupture fondamentale et irréparable soit survenue au sein de la coalition des Alliés fut tout aussi essentiel […].

Offensive allemande dans les Ardennes

Le premier objectif des Allemands était les dépôts de Liège, pour s’approvisionner en carburant. Grâce à cela, ils pourraient se rendre à Namur où était établi le centre de communication des Alliés. Enfin viendrait le tour de Bruxelles et d’Anvers. Par la même occasion, l’ennemi enfoncerait un coin entre les armées alliées. Cependant, il apparut immédiatement qu’Hitler avait sous-estimé la flexibilité dans le schéma de commandement des Alliés. Eisenhower contra l’offensive ennemie en mutant des armées, même s’il devait s’attirer la colère de ses propres généraux […].

Eisenhower avait décidé de donner temporairement à Montgomery, outre son commandement de la 2e armée britannique et de la 1re armée canadienne, celui de la 1re et de la 9e armées américaines dans la partie nord des Ardennes. Selon le haut état-major, le général Bradley ne pouvait en effet qu’avoir une maîtrise insuffisante des combats dans la partie nord des Ardennes puisque son quartier général se trouvait à Luxembourg […]. Montgomery reçut un coup de fil lui annonçant que les deux armées américaines étaient sous son commandement. Cette décision allait avoir des conséquences pour le restant de la guerre et engendrerait une nouvelle crise dans la collaboration des Alliés […].

Au QG de Bradley, l’anglophobie atteint des sommets

D’après Patton, Eisenhower avait perdu confiance en Bradley ou il s’était laissé influencer par Churchill. Patton ne croyait pas un mot de l’argumentation d’Eisenhower quand il annonçait avoir pris cette décision en raison des difficultés de communication et à cause de la distance entre le général Bradley et les deux armées […]. Bradley considérait cette décision du haut commandement comme une expression de peur et Montgomery  » menait fermement les Yankees par le bout du nez « . Selon Bradley, Monty avait forcé la décision du changement de pouvoirs en présentant la situation aux Américains de façon bien pire qu’elle était […]. Bradley n’acceptait pas d’avoir à ne jouer qu’un second rôle durant l’offensive des Ardennes et à son quartier général l’anglophobie atteignait des sommets. Il craignait aussi que les soldats et la population américaine au pays puissent interpréter ce fait comme s’il était un commandant incompétent […].

Le général Marshall, chef d’état-major de l’armée américaine, déclara plus tard à propos de ce changement de pouvoirs :  » J’acceptai alors cette décision comme une réaction logique d’Eisenhower. Plus tard, je la regrettai parce que Montgomery ne jouait pas le jeu honnêtement. Il essayait d’en tirer un profit politique et de porter atteinte aux généraux Eisenhower et Bradley avec l’aide de la presse. Il n’agissait pas comme on l’attendait de lui. De plus, il y avait le problème récurrent qu’il négligeait d’assister aux réunions. Eisenhower devait venir à lui et ce n’était pas correct. Il fit paraître erronément dans les journaux que sa désignation était la conséquence de ses qualités supérieures de commandant. C’était bien davantage une façon d’arriver à une meilleure communication entre les différentes armées…  » […]

La stratégie défensive de Montgomery critiquée par Patton

Montgomery fit savoir à Eisenhower et à Bradley qu’il commencerait seulement le 3 janvier 1945 à contre-attaquer dans le nord avec la 1re armée américaine parce qu’il préférait réorganiser sa défense et la renforcer. Il voulut même se retirer, ce que Hodges très tourmenté et son état-major refusèrent de faire. Montgomery était d’avis qu’une position défensive était indiquée à cause de la faiblesse de la 1re armée. Il trouvait futile l’offensive de Patton et estimait que celui-ci n’avait qu’à se retirer jusque dans les Vosges et même dans la Moselle pour pouvoir alors céder des divisions à Hodges. D’après le scénario de Monty, l’armée américaine devait reculer, se regrouper et attaquer environ trois mois plus tard […]. Le général Bradley était au bord du désespoir. Patton écrivit à ce propos dans son journal :  » C’est dégoûtant.  » Les Américains restaient partisans d’une action offensive. L’attitude de Montgomery frappait Bradley de stupeur. A plusieurs reprises, il demanda au haut commandement de pousser Monty à l’action. Il en arriva à l’amère conclusion que ses supérieurs ne se préoccupaient pas du déroulement des combats […].

Lorsque Montgomery apprit qu’au plus haut niveau il était question de le remplacer, en raison de son arrogance, par le général britannique Alexander, plus affable, il fit marche arrière. La situation était en train d’échapper dangereusement à son contrôle pendant les derniers jours de 1944 […]. Le 29 décembre, le général Marshall interrompit son silence et fit savoir à Eisenhower que l’opinion publique américaine n’accepterait jamais que Montgomery devienne commandant de toutes les troupes au sol […]. Ike commençait maintenant à perdre confiance en Montgomery et, dans une ambiance devenue méfiante, il était bien sûr difficile de lui accorder des troupes américaines […].

Monty, sauveur de la situation dans les Ardennes ?

Dans la presse britannique avaient paru des informations selon lesquelles Montgomery avait sauvé seul la situation dans les Ardennes. Le chef d’état-major de l’armée américaine, le général Marshall, écrivit le 30 décembre 1944 à Eisenhower :  » Si vous aviez pu lire dans la presse britannique quelque chose à propos des tentatives d’un Anglais d’accéder à la tête des troupes au sol, alors nous insisterions très fortement pour que vous ne fassiez aucune concession […]. Les Américains prenaient le soutien excessif de la presse britannique à Monty comme une gifle en pleine figure. Les pensées des Alliés étaient dominées par des sentiments de méfiance et de colère […].

Aux Etats-Unis, on lisait dans les journaux que l’intervention américaine en Europe avait déjà fait 457 000 victimes alors que les combats faisaient encore rage et que les autorités restaient vagues sur la date à laquelle la guerre pourrait se terminer. La presse se demandait comment une nation presque vaincue comme l’Allemagne était encore en état de passer à une telle offensive dans les Ardennes. On commença aussi à enquêter sur les stratégies de la confédération alliée et à étudier les combats depuis la Normandie jusque dans les Ardennes afin de trouver d’éventuelles explications […].

Début février 1945 se tint à Bastogne une rencontre entre Eisenhower, Bradley et Patton. Il n’y eut de la part de Ike aucun compliment direct à propos de leurs réalisations. Patton était si amer qu’il en conclut qu’Eisenhower voulait seulement être photographié dans les ruines de la ville.  »

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