Choc des titans !

Barbara Witkowska Journaliste

Défendus par l’impétueux OPRL, Beethoven, Janácek, Holst et Elgar déchaînent leurs forces symphoniques lors du Festival Guerre(s) et Paix. Ça va chauffer à Liège !

Attention, événement ! Avec une programmation à la (dé)mesure de ces quatre compositeurs convoquant plus de cent musiciens, l’Orchestre philharmonique royal de Liège ajoute sa pierre à la commémoration de la guerre 14-18. Le chef viennois Christian Arming a choisi quatre oeuvres symphoniques colossales, à commencer par Les Planètes de Gustav Holst. Composée en plein conflit, entre 1914 et 1917, cette oeuvre bouleversante s’inspire des sept planètes du système solaire et sollicite 112 musiciens dont 71 cordes mais aussi le grand orgue, 2 timbaliers, 4 percussionnistes et 15 cuivres.  » Cette composition a une puissance d’évocation extraordinaire, une sorte de Star Wars avant l’heure, explique Christian Arming. Elle a d’ailleurs influencé de nombreux groupes de rock. Les Planètes dévoilent leurs multiples facettes, violente et fracassante pour Mars, la planète de la guerre, mais aussi d’autres plus apaisantes et un peu mystiques, comme Vénus et Neptune.  » Le Concerto pour violoncelle d’Edward Elgar, composé en 1919, empreint de pessimisme et de mélancolie, décrit la noirceur de la guerre. L’archet du violoncelliste Alban Gerhardt lui apportera toute la sensibilité et la profondeur.

En 1926, la Tchécoslovaquie, enfin libérée de la longue domination des Habsbourg, vit dans une ambiance plus sereine. C’est alors que Leoš Janácek compose sa Sinfonietta qui sonne comme une résistance à toutes les oppressions et comme un appel à l’unité des peuples. Puissante et exigeante, cette page symphonique, très rarement programmée en Europe, est apparemment plus connue au Japon. Les fans de Haruki Murakami se souviendront qu’Aomamé et Tengo, les deux sympathiques protagonistes du best-seller 1Q84 l’écoutaient en boucle.  » C’est une oeuvre avec laquelle j’ai un lien émotionnel particulier, poursuit Christian Arming. En Tchéquie, où j’ai été directeur musical de l’Orchestre philharmonique Janácek d’Ostrava, la Sinfonietta fait office d’hymne national, au même titre que Ma Patrie de Smetana. Elle est peu jouée car elle sollicite 12 bois et 25 cuivres pour un total de 101 musiciens et est techniquement très difficile.  » On guettera, enfin, les déchaînements insensés de la Neuvième Symphonie de Beethoven devenue, par le message de paix (l’Ode à la joie) qu’elle véhicule, un symbole de fraternité universelle.

(Re)découvrir Jongen

Après ces chocs musicaux à la Salle philharmonique, on prolongera les émotions en écoutant, chez soi, le nouveau CD de Joseph Jongen, Pages intimes. Ce portrait musical des années de la Grande Guerre, magistralement interprété par l’OPRL sous la direction de Jean-Pierre Haeck, est dû à l’excellente initiative de l’association Musique en Wallonie.  » Jongen est un compositeur méconnu et je suis convaincu de l’intérêt musical de cette production, souligne Jean-Pierre Haeck. On est dans un contexte de guerre. Il existait une forme d’incertitude par rapport à l’exécution de ces oeuvres. Beaucoup de musiciens étaient au front, il y avait une pénurie d’orchestres, de salles et de public. Par conséquent, les oeuvres gravées sur le CD étaient destinées à un ensemble réduit et j’ai tenu à respecter ces consignes. On joue donc dans un orchestre de chambre élargi. C’est une musique très surprenante qui évoque la fin de la période romantique, Ravel et Debussy. Je n’ai qu’un mot à dire : soyez curieux !  »

Festival Guerre(s) et Paix, du 18 au 22 mars, www.oprl.be

CD Pages Intimes de Joseph Jongen, Musique en Wallonie.

Barbara Witkowska

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