Cinéma En quête d’immortalité

Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

Passionnant dans la réussite (Requiem for a Dream), Darren Aronofsky l’est aussi dans l’échec avec The Fountain, voyage temporel vers la source d’éternelle jouvence

Il est des échecs ambitieux plus intéressants que bien des réussites modestes. Le jeune et surdoué Darren Aronofsky en apporte la preuve avec The Fountain, film fou et inabouti, emphatique et surchargé, poétique et assurément bizarre. Le réalisateur new-yorkais s’était révélé voici une petite dizaine d’années avec Pi et son énigme métaphysique sur fond de maths et de judaïsme, pour confirmer ensuite, avec Requiem for a Dream, une extraordinaire adaptation du roman culte de Hubert Selby Jr., Last Exit to Brooklyn. Devenu artiste culte, encensé par la critique la plus pointue et suivi par un public fervent, Aronofsky se retrouva  » pris d’un désir brûlant d’aborder le thème de l’immortalité, à travers une histoire qui parlerait en même temps d’amour fou et de refus de voir disparaître ce qu’on aime « .

Entre l’idée et sa concrétisation, plusieurs années passèrent, d’abord pour obtenir le financement nécessaire à un projet demandant des décors élaborés et des effets spéciaux coûteux, puis à sortir de la crise causée par le départ des acteurs principaux : Brad Pitt (pour  » divergences artistiques « ) et Cate Blanchett… Suspendu deux années durant suite à cette double défection, The Fountain allait finalement voir le jour avec un budget réduit de moitié et, dans les rôles principaux, Hugh Jackman ( X-Men) et Rachel Weisz ( The Constant Gardener), par ailleurs compagne du cinéaste.

L’amour, toujours l’amour

 » J’ai voulu explorer, en assumant une certaine innocence devant ces choses, les rapports entre notre mortalité et notre humanité « , commente Darren Aronofsky, dont le film reprend la structure en trois époques du classique  » muet  » de Griffith, Intolerance. Nous suivons ainsi tout à la fois les périlleux efforts d’un conquistador cherchant la fontaine de Jouvence au xvie siècle, les recherches d’un savant d’aujourd’hui voulant sauver sa compagne du cancer qui la ronge, et le voyage spatio-temporel d’un astronaute du xxvie siècle…  » Dans ses différentes incarnations, c’est toujours l’amour qui motive essentiellement le protagoniste, déclare le réalisateur, et c’est ce sentiment fragile et incomparable pourtant qui donne son sens au reste, à la quête métaphysique.  »

Beau propos, belle ambition, que relaient des images souvent magnifiques, parfois inutilement alourdies d’intentions. Si le relatif manque de moyens ne se fait pas trop sentir, le glissement progressif vers un galimatias philosophique  » new age  » alambiqué en diable ne sert pas un film étrange et inabouti, où le talent fou d’un cinéaste un peu perdu brille, çà et là, d’une fulgurante évidence.

Louis Danvers

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