Des soutiens décisifs dans l’épreuve

Martens et Dehaene ont pu compter sur l’action cruciale d’hommes de l’ombre et de puissants réseaux pour remporter la partie. Van Rompuy est moins armé pour actionner de tels relais.

. les hommes clés – les réseaux

> Sous Martens. Fons Verplaetse, le cabinettard; Jef Houthuys, le syndicaliste; Hubert Detremmerie, le banquier. Réuni autour du Premier ministre Martens dans la discrétion du village ardennais de Poupehan, ce trio issu de la mouvance démocrate-chrétienne pose les jalons décisifs de la politique de redressement. En dehors de la sphère gouvernementale.  » Ce n’est pas l’élite qui se réunissait à Poupehan, mais des gens de milieux simples : ces fils de paysan, de fabricant de fourrage, de tailleur ont distillé leur stratégie dans des groupes puissants comme la CSC, la famille sociale-chrétienne et les cabinets « , rappelle l’ancien journaliste politique Hugo De Ridder. Jef Houthuys en particulier, le leader du syndicat chrétien, joue un rôle clé dans la réussite du programme d’austérité en emportant, non sans mal, l’adhésion de ses troupes syndicales.

> Sous Dehaene. L’ex-chef de cabinet de Martens, devenu gouverneur de la Banque nationale, accomplit un travail tout aussi titanesque sur le plan monétaire. Jean-Luc Dehaene peut à nouveau s’appuyer sur Fons Verplaetse, l’homme de l’arrimage du franc belge au Deutsche Mark.  » Verplaetse, c’était un vice-Premier sans avoir le titre « , confie Mark Eyskens.  » Un homme à la vision encore très belge des problèmes budgétaires, et qui était écouté au CVP « , complète un ancien ministre.

> Sous Van Rompuy. Aucun nom n’émerge franchement à l’évocation d’un possible complice de l’envergure d’un Verplaetse pour épauler Van Rompuy. Le nom de Luc Coene, vice-gouverneur de la Banque nationale, est cité mais sans grande conviction : l’ex-chef de cabinet de Guy Verhofstadt, libéral convaincu et influent, n’a pas le profil de l’éminence grise de Van Rompuy.  » Ce qui lui manque dans son équipe, c’est un Dehaene et son réseau « , lâche un connaisseur du CVP. Dehaene, l’homme de l’ACW, le Mouvement ouvrier chrétien flamand, au carnet d’adresses plus que garni, figure toujours parmi les soutiens les plus précieux de Van Rompuy. Les deux hommes ont formé un vrai tandem politique dans les années 1990. Le Premier ministre considérait son ministre du Budget comme un de ses maîtres à penser et louait ses capacités d’analyse. La complicité vieille de trente ans existe toujours. Pas sûr qu’elle puisse encore vraiment peser sur le cours des choses. A près de 70 ans, l’actuel président de Dexia a perdu de sa force de frappe. Mais surtout, les temps ont changé. Partis politiques et partenaires sociaux, notamment syndicaux, ont pris leurs distances, singulièrement depuis le Plan global de 1993. Un ancien ministre s’en inquiète :  » Cette proximité, qui était maintenue même dans les moments les plus difficiles, nous permettait de tester et de calibrer les mesures envisagées auprès des dirigeants syndicaux. De sentir celles qui seraient totalement inacceptables à leurs yeux et ce qu’ils feraient mine de refuser haut et fort tout en les jugeant inévitables. On pouvait ainsi savoir jusqu’où ne pas aller trop loin.  » Cela ne fait pas pour autant de Herman Van Rompuy un homme seul. Il roule sa bosse depuis assez longtemps dans les allées du pouvoir pour en connaître tous les rouages et cultiver des liens forts. Ainsi celui tissé avec Elio Di Rupo : le président du PS n’a jamais oublié que Herman Van Rompuy a été un des rares ministres à le soutenir ouvertement lorsqu’il était la cible de graves accusations de pédophilie en 1997. En pleine rigueur, ce genre de geste envers le chef de la première formation francophone, socialiste de surcroît, peut être précieux. n

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